A l’heure du bilan, Kévin Luron se montre satisfait de sa saison, marquée notamment par un titre de vice-champion de France Elite en salle à Bordeaux cet hiver. Coincé entre deux générations « jeunes » et « anciens » pétris de talents, l’international de 25 ans est un athlète d’expérience, qui estime qu’il dispose d’une marge de progression lui permettant de pouvoir espérer rivaliser avec le gratin français. Un défi qu’il aborde avec sportivité. Interview.
— Quel bilan global tirez-vous de votre saison ?
Ça a été ma meilleure saison. Tout d’abord, l’hiver s’est bien passé. J’ai été sacré vice-champion de France Elite en salle à Bordeaux avec 16,72 m, une performance qui m’a permis de me qualifier pour les championnats d’Europe de Belgrade où je termine à la dixième place. J’ai mis un peu de temps à me remettre dedans l’été à cause d’une blessure au tendon d’Achille lors d’un stage à Barcelone. Je suis arrivé au bon moment lors des France Elite à Marseille où j’améliore mon record personnel (16,85 m). Je réalise à cette occasion les minima IAAF pour les Mondiaux de Londres mais la densité du triple saut est exceptionnelle et il n’y a que trois athlètes qui peuvent être sélectionnés. Cela me tenait malgré tout à cœur de partir aux Jeux de la Francophonie à Abidjan (Côte d’Ivoire) où je décroche une médaille d’argent et ma première médaille internationale. Globalement, c’était une saison positive mais logiquement améliorable si la blessure n’était pas survenue. Ça laisse augurer de bonnes choses pour la saison qui arrive.
— Comment s’est passé la reprise de l’entraînement ?
(Il rit.) J’ai repris aujourd’hui (2 octobre) par une séance de côtes. Demain j’ai deux séances donc l’heure de la reprise a sonné mais comme toutes les reprises je ne suis pas excité de ce qui m’attend, je prends tout cela avec le plus grand calme. Comparé aux autres années, j’ai de très bonnes sensations. J’ai 25 ans, j’entre dans l’âge de la maturité. Je pense avoir acquis une certaine expérience au fil des années, ce qui me permet de retrouver la technique plus facilement. C’est excitant.
— Les objectifs de la saison hivernale 2018 sont-ils déjà définis ?
On a déjà fixé toute la saison en salle avec mon coach Fréderic Mirza. J’espère reprendre à Tignes (10-12 janvier), c’était super ce qu’ils avaient organisé l’année dernière, le fait de sauter à une altitude de 2100 m. L’objectif ce sont les Mondiaux en salle à Birmingham (1-4 mars). Je n’ai pas encore regardé le niveau de performance requis mais il devrait se trouver aux alentours des 16,80 m ou 16,90 m. J’irai pour prendre de l’expérience et faire une finale. Et plus si affinités comme on dit.
— La barre des 17 mètres, c’est pour cet hiver ?
Je reste sur ma faim parce que je pense que je les avais dans les jambes cet été. La forme est arrivée un peu trop tard. J’ai eu deux belles compétitions, les France Elite (16,85 ; -0,3 m/s) puis les Jeux de la Francophonie (16,76 m ; -1,5 m/s) avec de la belle confrontation. Malheureusement, je n’ai pas été épargné par un vent de face tourbillonnant. C’est un aléa à maîtriser, mais j’ai eu un manque de repères dans mes marques. Selon mon entourage, les 17 mètres auraient du être dépassés. Ce n’est que partie remise et cet hiver il n’y aura pas d’excuses.
— Qu’est-ce que vous devez travailler techniquement pour y arriver ?
Je vais mettre l’accent sur la conservation de la vitesse dans le saut, ce qui va me permettre d’être rasant dans mes bondissements et me permettre de gagner de précieux centimètres qui doivent me projeter sur une belle performance. Ce travail a déjà commencé à se mettre en place cette année et il faut persévérer.
— Enfin, un petit mot sur l’émulation qui règne au sein des triple-sauteurs français.
Il y a une jeune génération qui arrive qui a des dents longues et c’est super excitant. Je me retrouve entre deux générations, d’un coté celle de Teddy Tamgho et de Benjamin Compaoré qui arrive sur la trentaine. De l’autre, des jeunes de 18 à 21 ans, emmenés par Melvin Raffin, qui réalisent des performances honorables. C’est parfait parce que je montre aux anciens que je fais partie des jeunes, et aux jeunes que c’est moi l’ancien et qu’il y a encore du boulot si vous voulez me dépasser (rires). On s’entend tous très bien, c’est une saine concurrence et cela nous permet surtout de se dépasser lors des championnats Elite. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’on se retrouve tous ensemble et qu’on réalise tous nos meilleurs sauts. C’est un signe qui ne trompe pas.
Les concurrents sont prévenus, il faudra compter sur Kévin Luron cette saison.