Alors que Karsten Warholm (Puma), Sydney McLaughlin (New Balance) et Yulimar Rojas (Nike) ont fait valser des records du monde aux Jeux olympiques de Tokyo, il a beaucoup été question des pointes d’athlétisme équipées de plaque de carbone. Stadion vous présente les modèles que portaient les trois athlètes sur la piste tokyoïte.
Les chronos se sont affolés au stade olympique de Tokyo qui a été le théâtre d’une succession de performances stratosphériques. Si la rapidité de la piste a été une première explication plausible, on a surtout évoqué dès le début de ces Jeux olympiques la nouvelle génération de chaussures dotées d’une plaque de fibre de carbone et d’une mousse ultra-légère. Au pays du soleil levant, trois grands records du monde ont été battus en athlétisme. Enfin, voler en éclats, faudrait-il dire plutôt. Il y a d’abord eu les immenses jambes de Yulimar Rojas (15,67 m) qui, 26 ans plus tard, sont allées au-delà des 15,50 m de l’Ukrainienne Inessa Kravets, de dix-sept centimètres exactement. Dans la foulée, les records hommes et femmes du 400 m haies ont été explosés. En finale, le Norvégien Karsten Warholm (45″94) et l’Américaine Sydney McLaughlin (51″46) ont largement amélioré les meilleurs temps de l’histoire qu’ils avaient établis dans les mois précédents.
Mais ces records planétaires aussi incroyables soient-ils, ne sont en rien inhabituels en l’athlétisme à l’occasion des Jeux olympiques : trois records étaient également tombés à Rio en 2016, quatre à Londres en 2012 et aussi quatre à Pékin en 2008. Si pour les performances sur route, plusieurs études ont annoncé un gain d’environ 4%, sur la piste, il n’y a pas encore assez de recul pour avoir des données fiables. Néanmoins, on sait, d’après les témoignages de plusieurs athlètes, que ces « chaussures magiques » peuvent changer la donne.
Karsten Warholm : Puma EvoSpeed Tokyo Future Faster +
Karsten Warholm a laissé tout le monde sans voix lors de la finale du 400 m haies aux Jeux olympiques de Tokyo, en faisant s’arrêter le panneau d’affichage à 45″94. Ce chrono est à ranger illico dans la catégorie des marques de légende, comme les 9″58 du Jamaïcain Usain Bolt. Beaucoup de spécialistes n’hésitent pas à en faire la course la plus folle de toute l’histoire de l’athlétisme. Le Viking a réussi le grand chelem : champion d’Europe (Berlin en 2018), double champion du monde (Londres en 2017 et Doha en 2019) et, maintenant, champion olympique. Le Norvégien de 25 ans a fait entrer sa discipline dans une nouvelle dimension et a aspiré dans son sillage les autres finalistes vers des sommets jamais atteints pour la plupart. Ce tour de piste avec obstacles est l’événement qui a attiré le regard du grand public sur le phénomène des chaussures recourant au carbone.
En finale du 400 m haies, Karsten Warholm a couru avec des Puma EvoSpeed Tokyo Future Faster +, conçues ni plus ni moins par les ingénieurs de Mercedes AMG Petronas de F1 pour l’élaboration des lames de carbone sur toute la longueur. Ces chaussures ne comportent cependant pas la mousse nouvelle génération : « Avec mes sponsors, nous avons travaillé à un concept original, mais je ne voulais pas que l’on me mette une trop grosse épaisseur entre la plante du pied et le sol. Certes j’ai une lame de carbone, mais on a voulu les rendre les plus fines possible, ce que j’aime. Je pensais qu’il était important de garder une chaussure qui rende les résultats crédibles, ne pas rajouter une sorte de trampoline en dessous qui s’éloigne des valeurs de notre sport », indique le nouveau champion olympique.
