Retraite de Christophe Lemaitre, Teddy Tamgho, Benjamin Compaoré, Eloyse Lesueur-Aymonin… L’athlétisme français tourne une page historique

02 juillet 2024 à 21:15

Christophe Lemaitre, Teddy Tamgho, Benjamin Compaoré, Eloyse Lesueur-Aymonin… Le dernier week-end qualificatif pour les Jeux olympiques de Paris 2024 où figuraient les Championnats de France Elite à Angers a été marqué par la fin de carrière de nombreux athlètes ayant représenté le drapeau tricolore à l’international.

Ce n’est qu’un au revoir. Celui de quelques-uns au cœur d’une « génération dorée » qui aura marqué l’histoire de l’athlétisme français. Dorée par les résultats mais aussi grâce à une résilience inébranlable. C’est ainsi que Christophe Lemaitre, Teddy Tamgho, Benjamin Compaoré et Eloyse Lesueur-Aymonin, pour les plus connus, ont tiré leur révérence le week-end dernier lors des Championnats de France Elite au Stade du Lac de Maine. La fin d’une carrière mais pas d’une vie pour des athlètes ayant consacré chaque instant d’entraînement ou de compétition à une réussite plus ou moins retentissante. Un crève-cœur pour certains, une délivrance pour d’autres.

 

Christophe Lemaitre, un adieu jusqu’aux larmes

Il y en a un qui n’avait pas attendu de fouler la piste angevine pour raccrocher les pointes. Désormais vieux sage du sprint tricolore, Christophe Lemaitre (34 ans) a choisi d’arrêter sa carrière un jour avant le début des Championnats de France Elite. Une décision mûrement réfléchie par le médaillé de bronze aux JO de Rio en 2016 sur 200 m depuis quelques semaines car, début mai, un nouveau pépin physique mettait fin à ses derniers minces espoirs de se qualifier pour les Jeux à la maison. « En début de saison, je me suis dit que tout allait dépendre de cette année, de comment j’allais me sentir, de comment j’allais évoluer, annonçait-il ce jeudi 27 juin 2024, date fatidique de sa retraite sportive. J’ai vu que j’étais encore capable de faire des entraînements de bonne qualité, mais les résultats ne suivaient pas. J’ai eu cette blessure à un mollet, ça a annihilé les derniers espoirs que j’avais. Le corps n’arrivait pas à suivre, même en faisant les choses bien ».

 

 

Ayant fait le déplacement dans la capitale de l’Anjou, des adieux dignes de ce nom semblaient inévitables. Larme à l’œil au moment de revoir les moments marquants du triple champion d’Europe individuel, les standing ovation en pleuvaient. La dédicace de la légende Usain Bolt en valait la peine. C’est la fin d’une époque, majestueuse, qui plus est, pour le premier sprinter blanc sous les 10 secondes sur 100 m qui lui a valu sa renommée au-delà de l’Hexagone. On pourrait le revoir de temps à autre sur une piste mais ce serait simplement pour son plaisir. Le Haut-Savoyard ne se voit pas encore entraîner et se concentrera plutôt sur la préparation d’un diplôme de coach sportif. Libre comme l’air. Il restera comme l’un des champions français majeurs du XXIe siècle. 

 

 

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Teddy Tamgho aura tout essayé…

Connu comme le loup blanc, Teddy Tamgho l’était également. De retour à la compétition, il l’était aussi. Mais cette fois-ci, c’est fini. Fini pour le champion du monde de triple saut en 2013 à Moscou qui avait tenté, à la surprise générale, un come-back cet hiver, quatre ans après avoir pris une première retraite. Seule la qualification olympique en tête. Mais le triple sauteur de 33 ans a perdu son pari. Samedi dernier, le pensionnaire du Stade Bordelais Athlétisme disputait son septième concours depuis son retour en février dernier (16,68 m le 23 juin à Guadalajara), et a terminé cinquième de la finale, avec une marque à 16,47 m (+0,7 m/s), bien loin des 17,22 m requis pour voir Paris.

Immédiatement après, le champion du monde 2010 (Doha) et d’Europe 2011 (Paris) en indoor en salle a annoncé, sûrement pour de bon, qu’il stoppait cette aventure. « L’athlé, c’est terminé. Je passe à autre chose, c’est fini. Je vais m’entraîner, c’est tout. Là, je vais au McDo. J’étais conscient du risque que je prenais, j’avais pris en considération qu’il y avait peu de chances que ça réussisse, même si des signes montraient que c’était encore possible », avouait-il avec beaucoup d’honnêteté. Teddy Tamgho laisse derrière lui un palmarès exceptionnel et une performance XXL mesuré à 18,04 m (2013 à Moscou). Mais Tamgho restera dans son monde, continuant bien sûr d’entraîner Hugues Fabrice Zango, le Burkinabé champion du monde en titre et médaillé de bronze à Tokyo en 2021. D’autres projets sont en cours, lui qui passe actuellement un diplôme en développement durable et changement climatique, et qui va enchaîner avec un Master en finance de marché. Il ne s’interdit pas non plus d’avoir un rôle important un jour à la Fédération Française d’Athlétisme. Une après-carrière bien remplie.

