Roi de Bretagne des labours cet hiver, Simon Bédard aborde les Championnats de France de cross-country à Carhaix dimanche avec plaisir et ambition. Le sociétaire de l’Athlé Pays de Vannes veut croire en ses chances sur cette course et ne cache pas ses envies d’un top 10. Pour Stadion, l’étudiant à l’université Butler d’Indianapolis passe son actualité en revue.
— Simon, comment vous sentez-vous à quatre jours des Championnats de France à Carhaix ?
Je vais très bien. Les Championnats de France de cross n’étaient pas initialement un objectif pour moi. L’année dernière, je me suis blessé huit mois, j’ai eu deux fractures de fatigue. J’ai seulement repris les footings début octobre. Je n’avais pas vraiment d’objectif cet hiver. L’objectif était de me préparer pour la saison estivale. J’ai décidé d’aller en stage au Portugal début janvier. Là-bas, j’ai rencontré des athlètes français, ils faisaient un peu d’indoor. Du coup, j’ai fait un peu de spécifique 3000 m. Cela s’est orienté comme ça donc je me suis plutôt préparé sur la saison indoor. Entre-temps, j’ai pu faire les championnats du Morbihan et de Bretagne de cross. A chaque fois, je devais retourner aux Etats-Unis. Mon coach voulait que je rentre au plus vite là-bas mais je négociais pour rester plus longtemps : le stage au Portugal, les championnats de France Elites en salle à Clermont-Ferrand et maintenant, Carhaix. Au départ, ce n’était pas une préparation pour les cross mais les quatre, cinq dernières semaines se sont plutôt bien passées.
— Racontez-nous votre incroyable week-end du 3 au 5 février où vous avez enchaîné le 3000 m du Meeting de Miramas le vendredi et les Régionaux de cross le dimanche à Saint-Marc-le-Blanc….
Je n’avais pas vraiment prévu ça. J’ai décidé de courir les Régionaux de cross après la course de Miramas. J’avais couru le championnat du Morbihan juste en rentrant du stage au Portugal. Je basais vraiment ma saison sur l’indoor. J’avais décidé de faire ma qualification à Lyon la semaine avant, donc de courir autour de 7’55. Ça s’est très très mal passé, j’ai couru 8’16. Je n’étais pas bien. Je pense que j’étais encore fatigué de mon stage. L’objectif était vraiment de me qualifier pour les Elite et c’est pour ça que j’ai été à Miramas pour faire moins de 8 minutes (7’56″53). Tout le monde me demandait de courir le Bretagne de cross mais je n’avais pas envie. Je me suis dit dans ma tête que si je faisais une bonne course sur 3000 m, j’essaierais d’enchaîner et d’aller aux championnats de Bretagne. Je suis donc revenu. Avec le voyage et la fatigue, c’était un peu juste. Au final, cela s’est super bien passé. Je gagne les Bretagne donc j’étais super content.
— On imagine que ce titre de champion de Bretagne de cross-country est une belle ligne sur votre palmarès…
Oui et non. Oui car c’est sûr qu’en Bretagne, cela fait beaucoup parler. C’est un titre dont tout le monde parle. Je sais que je n’avais pas prévu de le faire. J’ai reçu beaucoup de messages de personnes qui voulaient me voir aller chercher ce titre ou du moins, batailler avec les autres gars, et notamment, Maël Sicot et Benoît Fanouillère. C’était les deux autres favoris. Forcément, cela représente quelque chose. C’est assez impressionnant l’engouement qu’il y a autour du championnat de Bretagne. D’ailleurs, on l’appelle le « championnat du monde de Bretagne », tellement il est prisé. Après, au niveau des autres français, il n’y rien d’exceptionnel. C’est juste un titre régional de cross. Par contre, en Bretagne, il y en a qui disent qu’il y a un avant et un après. Je suis vraiment content car je voulais le gagner. Il y avait une ambiance de folie.
— Un Championnat de France de cross-country réussi à Carhaix, qu’est-ce que ça serait pour vous ?
J’ai entendu dire qu’il n’y avait pas eu de Bretons dans le top 10 depuis plus de 15 ans. Ça serait bien de faire un top 10. J’y vais sans savoir car le seul cross Elite que j’ai couru c’était il y a six ans en 2017 à Saint Galmier, avant de partir aux Etats-Unis, et je n’avais pas le niveau que j’ai aujourd’hui. J’avais fait 95e au scratch. Un France réussi serait un top 10. Après, tout peut se passer. J’aimerais le mieux possible, voire le top 5. Je sais que ça devrait être bien boueux car il ne fait que pleuvoir depuis mardi. Je n’aime pas trop la boue donc on verra. Franchement, courir à domicile, j’aimerais accrocher la meilleure place.
— À quel type d’ambiance vous attendez-vous au bord du parcours avec les supporters bretons ?
