En totalisant 8492 points au décathlon à seulement 20 ans, l’Australien Ashley Moloney a montré que le monde de l’athlétisme devra compter avec lui dans les années à venir. Bluffant.
On a un moment pensé samedi que Kevin Mayer, malgré ses excellents 8552 points, ne resterait que quelques heures en haut du classement des bilans mondiaux 2020 au décathlon. Alors que le recordman du monde (9126 points en 2018) assurait sereinement sa place aux Jeux olympiques de Tokyo à La Réunion, l’Australien Ashley Moloney, 20 ans, compilait un impressionnant total lors de la première journée des championnats du Queensland : 10″36 (-0,3 m/s) sur 100 m, 7,67 m (+2,3 m/s) à la longueur, 13,62 m au poids, 2,11 m à la hauteur et 45″82 sur 400 m, soit un pactole de 4613 points. Il s’agit de la douzième meilleure première journée de l’histoire du décathlon. À noter le solide chrono sur le tour de piste où seuls les Américains Ashton Eaton (45″00) et Bill Toomey (45″68) ont fait mieux que le jeune australien lors des dix travaux. À titre de comparaison, à mi-parcours, le Français virait avec 4563 points lors de son décathlon record à Talence.
Race footage from the 400 pic.twitter.com/sQlN3Vx0e8
— Queensland Athletics (@qldathletics) December 19, 2020
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Nouveau record d’Australie
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Après une deuxième journée réussie au vu de ses records personnels avec 14″17 sur 110 m haies, 43,93 m au disque, 4,80 m à la perche, 57,77 m au javelot et 4’48″48 sur 1500 m, il enregistre un 8492 points, record national battu de deux unités (Jagan Hames en 1998). Il est difficile de ne pas être impressionné par les prouesses du natif de Brisbane, capitale de l’État du Queensland. Un grand blond, prodige dans les les épreuves combinées… On a l’impression d’avoir déjà vu ça quelque part. À 20 ans (né en 2000), il ne disputait que son quatrième décathlon chez les grands. En 2019, il a remporté les championnats d’Océanie en faisant grimper son record personnel à 8103 points. Profil indéniablement coureur-sauteur, ses qualités explosives font de lui un sérieux rival pour Kevin Mayer dans la lutte pour le titre olympique l’été prochain.
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Champion du monde juniors
Si Moloney et Mayer ont explosé aussi jeunes, ce n’est pas un hasard. Ils disposent de qualités hors normes mais pas seulement. Les deux sont aussi des compétiteurs hors-pair. Ils font partie de ces athlètes qui répondent présent le jour J. Le champion du monde juniors 2018 à Tampere (Finlande) marche dans les pas de Kevin Mayer, lui aussi champion du monde dans la catégorie en 2010 à Moncton (Canada). Toutefois, si l’on examine leurs résultats au décathlon, épreuve par épreuve, l’année où ils sont devenus champions U20, on constate qu’Ashley Moloney devance Kevin Mayer dans la majorité des épreuves de décathlon et qu’il a une nette avance sur le score final (8190 contre 7928 points).
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« Je vais le fumer »
Après son décathlon à La Réunion hier, Kevin Mayer n’a pas non plus manqué de taquiner à l’arrivée le prodige australien, qui venait de réussir l’exploit de cumuler 4613 points lors de sa première journée d’un décathlon : « Je vais le fumer, a-t-il lâché dans un grand sourire au micro de France Télévisions. Il est incroyable ! Un décathlonien, c’est être bon sur deux journées mais ce qu’il a fait là sur la première, c’est à des années-lumière de ce que je faisais à 20 ans donc bravo à lui. C’est une nouvelle adversité mais je crois qu’on me connaît. Je commence à être le vieux du décathlon (28 ans) mais je veux garder mon territoire. C’est une mauvaise nouvelle pour moi mais une bonne pour le décathlon. Je pense qu’il a les capacités de battre mon record du monde mais il faut qu’il travaille techniquement car sa deuxième journée est plus faible. Mais peut-être qu’il a progressé et qu’il va l’exploser. Je n’ai jamais été contre la grosse adversité donc s’il y arrive, ça sera à moi de le rebattre à nouveau ! ».
Une première confrontation qui devrait prendre corps les 4 et 5 août prochain au stade national de Tokyo, théâtre des Jeux olympiques en 2021. Avantage nette toutefois pour Kevin Mayer qui pourrait décrocher la médaille d’or à la faveur de superbes performances dans les lancers, le point encore relativement faible d’Ashley Moloney.
Crédit photo : Jean-Luc Juvin / STADION