Azeddine Habz pour prolonger son année de rêve

Dix-huit Tricolores, déjà présents dans l’atmosphère feutrée du huis clos du stade national de Tokyo lors des JO il y a quatre ans, figurent à nouveau parmi les sélectionnés pour les Mondiaux 2025. Parmi eux, Azeddine Habz, qui compte cette fois mettre l’enceinte en ébullition. Le sociétaire du Val d’Europe Montévrain Athlétisme de 32 ans caracole tout en haut de la liste des engagés sur 1500 m, grâce à son chrono de 3’27″49 qui fait de lui le sixième performeur de l’histoire. L’élève de Philippe Dupont et Serge Olivares se présente pour la première fois au départ d’un grand championnat international senior avec la pancarte de favori dans le dos. Son plus proche concurrent est le Kényan Phanuel Kipkosgei Koech, recordman du monde juniors avec ses 3’27″72, qu’il avait devancé au Meeting de Paris le 20 juin dernier. Autre athlète à suivre : le Norvégien Jakob Ingebrigtsen (record d’Europe en 3’26″73 à Monaco en 2024) qui n’a épinglé aucun dossard de la saison estivale en raison de douleurs aux tendons d’Achille. Le podium est l’objectif minimal de la Français.

Jimmy Gressier outsider, vraiment ?

Le demi-fond aura à coeur d’apporter plusieurs breloques dans l’escarcelle française. Cela fait quelques années que Jimmy Gressier est appelé à devenir l’un des tout meilleurs fondeurs de la planète. Il en a l’occasion au pays du soleil levant sur 5000 m (12’51″59) et 10 000 m (26’58″67), distances où il détient les records de France. Sa victoire sur 3000 m en finale de la Diamond League le 28 août à Zurich l’a propulsé en prétendant au podium mondial. Sur le plus petit des formats où il est engagé, le Boulonnais de 28 ans aura notamment fort à faire dans une finale tactique face au Norvégien Jakob Ingebrigtsen, champion olympique et du monde en titre, l’Américain Grant Fischer, médaillé de bronze aux JO de Paris sur 5000 m et sur 10 000 m, et le Suédois Andreas Almgren, recordman d’Europe du 5000 m (12’44″27 le 15 juin 2025 à Stockholm) et du 10 km (26’53 le 12 janvier 2025 à Valence). Ses compatriotes Yann Schrub (12’56″67), champion de France Elite 2025, et Etienne Daguinos (12’55″76), en bronze à Talence, sont également capables de s’inviter dans le top 8 sur 5000 m.

Just Kwaou-Mathey prêt à batailler

Ses résultats 2025 sur 110 m haies font de lui un candidat indéniable à la breloque dorée. Just Kwaou-Mathey, qui a toujours décroché au moins une médaille internationale par an depuis 2022 (bronze à l’Euro 2022, bronze à l’Euro indoor 2023, bronze aux Mondiaux indoor 2024 et bronze à l’Euro indoor 2025), entend bien également tâter du podium, lui qui sait parfaitement se sublimer dans les grands rendez-vous. Le hurdler d’Evreux AC, qui a éclaboussé de toute sa classe les Championnats de France Elite à Talence en faisant s’arrêter le panneau d’affichage à 12″99 (3e au bilan mondial), croisera le fer avec les Américains Cordell Tinch, détenteur de la meilleure performance mondiale de l’année en 12″87, Grant Holloway, triple champion du monde en titre (2019, 2022 et 2023), crédité en 13″11 uniquement, et Dylan Beard (13″02), sans oublier le Japonais Rachid Muratake, descendu lui aussi sous les 13 secondes (12″92).

Auteur d’une magnifique saison en salle 2025, marquée par un titre de vice-champion d’Europe à Apeldoorn et du monde à Nankin sur 60 m haies, Wilhem Belocian (13″18 en 2025) est aussi podiumable, à tel point qu’on l’imagine signer un temps sous les 13 secondes au Japon. Comme lors des JO de Paris, Sasha Zhoya (13″06 en 2025) débarque à Tokyo avec un corps qui continue malheureusement de le tourmenter. « Depuis mon début de saison en avril jusqu’à aujourd’hui, je n’ai pas pu terminer une séance d’entraînement sans douleur. J’ai réussi à me qualifier pour les championnats du monde dans ces conditions, mais malheureusement, je ne peux pas faire grand chose de plus. Mon corps étant loin d’être en forme, et ça fait du mal de dire que je sais que je ne pourrai pas présenter la meilleure version de moi même aux championnats », a-t-il confié il y a quelques jours sur Instagram.

