Les Championnats de France Elite se sont clôturés ce dimanche à Albi et ont vu les sacres, entre autres, de Cyréna Samba-Mayela sur 100 m haies, Thibaut Collet à la perche et Azeddine Habz sur 1500 m. Avec un invité peu propice aux performances : Le vent qui a dérangé la plupart des épreuves du jour.

Laëtitia Bapté (US Robert) et Cyréna Samba-Mayela (Lille Métropole Athlétisme) avaient fait forte impression en séries du 100 m haies dans l’après-midi et s’avançaient en finale avec l’étiquette de favorites. Les deux jeunes hurdleuses tricolores ont terminé en apothéose ces Championnats de France Elite en réalisant deux véritables coups d’éclat en finale. Entraîné par Teddy Tamgho, Cyréna Samba-Mayela, battue en février dernier par Bapté à Aubière, a pris sa revanche sur la Martiniquaise. Sacrée pour la troisième fois après 2020 et 2021, la championne du monde en salle 2022 du 60 m haies a tout bonnement réalisé la troisième performance européenne de l’histoire ex-aequo avec la Suissesse Ditaji Kambundji mais aussi la septième Française de tous les temps avec un chrono de 12″68 (+0,5 m/s), ce qui constitue également son record personnel. Un centième derrière, Bapté, peut aussi se vanter d’avoir battu son record perso en 12″69 et d’avoir dans ses mains la quatrième perf’ européenne. Autre bonne nouvelle, les deux jeunes athlètes ont couru si vite que les minima pour les Mondiaux de Budapest ainsi que pour les Jeux olympiques 2024 de Paris sont maintenant dans leur poche. La licenciée du Doubs Sud Athlétisme, Awa Sene, déjà médaillée d’or en 2018 et en d’argent l’année dernière, complète le podium en 13″11.

La nouvelle championne de France du 100 m haies s’est exprimée quelques minutes après sa course. « J‘attendais cette course depuis un moment, je savais que Laëticia (Bapté) avait monté son niveau et moi j’aime beaucoup la concurrence. J’avais hâte de courir avec elle, et d’enfin casser la barre des 12″70. Je suis très contente d’avoir pu allier titre et record personnel. J’en avais un peu marre de rester au-delà des 12″70. J’ai couru assez tard cette saison sur 100 m haies, mais cela aurait été improductif de me comparer aux autres. Chacun se prépare selon ses propres plans, je fais confiance à mon coach (Teddy Tamgho). J’ai dû arracher des dents de sagesse, ce qui explique les quelques semaines sans courir, mais la saison est encore longue, et maintenant j’attends les Mondiaux. On repart en stage en Espagne à Barcelone. »

Thibaut Collet matte le vent et décroche un deuxième titre à la perche

Avec une densité incroyable à la perche, le spectacle a malheureusement été perturbé par ce temps venteux. Mais Thibaut Collet (EA Grenoble 38) a dompté les rafales avec une perche plus dure pour remporter un deuxième titre national de rang grâce à un meilleur saut mesuré à 5,71 m. Petit regret, l’Isérois est passé à deux doigts des minima olympiques à son dernier essai à 5,82 m. « Je suis content de décrocher un troisième titre, même si je suis frustré de la tournure du concours, lors duquel on a vraiment galéré avec le vent. Ça se voit avec le résultat global. Le vent a tourné à partir de 5,51 m. C’est devenu très compliqué. Je franchis ma première barre au troisième essai, avec un saut vraiment histoire de passer. Une fois que le chrono est lancé, on ne peut plus faire machine arrière. À cette hauteur, j’étais face à un dilemme : soit je prenais ma plus grosse perche, soit j’en prenais une plus souple avec laquelle j’avais plus de maîtrise. J’ai choisi la deuxième option et ça s’est avéré être la bonne décision. Derrière, je remets un peu les choses dans l’ordre et ça va. Il a fallu s’adapter et certains ont mieux réussi que d’autres. 5,71 m, ça reste une performance correcte, et je valide mon billet pour les championnats du monde. J’ai hâte de préparer cet événement et j’aurai à cœur d’entrer en finale. »

Le représentant du JS Franciscaine et combinard Baptiste Thiery prend la deuxième place après son premier saut du concours à 5,51 m. Le Martiniquais a ensuite essuyé un échec à 5,61 m et deux à 5,71 m. Deux hommes se sont partagés la médaille de bronze car Mehdi Amar-Rouana (EFCVO) et Robin Emig (Gap Hautes Alpes Athlétisme) se sont arrêtés à 5,31 m avec des essais similaires. Ils terminent notamment devant Renaud Lavillenie et Valentin Lavillenie qui ont donc échoué leurs trois tentatives à 5,51 m, synonyme d’un concours avorté prématurément. « C’était un concours particulier avec un vent présent tout le week-end. À la perche, les rafales sont compliquées à gérer. On a tous vite été mis en difficulté, moi le premier malgré un échauffement assez encourageant. Le premier saur a été raté bêtement et ensuite, c’était difficile à gérer donc c’est frustrant de repartir d’Albi sans ramener de résultat. C’est rageant mais c’est le jeu, ça fait partie du sport et j’essaie de relativiser, a déclaré le champion olympique 2012 avant d’en dire plus sur la suite de sa saison. Les deux dernières compétitions ont été frustrantes sur le résultat mais des choses ont été mises en place qui sont révélatrices pour le futur, ce qui est assez paradoxal. Ma présence à Budapest n’est pas encore validée malgré le fait que je remette mon élan complet. Je reprends également des perches correctes et j’arrive à faire des beaux sauts à l’échauffement mais il me manque ce déclic en compétition. Quoi qu’il arrive, je n’abandonnerai pas comme ça au pied du mur. »