Je pense qu’il y aura énormément d’ambiance et en tant que Breton et champion de Bretagne, je pense avoir énormément d’encouragements. J’ai entendu dire qu’ils attendaient près de 40 000 spectateurs sur les deux jours donc cela sera vraiment un gros France. Un France normal, il y a entre 15 et 20 000 personnes donc c’est près du double. Ce qui me fait un peu peur, c’est la pluie et que certains décident de ne pas venir au dernier moment. Cela sera quand même une ambiance de folie, c’est sûr. J’ai hâte !
— Beaucoup de spécialistes annoncent que ça sera l’un des événements forts de saison athlétique…
Oui, surtout par rapport au parcours assez atypique. Cela va changer des hippodromes dans le reste de la France où c’est plutôt plat et sec ou du moins, on peut aller vite. Ici, ça sera un vrai parcours de cross. J’y suis déjà allé deux fois m’entraîner sur le circuit. C’est un parcours très exigeant. Il y en a plein qui ne vont pas être prêts. Cela va être un vrai cross. Il n’y a quasi aucune partie de plat à part le début. Tout est en dévers avec des faux plats montants, faux plats descendants, des grosses côtes, des descentes, des relances. Il va y avoir du spectacle à Carhaix ! Cela va être sympa à regarder et à courir.
— Pourquoi avez-vous tenté l’aventure outre-Atlantique en 2017 ? Qu’est-ce qui vous plaît aux États-Unis ?
J’avais voulu y aller puisque j’avais envie de continuer mes études et courir en même temps. En France, c’est un peu difficile de concilier les deux en même temps. Là-bas, tout est autour de la performance mais tu suis à l’école. Il y a un groupe d’entraînement dans chaque école. Le niveau est assez impressionnant. Il y a les infrastructures. Pour faire très simple, chaque école est comme un mini INSEP. On est en général une vingtaine de gars et de filles à courir au même niveau. Il y a les kinés, les médecins,… C’est vraiment un niveau semi-pro en étant encore à l’école. Cela permet de passer un cap à l’entraînement et de continuer les études. C’était une des bonnes raisons de tenter l’expérience. Normalement, on ne peut rester qu’un maximum de cinq ans. C’est ma sixième année et dernière car comme je me suis blessé l’année dernière, cela m’a « rendu » un an. Je retourne la semaine prochaine jusqu’à mi-juin puis c’est fini. Je rentrerai en France directement.
— Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour cette année 2023 ?
Me souhaiter ne plus avoir de blessures. L’année 2022 a été horrible avec deux blessures. J’ai dû faire deux courses jusqu’à février et une en décembre. Donc être en bonne santé et battre mes records, ce serait l’idéal. Sur 5000m, cela sera ma distance de prédilection. Je pense aussi courir quelques 1500 m. La saison estivale commence directe aux Etats-Unis. Le 24 mars, j’ai ma première course. Je vais peut-être être aligné sur 10 000 m mais rien n’est sûr. La course ne sera pas forcément rapide donc cela sera difficile pour un record. J’ai vraiment envie de me focaliser plus sur le 1500-5000 m, faire plus de vitesse. Je serai moins prêt pour le 10 000 m donc j’ai dû mal à imaginer en faire un en milieu de saison.
— Les Jeux olympiques de Paris en 2024, vous y pensez ?
C’est forcément dans un coin de ma tête. Ce n’est pas quelque chose auquel je pense tous les jours. Je n’ai pas envie de me mettre de pression. Cela viendra en fonction des performances. C’est vrai que cela va arriver très vite. L’objectif est de faire une grosse saison estivale voire pousser jusqu’à la fin, août, septembre si possible car les qualifications commencent un an avant. Le but est de prolonger la forme pour une arrière-saison estivale pour faire de bons chronos et se mettre en bonne position pour les Jeux olympiques. Je n’en fait pas une obsession. Si j’y arrive tant mieux, si je n’y arrive pas tant pis. J’aurai toujours envie de courir. On préparera la suite des échéances.
— Pouvez-vous nous en dire plus sur votre rôle d’ambassadeur de l’enseigne « Tonton Outdoor » spécialisée dans l’équipement des sports Outdoor ?
Tonton Outdoor, je les connais depuis que j’ai commencé à courir. À l’époque, cela s’appelait Sobhi Sport Vannes. Maëlan (Dahyot) et Kévin (Bauché) ont vraiment commencé leur marque il y a deux ans. Ça fait plaisir de représenter une marque bretonne. Ce sont des gens que je connais très bien, je suis très fier d’être ambassadeur de Tonton Outdoor et être originaire de Vannes. Du coup, je les représente sur les compétitions en France, aux Etats-Unis et à l’international.
Retrouvez toutes les informations sur la compétition (direct vidéo, parcours, programme…), en cliquant ici.
Propos recueillis par Coline Balteau
Crédits photos : Gaëlle Mobuchon / STADION