Le pari gagnant de Corane Gazeau

29 novembre 2016 à 19:39

« Il ne faut rien lâcher tant que l’on a pas franchi la ligne d’arrivée ! ». Cette affirmation se concrétise à nouveau avec Corane Gazeau lors de la finale du 800 m des Championnats de France Élite à Angers. Être en dernière position à la sortie du virage, avec une quinzaine de  mètres de retard sur les premières, ne l’a pas découragée une seconde. A l’issue d’une ligne droite exceptionnelle, elle termine sur le podium à la troisième place (2’04″03). Elle avoue pourtant être surprise de sa performance, quelques mois seulement après ses grands débuts sur la distance. Patrice Binelli, son coach depuis trois ans, n’a quant à lui pas été étonné, car chaque jour il a mesuré le potentiel et la progression de Corane. Rencontre avec une athlète au sourire communicatif. 

.— Stadion : Bonjour Corane, quel bilan tirez-vous de votre saison, marquée notamment par votre podium au France Elite ?

Je suis extrêmement satisfaite et surprise de ma saison, jamais je n’aurai pensé atteindre ce niveau. Cela me motive encore plus pour la saison à venir pour aller chercher des meilleurs chronos tant sur le 400m que sur le 800m. Les Elite ce fut pour moi et mon coach une grande surprise, enfin surtout pour moi. Tout au long de la course personne n’y a cru. C’était juste magique. J’ai dû regarder la vidéo une bonne vingtaine de fois pour commencer à réaliser.

Certes, je faisais de bonnes séances à l’entraînement, on savait que j’étais en forme mais pas au point de faire un podium. Si Rénelle (Lamote) et Justine (Fédronic) étaient intouchables pour les deux premières places, la 3ème place était accessible pour toutes les filles.  Je suis toujours sur mon petit nuage et j’ai du mal à réaliser. Mais je retourne sur terre avec la reprise de la saison hivernale qui arrive (rires).


 ʻʻ J’ai une plus grande marge de progression sur 800m ʼʼ


— En 2015, alors que vous continuez à progresser sur 400m (record à 53″82), vous faites le choix de monter sur 800 m. Pour quelles raisons ?

Mon année 2015 ne s’était pas vraiment passée comme prévu. Je m’étais essentiellement concentrée sur le 400m à l’entraînement, mais les résultats en compétition n’étaient pas ceux souhaités, et étaient même inférieurs à l’année précédente. De ce fait, sachant que je pouvais me débrouiller sur 800m, j’ai en fait quelques-uns et mes chronos descendaient à chaque course. Cette année 2015 j’ai eu la chance d’être retenue pour les championnats d’Europe juniors. C’est de là que part l’idée de m’aventurer sur le 800m. Après, le 400m et le 800m sont deux courses bien différentes. J’aimerai continuer à progresser sur les deux disciplines mais je sais que j’ai plus d’avenir sur le 800m, c’est une course où tout peut arriver. Rien n’est jamais écrit par avance. C’est ce qui s’est passé aux Elite alors que je n’étais absolument pas attendue.

Depuis quand avez-vous ce passage au demi-fond dans un coin de la tête ?

Cela fait plusieurs années qu’on me répète que je dois monter sur 800m. J’ai attendu puisque je voulais absolument continuer le 400m. Pendant les différents stages j’ai remarqué que je n’étais pas assez rapide dans le groupe sprint et pas assez demi-fondeuse dans le groupe demi-fond. Je sais, vu ma vitesse de base, que je vais être bloquée pour être forte au 400m quand je compare mon profil aux grandes championnes. Si je veux atteindre le meilleur niveau national voir international sur le long terme j’ai une plus grande marge de progression sur 800m. Je pense que j’ai un profil particulier qui fait que je suis entre les deux disciplines.

— On a senti beaucoup de complicité et de confiance mutuelle entre Patrice Binelli et vous pendant 3 ans. A-t-il joué un rôle clé dans cette décision qui aujourd’hui s’avère payante ?

Les trois dernières saisons je me suis entraînée avec Patrice Binelli. Au début cela a été un peu compliqué pour lui de cerner le type d’entraînement et d’aménagement qui correspondait à mon profil. Au cours de ces années il a observé et a fait tout ce qui était le mieux pour moi. Bien sûr que oui, il a joué un rôle essentiel dans cette décision. S’il n’avait pas été là je ne pense pas que je serai montée sur 800 m, je suis assez têtue (rires) mais il a su me motiver et me convaincre que j’avais une carte à jouer dans cette discipline. Je le remercie aujourd’hui.

Votre progression a été très rapide. A quel moment avez-vous vraiment perçu que vous pouviez obtenir des résultats ?