L’évidence Azeddine Habz

Azeddine Habz (Val d’Europe Montévrain Athlétisme) était attendu sur le 1500 m et n’a pas déçu. Le tenant du titre a réalisé le doublé en 3’40″20 après une course gérée de bout en bout. Derrière, Alexis Millet (Dijon UC), sacré de 2019 à 2021, a essayé de se frayer un chemin mais n’a pas accroché le podium, craquant sur la fin. C’est Maël Gouyette (Haute Bretagne Athlétisme) qui a arraché la médaille d’argent devant Arthur Gervais (Villeneuve d’Ascq Fretin Athlétisme). Le deuxième performeur français de l’histoire sur la distance a montré un visage confiant à la suite de son nouveau titre. « Cette année, il y avait une sacrée densité. Mais je savais que j’étais capable de gagner. Je suis super satisfait. J’ai contrôlé la course. Je ne voulais laisser à personne la place de patron. J’ai attaqué à 300 mètres de l’arrivée. Pendant 250 mètres, il y a eu sprint contre (Alexis) Miellet. Les 50 derniers ont été un peu raides, mais ça va. Je m’en sors avec ma vitesse sur 800 m. J’irai aux Mondiaux pour chercher au minimum une finale, voire le podium car tout peut arriver sur 1500 m. »

Paméra Losange, c’est carré 

En l’absence de Gémima Joseph (Rou Kou), seule sprinteuse française sous les 23 secondes cette saison, Paméra Losange (EFCVO) avait les faveurs des pronostics et a fait respecter cette logique au terme d’un joli demi-tour de piste. La jeune athlète de 20 ans a récupéré la médaille d’or avec un chrono de 23″25 (+2,2 m/s) devant Hélène Parisot (Athlétic Clubs 92, 23″45) et Diana Iscaye (Pays de Fontainebleau Athlétisme, 23″50). « Je suis vraiment très contente, parce que j’ai travaillé très dur à l’entraînement avec mon coach pour y arriver. Depuis plusieurs années, je n’arrivais pas à sortir les courses que je voulais, et c’était difficile pour moi. Aujourd’hui, j’étais super concentrée sur mon couloir, totalement focus dans le virage, et dans la ligne droite, j’ai tout donné, jusqu’au bout, pour ne pas craquer. »

Gabriel Bordier et Pauline Stey en or sur le 10 km marche

Plus tôt dans la journée, le 10 km hommes et femmes avait lieu sur la route d’Albi. À Caen en 2022, le podium du 10 km marche masculin était dans l’ordre suivant : Gabriel Bordier (US Saint-Berthevin) en or, Aurélien Quinion (EFCVO) en argent et Kevin Campion (Stade Dieppois) en bronze. Rien n’a changé cette année, hormis les chronos. Le Mayennais a conservé son titre de champion de France Elite en près de 39 minutes (39’02), battant son record personnel sur la distance. L’étudiant en médecine s’est arrêté à notre micro après sa course. « Je venais pour faire un gros chrono. Je savais qu’il y avait des gros clients en face avec Aurélien (Quinion) et Kevin (Campion) et qu’il fallait batailler. L’objectif numéro, c’était le titre donc je me suis rapidement retrouvé tout seul et en partant devant je savais que c’était plutôt bien parti. J’ai tout fait pour battre mon record (39″17) et j’ai tenu jusqu’à la fin pour y parvenir. Je dois être en 3’50 au dernier kilomètre. Maintenant, les 38’20 de Yohann Diniz (meilleure performance française de l’histoire sur 10 km marche) sont faisables, j’avais déjà fait 38’18 sur la piste l’année dernière et c’est un peu plus dur sur la route. Cela pourrait être dans mes cordes et j’y penserai les années à venir. » En pleine forme, il a même réalisé les minima pour les Jeux olympiques de Paris 2024. Quinion a terminé plus d’une minute après en 40’16 devant Campion et ses 40’24. 

Chez les femmes, Pauline Stey (Alsace Nord Athlé), championne d’Europe espoirs du 20 km marche à Espoo (Finlande), a signé le record des Championnats d’une seconde et la cinquième meilleure performance mondiale de l’année sur la distance en 44’42. L’Alsacienne devance la tenante du titre Clémence Beretta et ses 45’38. Partie sur des bases élevées, la marcheuse de l’Athlé Vosges Entente Clubs a récolté une minute de punition aux alentours du septième kilomètre, après avoir cumulé trois cartons rouges. En bronze aux espoirs sur 20 km marche, Camille Moutard (Athlé 21) est repartie avec le même métal du Tarn (46’25).

Texte : Dorian Vuillet
Crédits photos : Solène Decosta / STADION