Clément Ducos a signé une prestation de haute volée ce lundi matin en pulvérisant son record personnel et en s’emparant du troisième meilleur chrono tricolore sur 400 m haies lors des séries des Jeux olympiques de Paris 2024. Wilfried Happio a également rejoint le dernier carré en s’arrachant au finish. Ninon Chapelle et Marie-Julie Bonnin sont allées chercher leur qualif’ en finale de la perche aux côtés de 18 autres filles, du jamais vu lors d’une olympiade. Les repêchages ont par la suite souri à Shana Grebo sur 400 m haies mais pas à Gilles Biron lors de son 400 m plumé par les forfaits. Lolassonn Djouhan et Tom Reux ont échoué dans leur quête de finale du disque. Récapitulatif !
Quatrième jour au Stade de France et les spectateurs des Jeux olympiques de Paris se régalent toujours autant. Ils peuvent remercier les mobylettes du 400 m haies dont un tricolore inattendu a étonné tout le monde. Bien réveillé comme un lundi matin ordinaire, la bombe Clément Ducos a claqué le deuxième meilleur chrono séries lors de la deuxième course en 47″69. L’étudiant dans le Tennessee (Etats-Unis) est devenu le troisième meilleur performeur français de tous les temps derrière Stéphane Diagana (47″37) et Wilfried Happio (47″41 en 2022), et peut se vanter d’avoir signé le huitième temps le plus rapide de l’année. Pourtant retardé dans sa préparation finale par une lésion aux ischio-jambiers lors de la finale du Championnat NCAA en juin, le Girondin de 23 ans a mis un monde à son record personnel, lui collant 57 centièmes, et avait pris tous les risques derrière le roi et recordman de la discipline Karsten Warholm (45″94 en 2021 à Tokyo) qui avait maintenu une grosse intensité jusqu’au bout pour s’assurer de terminer en tête (47″57).
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« Personne ne me fait peur »
« Le public m’a donné une force indescriptible et il me tarde de courir demain, réagissait le pensionnaire du Bordeaux EC. J’étais tellement stressé qu’au final, je ne l’étais plus. Je me suis blessé début juin et c’était compliqué mais je me suis battu fort. Je me suis entraîné trois fois par jours pendant deux semaines à fond. Personne ne me fait peur, c’est peut-être arrogant, mais je suis obligé. Je pense que je peux aller en finale. Je mérite de faire ce chrono-là. Je l’avais déjà fait mais j’avais été disqualifié. Au couloir numéro 9, je devais courir plus vite et prendre un gros départ pour tout tenter sans regret. Dans l’intention, j’ai suivi mon schéma de course. Je me considère comme un potentiel médaillable. En demie, je vais essayer de me rapprocher du record de France (47”37 de Stéphane Diagana en 1995) et je vais tout tenter, vous allez voir. J’ai beaucoup de marge. »
Toutefois, les suiveurs de l’athlétisme français ont déjà eu un aperçu de son talent lors des Championnats de France Elite en salle 2022 à Miramas, alors qu’il était encore espoir. Quinzième sur la liste des engagés sur 400 m et dernier qualifié avec un record en 47″99, il avait surpris tous ses adversaires en s’imposant en 47″27. On a hâte de revoir le natif de Pessac fouler la piste violette en demi-finale où il sera accompagné par son compatriote sextuple champion de France Wilfried Happio (3e de la quatrième série en 48″42) qui a bataillé dans les derniers mètres pour aller composter son billet pour le dernier carré. Aucun problème pour les autres prétendants au sacre olympique que sont l’Américain Rai Benjamin (48″82 en première série) et le Brésilien Alison dos Santos (48″75 dans la troisième série) ont maîtrisé les débats.