Melvin Raffin et Yann Chaussinand doivent y croire dur comme fer

Au total, seize Tricolores figurent dans le top 10 de leur discipline, sur la liste des engagés. L’heure est venue de viser plus grand pour Melvin Raffin qui, avec Azeddine Habz et Just Kwaou-Mathey, s’immisce dans le top 3 mondial en 2025. Le 3 août à Talence, le représentant du Grand Paris Seine & Oise Athlétisme a atterri à 17,52 m au triple saut, explosant son record personnel qui datait… des qualifications aux Championnats d’Europe en salle en 2017 à Belgrade (17,20 m). Une performance XXL qui le classe au troisième rang mondial cette année (à égalité avec le Jamaïquain Jordan Scott mais à distance de l’Italien Andy Diaz Hernandez et ses 17,80 m et du Chinois Wu Ruiting et ses 17,68 m). Melvin Raffin n’a jamais réussi à exprimer tout son potentiel en grand championnat. À 27 ans, il tient l’occasion rêvée d’y arriver. L’ancien prodige de l’athlétisme français retrouvera un sautoir où il avait atteint la finale olympique en 2021.  

C’est le nouveau poids lourd de l’athlétisme français. Finaliste des Championnats d’Europe (5e à Rome) et des Jeux olympiques (8e à Paris), Yann Chaussinand a frappé un grand coup le 24 mai au Meeting de Zagreb, en faisant retomber son marteau à 81,91 m (4e au bilan mondial). Grâce à ce jet, le représentant du Clermont Auvergne Athlétisme est monté au deuxième rang des meilleurs performeurs français de l’histoire derrière Gilles Dupray (record de France à 82,38 m en 2000). Pour monter sur la boîte, l’Auvergnat de 27 ans devra certainement se rapprocher dangereusement ou battre la meilleure marque nationale de tous les temps. Ses rivaux, le Hongrois Bence Halasz, leader avec 83,18 m, l’Américain Rudy Winkler (83,16 m), le Canadien Ethan Katzberg (82,73 m), champion du monde et olympique, et l’Ukrainien Mykhailo Kokhan (81,66 m) ont projeté leur engin très loin cette année.

Hilary Kpatcha et Marie-Julie Bonnin en bonne place pour la médaille

Au rayon des prétendants tricolores qui ont aussi une médaille dans le viseur, comment ne pas mentionner Hilary Kpatcha (4e au bilan 2025) qui est dans la forme de sa vie. Très régulière aux alentours des 6,80 m, la deuxième performeuse française de tous les temps au saut en longueur (7,02 m) est montée à trois reprises sur le podium d’une Diamond League (Londres, Chorzow et Zurich) en 2025 et tient une occasion en or de décrocher sa première récompense en grand championnat. Ses principales concurrentes seront l’Américaine Tara Davis-Woodhall (7,12 m en 2025), en or aux JO de Paris, l’Allemande Malaika Mihambo (7,07 m en 2025), en argent aux JO de Paris, et l’Italienne Larissa Iapichino (7,06 m en 2025).

L’année 2025 a aussi accouché de très belles confirmations, que Marie-Julie Bonnin incarne à merveille. La championne du monde en salle 2025 de Nankin a largement les moyens de se hisser jusqu’en finale (9e au bilan). Pour se mêler à la lutte pour les médailles, il faudra sans doute améliorer encore le record de France qu’elle co-détient avec Ninon Chapelle à 4,75 m. Très forte mentalement, la protégé de Damiel Dossevi sait répondre présent lors des grands rendez-vous. Les meilleures performeuses mondiales de l’année, les Américaines Katie Moon (4,85 m) et Sandi Morris (4,83 m) ains que la Britannique Molly Caudery (4,85 m), seront de la partie.

Mélina Robert-Michon entre un peu plus dans l’histoire de l’athlétisme

La taulière de l’équipe de France s’apprête à participer à sa onzième campagne planétaire, égalant ainsi le record du nombre d’apparitions aux Championnats du monde pour une femme (à égalité avec les marcheuses portugaises Susana Feitor et Inês Henriques). Un modèle de longévité au plus haut niveau. En projetant son disque à 64,04 m à Ramona (Oklahoma) le 12 avril, Mélina Robert-Michon n’avait pas fait retomber son disque aussi loin depuis juin 2023.

À 46 ans, « MRM » est une jeune femme qui pète la forme et l’âge n’a pas de prise sur ses performances. Vice-championne du monde à Moscou en 2013 et médaillée de bronze à Londres en 2017, Mélina Robert-Michon, qui a retrouvé les sensations après lesquelles elle courait en compétition depuis plusieurs mois, arrive à Tokyo en position d’outsider. L’Américaine Valarie Allman, grâce à ses 73,52 m, détient la meilleure performance du XXIe siècle, personne n’ayant lancé aussi loin depuis 1989.

