Noah Lyles , le nouveau roi du 100 m, a frappé un grand coup lors des Jeux olympiques de Paris en devenant l’homme le plus rapide du monde au Stade de France ce dimanche soir. Dans le reste des résultats Bleus, Rénelle Lamote a enfin obtenu son billet pour une finale du 800 m tandis que Nawal Meniker (hauteur) et Yann Chaussinand (marteau) n’ont pas pu se rapprocher du podium de leurs disciplines respectives.
Il y a des soirées à ne pas manquer. Celle de ce dimanche soir au Stade de France en tête. La raison ? Les hommes les plus rapides du monde bataillaient pour savoir qui des neufs finalistes serait le numéro 1. Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse, c’est ce qu’a dû se dire Noah Lyles sous les coups de 22h sur le tartan dyonisien. Pas de carte Yu Gi-oh pour la superstar du sprint planétaire mais un premier titre olympique, inespéré à mi-course, obtenu lors d’une finale stressante jusqu’au bout et décidée à la photo finish. Le premier américain à se hisser dans les sommets de l’olympe sur 100 m depuis 20 ans et le sacre polémique de Justin Gatlin en 2004 a battu son record personnel pour s’imposer d’un rien en 9″79 (+1,0 m/s) devant le bodybuilder Kishane Thompson, cinq millièmes trop tard.
Le Jamaïcain avait été monstrueux en demies après avoir été l’auteur du meilleur chrono en 9”80. L’Américain Fred Kerley complète le podium tandis que Italien Marcell Jacobs, champion olympique en titre, a pris la cinquième place en claquant le meilleur chrono de sa saison (9 »85) avant de se faire mal sur la fin de cette course de feu, la plus serrée de l’Histoire sans aucun doute. Preuve, le Jamaïcain Oblique Seville, impressionnant plus tôt dans la soirée, a terminé bon dernier… en 9″91 (!) Le contre-temps musical ayant retardé la finale de quelques minutes et contraignant les athlètes à rester debout n’a finalement pas tellement dérangé ces performeurs de l’extrême.
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« Je suis l’homme le plus rapide du monde »
Mal en point dès les séries, Noah Lyles, champion du monde en titre à Budapest de la ligne droite, a parfaitement réagi et démarré son invraisemblable voyage vers les trois ou quatre titres olympiques sur une même édition (100 m, 200 m, 4×100 m et peut-être 4×400 m). « Comment j’ai fait pour revenir dans la course ? Pour être honnête, j’ai juste cru en moi-même, confiait le Floridien après son retour supersonique. J’ai déjà fait pire départ mais j’ai déjà été plus rapide aux soixante mètres, j’ai eu un temps de réaction lent au départ. Mais c’est fou ! Ça prouve qu’avoir le meilleur temps de réaction ne permet pas forcément de gagner une course. J’ai su il y a longtemps que ça ne serait pas 2021 que je gagnerais le 100 m olympique. Je l’ai su à chaque étape du chemin. Je continue constamment à avancer, avancer, avancer. Et je savais que lorsque le moment de la finale viendrait, je devrais alors me ressaisir. Je l’ai fait. À la fin, j’ai cru que Thompson avait gagné. Je lui ai dit : « mec, je crois que tu l’as. » Et puis mon nom est apparu et je me suis dit, » mon Dieu, je suis incroyable ». Je n’étais pas prêt à voir mon nom sur ce tableau, c’est la première fois de ma vie que je me dis ça ». Le poids de l’Amérique sur les épaules mais surtout celui de la gloire éternelle. « Je suis l’homme le plus rapide du monde, car ce qualificatif revient au champion du monde du 100 m, ce que je suis, et au champion olympique, ce que je vais bientôt être », assurait Noah Lyles cette semaine. Sa légende s’écrit à Saint-Denis. Et le futur Bolt, c’est sûrement lui.
Rénelle Lamote tient sa finale olympique
Dans le rayon des bonnes nouvelles, Rénelle Lamote a brisé le plafond de verre en décrochant sa première finale intercontinentale depuis les Mondiaux de Pékin 2015. Cinquième de sa demi-finale, la triple vice-championne d’Europe s’en est sortie avec un chrono de 1’57″78, dernier qualificatif. « Je suis heureuse et triste qu’il n’y ait pas Anaïs (Bourgoin) avec moi, témoignait une Columérienne des plus opiniâtre. J’aurai trop aimé qu’on vive ça ensemble et j’ai regardé sa course en espérant qu’elle passe aussi. On s’était promis d’aller jusqu’au bout ensemble… Je vais réaliser quand je vais voir mon coach. J’étais tellement à fond et concentré. La pression est énorme, il faut que je redescende. Tu te dis « wahou, demain tu fais une finale olympiques », c’est pas mal. Il y avait ma psy à l’échauffement parce que je voulais que tout soit parfait et je me suis concentrée sur l’instant présent. Je suis fier de moi parce que je pense qu’il y a quelques années, j’aurai paniqué. C’était dur à la fin mais j’ai eu la sensation d’avoir couru comme je voulais. Je me suis battu jusqu’au bout sur les conseils d’Anaïs qui m’a dit « même si tu termines 3e ou 4e, tu peux passer au temps donc tu lâches rien ». C’est marrant parce qu’elle a moins d’expérience mais elle m’inspire beaucoup. Ça fait 10 ans que je cours après et j’étais stressé à l’entraînement, avec la sensation que la course était ma bête noire. J’ai l’impression d’avoir brisé la malédiction. J’ai croisé Pierre-Ambroise (Bosse) qui m’a dit : “tu sais, j’ai fait quatrième en demies quand j’ai gagné à Londres en 2017”, donc je vais penser à ça avant de dormir. »
Libérée de cette qualification, celle qui s’entraîne à Montpellier a couru dans les bras de sa copine Anaïs Bourgoin qui ne l’accompagnera malheureusement pas dans cette dernière étape, terminant 6e (1’59”62) de sa course. La petite surprise nous est venue du côté britannique où Jemma Reekie a pris la porte dans ce dernier carré intransigeant.