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Ninon Chapelle et Marie-Julie Bonnin qualifiées dans un finale inédite
Scénario complètement fou, elles seront 20 en finale du saut à la perche féminin dont les deux Bleues Ninon Chapelle et Marie-Julie Bonnin. Les Tricolores font partie des neuf femmes en 12e position à 4,40 m et en ont pleuré de joie à l’annonce de cette information. La règle des concours prévoyait que l’on prenait en finale « tous les athlètes ayant réalisé la marque qualificative (en l’occurrence 4,70 m) ou au moins les 12 meilleures » C’est donc la première fois de l’histoire des Jeux que cela se produit. La plus expérimentée des Françaises, Ninon Chapelle, avait déjà vécu une finale à 17 aux Mondiaux de Doha en 2019 (12e). Dans ce groupe (très) élargi de perchistes, la Britannique Molly Caudery, meilleure performeuse mondiale de l’année (4,92 m à Toulouse) n’y sera pas, ayant préféré tenter par trois fois la barre à 4,55 m en vain.
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« C’était un grand pari de devenir maman et de tenter cet objectif olympique »
« On est deux Françaises en finale des Jeux olympiques à la maison, je ne réalise pas car j’ai fini mon concours en étant un peu dégoûtée de ne pas avoir fait plus, réagissait la recordwoman de France (4,75 m). J’étais pourtant hyper satisfaite de mon entrée dans le concours, je me suis servie de la force que le public m’a donnée pour me lâcher. Cela a été un peu compliqué pour moi cette saison, j’avais un peu de difficultés à avoir de la confiance et à me lâcher. Aujourd’hui, j’ai lâché prise, cette ferveur n’y était pas pour rien. Je manque un peu de repères pour passer 4,55 m. Je n’ai qu’une hâte, c’est de retourner sur le sautoir pour faire mieux. C’était incroyable d’apprendre quelques minutes plus tard que j’étais qualifiée en finale. On est vingt, c’est exceptionnel mais dans notre discipline, le plus dur est de passer les qualifications. Les coaches nous ont dit d’attendre quand même, en nous précisant que si tout le monde ratait, ça pouvait passer. Il restait sept ou huit filles à sauter. Je me suis dit qu’il restait des filles fortes, que j’avais donné mon maximum, profité de cette ambiance de fou et que c’était très joli pour partir en vacances. On a attendu avec nos proches qui étaient descendus en bas de la tribune et après le dernier saut raté, ils nous ont sauté dans les bras. On est en finale des JO. Je suis frustrée du résultat mais hyper fière de faire ça devant ma famille, mon fils qui a 3 ans. C’était un grand pari de devenir maman et de tenter cet objectif olympique. J’ai coché deux cases cet été en rentrant en finale aux Europe puis aux JO. Maintenant, il faut vraiment lâcher prise, se laisser porter par cette ambiance pour reprendre de la hauteur. »
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« C’est un soulagement pour nous »
« C’est improbable (d’être 20 en finale), ça n’a jamais été fait, signalait Marie-Julie Bonnin (22 ans). Avec deux Françaises, c’est encore plus beau. Je suis déçu de ma performance à 4,40 m mais qu’est-ce que j’ai profité et je vais lâcher les chevaux en finale. J’étais un peu crispée ce matin parce que j’avais envie de faire les choses bien même si techniquement, c’était à côté de la plaque ce matin. Maintenant je sais comment l’appréhender en me libérant. C’est un soulagement pour nous. Quand j’arrive sur le plateau, je me dis : “oh purée MJ, t’es passée à côté de ton rêve olympique”. C’était horrible. Mon coach m’a ensuite dit : « ce n’est pas fini » et il y a une petite lueur d’espoir en moi qui commence à briller. Je suis devant ma famille, j’avais les jambes en coton, je ne tenais limite plus debout en raison du stress. Je me disais qu’à 2 ou 3 personnes, ça peut passer en finale. On a clairement bondi de joie avec Ninon (Chapelle) quand les filles ne sont pas passées. En finale, on a plus qu’à lâcher les chevaux et à prendre les perches ! Vivre cette qualification avec mes proches, tout près de moi en tribunes, c’était magnifique ». Maman Ninon et sa compatriote « MJ » se donnent maintenant rendez-vous pour la grande finale ce mercredi 7 août à partir de 19h. Avec une médaille à la clé ?