À noter que le marcheur portugais Joao Vieira, sélectionné pour ses 14e Championnats du monde, est en passe de battre le record de participations aux Championnats du monde.

Renaud Lavillenie pour une sixième médaille mondiale en plein air

On vous l’accorde, Wikipédia n’est pas la source la plus sûre dans laquelle piocher, mais un rapide coup d’œil à la page de Renaud Lavillenie confirme que son palmarès est un véritable livre de l’athlétisme depuis plus d’une décennie. Médaillé mais jamais titré lors de sept éditions des championnats du monde en plein air, le plieur de gaule hexagonal part en quête d’une sixième breloque. La tâche s’annonce compliquée, tant la discipline a atteint des sommets de densité cet été avec le meilleur saut de l’histoire en plein air du Suédois Armand Duplantis avec 6,29 m et les 6,08 m du Grec Emmanouil Karalis.

Mais le champion olympique de Londres, qui va participer à ses huitièmes Mondiaux, est fait d’un métal unique, celui des grands champions, et sait se sublimer lors des rendez-vous qui comptent. Son immense expérience et sa capacité à arriver en forme le jour J en font de lui un vrai outsider. Avec une meilleure performance en 2025 à 5,91 m, l’athlète de 38 ans, septième des bilans, ne devrait pas être loin de la lutte pour l’attribution des places sur le podium. Preuve de son incroyable régularité, Renaud Lavillenie a franchi plus de 5,80 m pour la quinzième année sur dix-sept (excepté 2023 et 2024). Lui aussi septième performeur de l’année, Thibaut Collet (5,91 m en salle, 5,82 m en plein air en 2025), cinquième à Budapest il y a deux ans, s’il est à son meilleur niveau, est un candidat solide à un podium. Déjà présent aux JO de Tokyo, Ethan Cormont (5,82 m en 2025) tient l’opportunité d’être finaliste planétaire pour la première fois de sa carrière.

Rien est impossible sur les relais

Unique médaille française lors des Mondiaux de Budapest, le relais 4×400 m masculin révèle un collectif renouvelé et prometteur, marqué par l’émergence d’une nouvelle génération. Pour espérer retrouver le podium, ils devront toutefois se transcender et évoluer à leur plus haut niveau. Le 4×400 m femmes ne cesse de progresser et de montrer un beau comportement lors des grands rendez-vous. Les Bleues, qui hormis Louise Maraval (400 m haies) n’ont que l’épreuve collective à préparer. Enfin, les collectifs hommes et femmes du 4×100 m abordent les Mondiaux sans complexe. Pour intégrer le top 8, il faudra réussir une course pleine et des passages très propres. 

Ils ont un coup à jouer

Au saut en longueur masculin, Tom Campagne a sans doute tiré les enseignements de son élimination en qualification des JO de Paris. Pour son quatrième concours en un peu moins d’un an, le Stadiste Bordelais a décollé à 8,27 m aux Championnats de France Elite, se hissant ainsi au quatrième rang des performeurs hexagonaux de l’histoire. Le huitième sur la liste des engagés ne devrait pas être loin de la boîte, mais il faudra bien sûr ne pas tomber dans le piège des qualifications. Même constat pour Erwan Konaté (10e au bilan avec 8,25 m), sacré champion d’Europe espoirs à Bergen (Norvège). Le Grec Miltiadis Tedoglou (8,46 m), tenant du titre, est toujours redoutable en grand championnat.

Alors que pour la première fois de l’histoire, quinze hommes sont descendus au cours de la même année sous les 1’43 sur 800 m, Gabriel Tual (11e au bilan avec 1’42″72) et Yanis Meziane (21e au bilan avec 1’43″71) ont le potentiel pour se frayer un passage jusqu’en finale. Le top 8 sera aussi l’objectif minimum d’Anaïs Bourgoin (7e au bilan sur 800 m en 1’56″97), de Lolassonn Djouhan (7e au bilan au disque avec 70,25 m), de Clémence Beretta (8e au bilan sur 20 km marche en 1h28’05), de Gabriel Bordier (12e au bilan sur 20 km marche avec 1h18’23), de Manon Trapp (15e au bilan sur marathon en 2h23’38), d’Ilionis Guillaume (15e au triple saut avec 14,19 m), d’Aurélien Quinion (16e au bilan sur 35 km marche avec 2h26’24) et d’Agathe Guillemot (17e au bilan sur 1500 m en 3’58″29). Une place parmi les huit meilleurs semble aussi envisageable, voire mieux si cela veut bien sourire pour les steepleurs Nicolas-Marie Daru (16e au bilan avec 8’10″69), Louis Gilavert (17e au bilan avec 8’11″49) et Djilali Bedrani (18e au bilan avec 8’11″52).