C’est vrai qu’en peu de temps j’ai beaucoup progressé sur le 800 m. Mais pour être honnête, j’ai du mal à avoir confiance en moi et à prendre conscience de mon potentiel. Tous les résultats de cette saison m’ont motivée et ont prouvé que je pouvais encore progresser. A chaque sortie, que ce soit sur 400m ou 800m, je progressais. C’était vraiment très motivant. Je ne savais pas jusqu’où j’allais progresser. J’ai encore du mal à réaliser les résultats obtenus dans l’année 2016. Si l’on m’avait dit au début de l’année que je ferai 53″82 au 400 m et 2’04″03 au 800 m jamais je n’y aurai cru. J’espère que je vais continuer sur cette lancée. 


.ʻʻ Je veux continuer de travailler le 400 m ʼʼ

— A quoi attribuez-vous votre impressionnante progression ?

Je dirai que ma progression est dûe à toutes les erreurs faites en 2015 et que l’on a su éviter avec mon coach en 2016. On a travaillé sur mon organisation générale avec les cours à la fac et l’écoute de mon corps (fatigue, douleurs…). C’est surtout une grande confiance entre mon coach et moi-même qui nous a permis de franchir une étape.

— Votre chrono sur 400 m est une aide inestimable pour briller sur 800 m…

C’est vrai que ma pointe de vitesse m’aide énormément lors du 800 m. Je pense d’une façon générale que pour être fort au 800 m il faut aussi être fort au 400 m. C’est aussi pour ça que je veux continuer de travailler le 400 m pour ne pas perdre cette vitesse qui peut être un atout important lors de certaines courses.

— A vos débuts, vous sentiez-vous sprinteuse ou demi-fondeuse ?

Quand j’étais petite je faisais, l’été comme l’hiver, du long et du sprint du 100 m au 1000 m. C’est sûr que je me sentais plutôt sprinteuse que demi-fondeuse. Je trouvais ennuyeux de courir longtemps, je prenais plus de plaisir à courir à fond sans me prendre la tête (rires).

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Corane Gazeau, tout sourire devant les journalistes après sa finale du 800m féminin.

— Aujourd’hui on voit de plus en plus de filles qui ont un bon niveau sur 400 m monter sur 800 m. Quels sont les conseils que vous pourriez donner à celles qui hésitent à franchir le pas vers le double tour de piste ?

Ce sont deux courses bien différentes. Selon moi si l’on veut passer du 400 m au 800 m ce peut être un souhait du coach mais il faut aussi que l’athlète soit prêt à franchir le pas. Ce n’est pas du tout la même course, ni les mêmes entraînements. Ce qui est bien au 800 m, c’est que tout le monde est au départ sur le même pied d’égalité, tout peut arriver. Le contact avec les filles et les sensations de courses sont aussi bien différentes.

— Pouvez-vous nous raconter votre quotidien de coureuse de 800 m.

Mon quotidien a énormément changé cette année puisque j’ai quitté mon coach et cela a été assez dur. J’ai également quitté la ville de Nantes à cause de mes études. Lorsque j’étais à Nantes je n’étais pas très impliquée dans mes études (Licence de STAPS), ce qui me laissait beaucoup de temps pour me reposer, récupérer et m’entraîner. Mais cette année je viens d’arriver à Bordeaux et j’ai intégré une École de Psychomotricité. La quantité de travail et de cours est beaucoup plus importante. Depuis la rentrée je commence à prendre mes repères. Mon quotidien se résume à aller en cours, à l’entraînement, à manger et à dormir. Je n’ai plus vraiment de temps libre.

L’école de Psychomotricité est très compréhensive dans mon cursus sportif et scolaire, ce qui me permet d’allier mes entraînements et mes cours. Je m’entraîne désormais avec Patricia Taillard et tout se passe extrêmement bien, même si j’appréhendais de changer de coach. Elle communique beaucoup avec mon ancien coach Patrice et se rend énormément disponible pour que tout se passe pour le mieux pour moi. On espère que mon année 2017 sera aussi brillante que 2016.


.ʻʻ Je n’ai pas envie de me prendre la tête avec les championnats d’Europe espoirs ʼʼ

— On vous sent très attachée à votre club de l’Entente des Mauges…

Ça fait maintenant neuf ans que je suis dans ce club c’est grâce à lui que j’ai découvert l’athlétisme. C’est lui qui m’a permis de progresser et d’évoluer. Il y a un côté convivial que j’apprécie. On a envie d’y rester car tous les athlètes se connaissent et sont soudés. Mon club a fait énormément d’efforts pour que je puisse évoluer dans les meilleures conditions possibles même si ça n’a pas toujours été simple, je leur dois beaucoup.

— Votre saison vous donne forcément des idées, à quelques mois des Championnats d’Europe espoirs…

Bien évidemment que mon objectif de la saison est de participer aux championnats d’Europe espoirs. Cependant, c’est encore une étape au-dessus mais je vais tout faire pour y arriver. Quand on progresse on aimerait ne jamais s’arrêter. On va voir comment va se passer ma saison hivernale, même s’il n’y a pas d’objectif précis. Je n’ai pas envie de me prendre la tête avec les championnats d’Europe espoirs. Je vais tout faire pour progresser, atteindre le niveau requis puis j’espère que le travail paiera.

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