 

Benjamin Compaoré, clap de fin

À quelques minutes près, un autre grand monsieur du triple saut bleu-blanc-rouge venait également de réaliser son dernier bond dans le sable d’Angers. Benjamin Compaoré, champion d’Europe 2014 à Zurich avec un record à 17,48 m la même année, s’arrêtera là, à 36 ans, après presque 20 ans de haut niveau. L’ancien protégé de Jean-Hervé Stiévenart, décédé deux ans auparavant, fut rejoint sur la piste angevine par son épouse Ana Peleteiro, tout droit venu d’Espagne, un septième sacre national de triple saut en poche. Le médaillé de bronze mondial en salle (2016) n’a pas manqué de saluer les juges, comme il l’a toujours fait, sous les applaudissements du public. Parachevant une carrière remplie de bonheur avec un titre mondial juniors en 2006, un sacre européen chez les grands donc et une sixième place aux JO de Londres en 2012 mais aussi de tristesse liée aux nombreuses blessures qui le fera manquer des rendez-vous importants. Sa vie commencée en Alsace continuera maintenant à Guadalajara, en Espagne, aux côtés de sa compagne et leur fille Lua, née en décembre 2022. Sans oublier les précieux conseils pour Enzo Hodebar, en argent lors de ces championnats nationaux.

 

 

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Eloyse Lesueur-Aymonin, que d’émotions !

Et l’image marquante de ces Championnats de France Elite revient, à raison, aux larmes d’Eloyse Lesueur-Aymonin lors de sa sortie du bac à sable après un dernier essai manqué mais tout aussi anecdotique. La tribune s’est levée pour acclamer la médaillée d’argent du jour et nouvelle retraitée dont le record culmine à 6,92 m. Championne du monde en salle en 2014, championne d’Europe 2012 et 2014 ainsi qu’octuple championne de France de la discipline, la sociétaire de l’Athlé Provence Clubs fut la fer de lance de la longueur française depuis 2008 et son premier record de France en salle de 6,84 m qu’elle battra par trois fois ensuite. Un seul mot : respect.

 

 

Et les autres ? Parmi ceux qui vont manquer aux fans : Yoann Rapinier. Profitant du déclassement pour dopage du Russe Lyukman Adams, initialement deuxième de l’épreuve, le Francilien obtient une médaille de bronze aux Championnats d’Europe 2014 de Zurich, huit ans après le concours de triple saut. Il avait annoncé mettre fin à sa carrière sur les réseaux sociaux le 15 juin. « L’athlétisme m’a beaucoup apporté… des rencontres, des ami(e)s, des grands et des petits frères, des adversaires, des trahisons, des ennemis, de la tristesse, de la joie, de la fierté, des déceptions et tellement de rires… La passion a toujours été présente depuis que j’ai découvert ce sport grâce à toi Claude Michot. Mais tout a une fin… Je vous annonce que ma carrière s’arrêtera à la fin de cette saison, ma 20eme année d’athlétisme sera la dernière. »

21 ans de vitesse et voilà Laurine Xailly se retirer de la piste. La Nancéienne, ancienne membre de l’équipe de France du 4×400 m, a terminé sa carrière avec une place dans le top 24 tricolore sur 400 m (8e de sa série en 55″91). La Jurassienne Margaux Nicollin, elle, a quitté le monde du javelot sur une cinquième place au concours à Angers. Gêné par des blessures musculaires tout au long de la saison, Sébastien Micheau, sacré aux « Elite » en 2020 et finaliste aux Championnats d’Europe de Munich en 2022, a conclu une carrière de sauteur en hauteur de la plus belle des manières avec une ultime breloque de bronze (2,13 m). La suite : se consacrer à une vie de sapeur-pompier. Dernier son de cloche également pour Jean-Pierre Bertrand (Athletic Clubs 92) qui a terminé au pied du podium de la longueur (à 1 centimètre du bronze) et ne s’envolera vraisemblablement plus dans le bac à sable. Une nouvelle ère pour l’athlétisme français s’ouvrira donc à partir de 2025. Sans eux.

 

L’heure n’a pas encore sonné pour Floria Gueï, Pascal Martinot-Lagarde et Renaud Lavillenie

Mais les glorieux anciens Floria Gueï et Pascal Martinot-Lagarde, eux, font toujours de la résistance comme ils le peuvent. La première citée, qui devait initialement raccrocher les pointes à l’issue de cette saison 2024, se laisse encore le temps de la réflexion. Le deuxième va progressivement mettre l’athlétisme au second plan à partir de l’hiver prochain avant de tirer définitivement sa révérence. « Je pense que je vais opérer une transition d’entraînement. Aujourd’hui, je m’entraîne cinq, six fois par semaine et je pense que je vais basculer de Pascal haut niveau à Pascal qui se fait plaisir, au moins pour un hiver, une tournée, un au revoir bien comme il faut. Je vais penser en tant que Pascal l’être humain plutôt que Pascal le cheval de course avec les grosses cuisses. J’ai trop souffert ces deux dernières années pour continuer à fond. »

Enfin, le grand Renaud Lavillenie a échoué dans sa quête olympique au saut à la perche mais espère vite rebondir et prendre du plaisir dans les airs. Et la relève est là, Sasha Zhoya, Hilary Kpatcha, Louise Maraval et Thibaut Collet en pole. La fin d’une ère mais le début d’une nouvelle période dorée pour l’athlétisme français.

 

 

Merci pour tout messieurs, mesdames, et bonne retraite. Les stades devront désormais se faire beaux sans vous.

Texte : Dorian Vuillet
Crédit photo : Solène Decosta / STADION

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