L’objectif de la collaboration entre Puma et Mercedes AMG Petronas était de concevoir des chaussures qui pèsent à peine 135 grammes chacune. Deux « pneus » parfaits pour permettre à Karsten Warholm, en contrat avec la marque au félin bondissant depuis juillet 2019, de lâcher tout son « moteur » au sol. Côté caractéristiques techniques, il y a huit pointes permanentes de 7 mm qui ne peuvent pas être dévissées. La tige de la paire est dotée de la technologie MATRYX MICRO et de fils de fibre de carbone pour un soutien optimal. Une surface en caoutchouc a été placée au niveau du talon pour amortir les vibrations et les chocs à chaque impact au sol. On peut aussi noter que les couleurs des cinq anneaux olympiques (bleu, jaune, noir, vert et rouge) apparaissent sur fond blanc en lignes pointillées.
Sydney McLaughlin : New Balance FuelCell MD-X
Le 400 m haies était décidément la course de tous les possibles à Tokyo. 24 heures après le record du monde battu par les deux premiers de la finale masculine, le scénario s’est répété lors de la finale des femmes. Sydney McLaughlin s’est imposée en 51″46, effaçant ainsi sa précédente marque mondiale (51″90) de quarante-quatre centièmes. Sa compatriote Dalilah Muhammad, malgré un temps canon de 51″58 qui fait d’elle la deuxième plus rapide de l’histoire sur la distance, n’a pris que la médaille d’argent. La Néerlandaise Femke Bol (21 ans) a complété ce magnifique podium en 52″03.
Sydney McLaughlin avait été en 2016 à Rio la plus jeune athlète américaine engagée (16 ans seulement) sur des Jeux depuis Munich en 1972 et a confirmé avec cette prestation les nombreux espoirs placés en elle depuis son émergence dans les catégories de jeunes. Passée professionnelle en 2019, avec à la clé un contrat estimé à un million de dollars annuels avec l’équipementier New Balance, elle a rejoint en 2020 le groupe du célèbre coach Bob Kersee. À l’occasion de la finale olympiques à Tokyo, on a retrouvé aux pieds de Sydney McLaughlin les FuelCell MD-X de New Balance spéciale Tokyo dans un coloris orange, avec une plaque en fibre de carbone et une mousse FuelCell qui procure une sensation de propulsion.
Yulimar Rojas : Nike Triple Jump Elite 2 Rawdacious
Bim, bam boum… 15,67 m ! Il a fallu attendre vingt-six ans, mais le record du monde du triple saut a été très largement battu à Tokyo. Alors qu’Inessa Kravets trônait au sommet depuis août 1995, avec une marque de 15,50 m, Yulimar Rojas a atterri à 15,67 m. Double championne du monde et argentée à Rio, en 2016, la Vénézuélienne de 25 ans aux jambes interminables portait les Nike Triple Jump Elite 2, avec un coloris spécial JO baptisé Rawdacious, considérées comme les meilleures chaussures jamais conçues pour la discipline. Un modèle qui est d’ailleurs très difficile à se procurer en France.
D’après les infos de la marque au Swoosh, la semelle intermédiaire est plus importante que sur la première version pour absorber les chocs sur chacun des bonds jusqu’à l’atterrissage. Une plaque intégrale en carbone aide à rester stable pendant la course et le saut. Le talon perforé permet de réduire le poids tout en offrant une grande respirabilité. La chaussure est composée de 6 pointes pour une traction légère et durable.
Pour rappel, à l’été 2020, World Athletics avait tenté d’anticiper la problématique en modifiant sa réglementation internationale. Deux mesures avaient été prises par l’instance internationale. D’abord, interdire en compétition l’utilisation de prototypes, afin d’éviter les inégalités entre les athlètes ayant des accès aux chaussures dernière technologie et les autres. Ensuite, limiter l’épaisseur maximale des semelles à 20 mm pour les sprints, saut, haies et lancer, et à 25 mm pour le triple saut et les distances supérieures.
Crédits photos : Solène Decosta / STADION