— Wilhem, comment vous sentez-vous à l’approche des Championnats d’Europe en salle de Torun ?
En forme. J’ai bien récupéré après les Championnats de France Elite en salle à Miramas, j’ai pris trois jours de repos pour permettre au corps de digérer cet enchaînement de compétitions. L’objectif est d’arriver à Torun en pleine possession de mes moyens, sans problème physique.
— Vous allez arriver à Torun en pleine confiance après vos dernières sorties. Pouviez-vous rêver mieux ?
Un athlète aspire toujours à faire du mieux possible, maintenant on verra le jour J. Je suis satisfait pour l’instant de la saison hivernale qui est l’une des meilleures de ma carrière. Je sais qu’avec la préparation de Ketty je serais en forme. On est maintenant plus dans l’adaptation que dans la projection.
— Vous attendiez-vous à être aussi proche du record de France de Dimitri Bascou (7″41) sur les Meetings ? Et qu’est-ce qui vous manque pour y parvenir ?
J’avoue que ce n’était pas mon objectif premier de m’approcher de ce record de France mais j’ai gagné en relâchement et en fluidité, et c’est ce qui m’a permis de réaliser des chronos qui s’y rapprochent. Plus je m’y rapproche, plus j’y songe beaucoup. À force d’entendre les gens autour de moi en parler, ça rentre dans ma tête. Maintenant, je ne reste pas focalisé dessus, je suis plus concentré à effectuer une course propre techniquement qui amènera automatiquement un chrono.
— Abordez-vous Torun dans la peau d’une favori ?
C’est sûr que je ne peux m’empêcher d’arriver avec la pancarte de favori. Chronométriquement, j’ai le meilleur temps des engagés. C’est intéressant d’être dans cette position pour engranger de l’expérience. Néanmoins, je reste tranquille, posé et pas de stress.
— La salle et le 60 m haies est une discipline si particulière, ça vous plaît ?
Entre le 60 m haies et le 110 m haies, je préfère le 110 m haies qui est plus adapté à mes qualités de vitesse et je m’y sens le plus à l’aise. Le 110 m haies reste l’épreuve olympique et la plus reconnue de ma discipline.
— Vous êtes considéré, depuis votre titre et votre record mondial chez les juniors en 2014, comme le grand espoir des haies françaises. C’est une motivation ou une pression ?
C’est une motivation, mais il est vrai que ce titre et ce record mondial en 2014, même si j’en suis très fier, est un résultat qui me colle à la peau jusqu’à maintenant. J’espère que je ne serais plus attaché à cette étiquette de grand espoir en remportant bientôt des titres internationaux et pourquoi pas des records chez les seniors.
— Quelles sont vos conditions d’entraînement et quel est votre parcours scolaire ?
Mes conditions d’entraînement sont bonnes en Guadeloupe avec la nouvelle piste connectée Marie-José Pérec du CREPS qui a été livrée en décembre dernier. C’est un bel outil de travail qu’on attendait depuis un moment. Des capteurs ont été placés sous et dans le revêtement afin d’analyser et de décortiquer les foulées des athlètes. Concernant mon parcours scolaire, si je me consacre aujourd’hui à 100% à l’athlétisme, je suis titulaire d’une licence STAPS. À partir de 2024, je vais commencer à reprendre les études pour préparer ma reconversion en vue de devenir kiné.
— Quelle est votre relation avec votre coach Ketty Cham, aussi entraîneur du pôle Athlétisme en Guadeloupe ?
On a plusieurs relations, entraîneur-entraîné, mère-fils et confident. Ketty m’a beaucoup apporté depuis nos débuts au-delà de toute sa compétence de coach. On a créé une vraie complicité et une vraie alchimie.
— Alors que vous étiez chez Nike depuis vos débuts d’athlète de haut niveau, vous êtes passé chez Puma en janvier. Pour quelles raisons ?
Mon contrat avec Nike se terminait en 2020 et la marque n’a pas souhaité le renouveler. Puma m’a fait une proposition et avoir un équipementier lors d’une saison olympique est nécessaire pour bien préparer cette échéance. Au début, j’avais des aprioris sur les équipements mais je trouve qu’il y a eu un gros effort sur la qualité des produits que je trouve vraiment bien. Ils sont actuellement en train de revenir en force sur le marché de l’athlétisme en France. Dès que j’ai signé avec eux, je me suis senti considéré avec un véritable accompagnement. Il y a une reconnaissance du sportif que tu es.
— La discipline s’est emballée mercredi avec le record du monde du 60 m haies de Grant Holloway. Quel regard portez-vous sur ces performances ?
Dès sa première sortie à Fayetteville (24 janvier) en 7″35, je me suis dit que ce serait son objectif de l’hiver et que le record tombera dans quelques semaines. Quand tu vois les enchaînements de ces courses et ces chronos réguliers en dessous des 7″40. Au vu de la course de mercredi, c’était sûr et il était venu pour ça. Il a tué le « game » mais il est encore battable. On va y aller étape par étape, ce n’est pas impossible. Tous les records sont fait pour être battus.
Tout va bien, Wilhem est en forme. On est sur la même dynamique qu’avant les Championnats de France Elite en salle à Miramas. Après trois années compliquées, arriver en grand championnat avec le dossard numéro 1, ça fait longtemps que ce n’était pas arrivé. On travaille pour que dans la tête ça reste quelque chose de positif et non une pression. On a bossé pour qu’il aille vite et qu’il se rapproche ou qu’il batte le record de France. C’est peut-être facile de le dire aujourd’hui mais il ne faut pas que Wilhem en fasse une obsession. Si ce n’est pas cette année, ce sera peut-être l’année prochaine. On travaille ensemble à 100% depuis 2013/2014, on se connaît par cœur tous les deux et on a construit une relation de confiance.
Propos recueillis par Solène Decosta
Crédits photos : Antoine Decottignies
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