Yann Chaussinand, 24 ans après son papa
24 ans après la onzième place de son papa David aux JO de Sydney, Yann Chaussinand a pris la huitième place de cette finale du lancer du marteau. Son premier jet à 78,99 m n’avait finalement pas été validé après visionnage vidéo. Finalement, la médaille du lanceur le plus marteau est attribuée à Ethan Katzberg, nouveau champion olympique de la discipline. Le premier Canadien de l’histoire à se parer d’or au marteau avait assommé la finale dès le début avec un jet stratosphérique enregistré à 84,12 m. Le Hongrois Bence Halasz et son lancer de 79,97 m ramènent l’argent aux Magyars tandis que la bonne soirée de l’Ukraine s’était poursuivie avec une troisième breloque rapportée par Mykhaylo Kokhan (79,39 m).
« Je suis dégoûté. Mon père me dit de ne surtout pas dénigrer une place de finaliste aux Jeux, mais on sait tous les deux ce que je venais chercher. Je me sentais vraiment capable de prendre une médaille cette année. Le concours a été compliqué, avec ce premier essai annulé. Le plus rageant, c’est qu’il est annulé assez tard, juste avant mon deuxième. Il est visiblement mordu devant, les coaches ont regardé à la vidéo, ça s’est joué à un millimètre. Si c’est mordu, c’est mordu, c’est comme ça. Derrière, le deuxième est raté, et je dois me débrouiller tant bien que mal pour entrer dans les huit. J’y ai laissé beaucoup d’énergie, et j’ai fait ce que j’ai pu par la suite. C’est peut-être une mauvaise gestion de ma part, mais je vais retourner m’entraîner deux fois plus dur. J’ai passé un gros cap cette année, j’ai du potentiel pour aller plus loin, je me sens capable de battre le record de France, et même plus. Ma carrière est encore longue et il me reste encore des grosses compètes internationales. Il ne faut pas griller les étapes, être performant en grands championnats, ça se construit. Avant 2024, j’étais loin des grandes finales, il me faut encore plus d’expérience pour aller les mecs encore devant moi, qui sont tous des médaillés mondiaux ou olympiques. »
Onzième place pour Nawal Meniker
Loin du compte, Nawal Meniker s’est arrêtée après trois échecs à 1,91 m, deuxième barre d’un concours démarré sur les chapeaux de roues dès 1,86 m (réussi à son dernier essai). La repressente du CA Montreuil 93 peut se réjouir d’avoir accéder à cette finale de haut niveau dont elle ferme quand même la marche (11e). « Je ressens beaucoup de tristesse mais il faut rebondir, soufflait la championne de France Elite 2024. J’apprends et cette compétition me fera grandir par la suite. Je suis quand même très fière d’être arrivée en finale ». La médaille d’or est logiquement revenue à Yaroslava Mahuchikh, la recordwoman du monde du saut en hauteur pour qui le titre olympique manquait au palmarès. L’Ukrainienne avait tenté un dernier essai à 2,04 m, en vain. L’Australienne Nicola Olyslagers a buté trois fois à 2,02 m mais se contentera d’une breloque d’argent tandis qu’une autre Ukrainienne Iryna Geraschenko et une autre Australienne Eleanor Patterson se partagent le bronze avec 1,95 m.
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Azedine Habz s’arrête ici
Sur la piste violette pour un troisième 1500 m en trois jours, Azeddine Habz a sans doute payé l’enchaînement de trop. C’est terminé pour le demi-fondeur de 31 ans qui ne s’est pas qualifié pour la finale, concluant la deuxième demi-finale à la 12e et dernière place en 3’34″35. « Je suis très déçu, je n’étais pas venu là pour faire une demi-finale. L’enchaînement de trois courses en trois jours, ça m’a pénalisé. Les autres étaient frais, pas moi. À 300 m de l’arrivée, j’étais limité. Mais je vous donne rendez-vous bientôt ». Les golgoths de la spécialité avaient répondu présents car Jakob Ingebrigsten (3’32″38) et Josh Kerr (3’32″46) ont maîtrisé la première demi-finale. Enfin, le seul tricolore convié aux séries du 400 m, Gilles Biron, ira aux repêchages après avoir terminé 7e de sa course en 46″19.
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Tous les résultats de l’athlétisme aux JO de Paris 2024
Texte : Dorian Vuillet
Crédits photos : Solène Decosta & Gaëlle Mobuchon / STADION