Lolassonn Djouhan et Tom Reux coincent au disque
Ça ne passe malheureusement pas en finale pour Lolassonn Djouhan et Tom Reux. Lors des qualifications du lancer de disque, le premier Tricolore engagé a terminé onzième avec un meilleur premier jet enregistré à 61,93 m alors qu’il fallait finir dans les 12 premiers pour espérer passer. « J’avais bien commencé, après au disque, il faut que tout marche, les bras, les jambes, j’ai essayé d’être dans le timing habituel. Avec l’envie que j’ai mise, j’ai un peu tiré sur le disque et c’est pour ça qu’il ne plane pas assez. L’enchaînement a été long pour revenir jusqu’ici. Je ne dis pas que je prends une claque, mais ça me donne envie de faire mieux pour les années à suivre. Le public a été top, on a des supers Jeux, on peut être fiers, nous Français. J’aurais aimé faire plus pour ma famille, mes amis, mais ce n’est que partie remise ». Son compatriote est resté planté à la 14e place du groupe B (29e des qualifications) avec 58,22 m.
Shana Grebo repêchée sur 400 m haies
Victorieuse de sa course de repêchage en 54″91, le deuxième meilleur temps de sa carrière, Shana Grebo a piétiné sur la fin de son repêchage du 400 m haies mais avait une avance suffisante pour rentrer en demi-finale (mardi dès 20h07). « J’étais tellement focus sur le fait de gagner la course que j’en ai oublié plein de choses techniquement, avouait la Rennaise. Je ne voulais laisser personne devant moi, c’était hors de question. Je me suis un peu énervée avant la course car à l’échauffement, j’avais tendance à m’endormir un peu. J’ai demandé un petit coup de pression de la part des coachs. Il y a plein de choses à améliorer, le chrono on s’en fout tant qu’on passe au tour d’après. À la huitième haie, j’ai regardé l’écran et me suis rendue compte qu’il y avait du monde pas loin de moi et qui a la dalle comme moi. Toute la course, j’avais cette lucidité qui me permettait d’entendre le public autour de moi. C’est beau, la foule m’a boostée, je me suis accrochée aux cris du public. Je me suis dit : je porte le maillot de la France, je dois être première. »
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La drôle de course de Gilles Biron
Disputant une course étonnante avec seulement trois partants (quatre athlètes étaient forfait, préférant se réserver pour le relais 4×400 m), Gilles Biron a souffert en fin de parcours, terminant deuxième de son 400 m en 45″87, insuffisant pour rejoindre le tour suivant. « En chambre d’appel, quand je suis arrivé, j’ai vu qu’il y avait trois barrés, qui avaient déjà prévenus, j’imagine que c’était pour le relais, ils se sont préservés, expliquait le vice-champion de France du tour de piste cet été. Les autres, je ne sais pas. Quand j’ai vu ça je me suis dit : étrange, ils vont peut-être arriver après, ils sont en retard. Sur la fin, j’aurais peut-être eu plus de repères pour pouvoir poser ma foulée, aller à la concurrence, là c’est plus sur la fin que je vois l’Argentin remonter. Je me dis que courir seul en 45 »87 ce n’est pas dégueu. Être trois aux JO, non, ça ne m’était jamais arrivé. Après, c’est la première fois qu’il y a ce format de repêchages. À part quand j’étais en Martinique et qu’il y avait des petits championnats. »
Shaunae Miller-Uibo jette l’éponge
Touchée musculairement, la Bahaméenne Shaunae Miller-Uibo, double championne olympique en 2016 et 2021, a coupé son effort dans le dernier virage lors des séries du 400 m féminin et ne défendra pas ses titres. Pour lui succéder, un nom ressort évidemment : Marileidy Paulino. La Dominicaine, championne du monde à Budapest, a été créditée du meilleur chrono des séries (49”42) lors de la cinquième course.
Tous les résultats de l’athlétisme aux JO de Paris 2024
Texte : Dorian Vuillet
Crédits photos : Solène Decosta & Gaëlle Mobuchon / STADION