Vincent Bouillard et Katie Schide, roi et reine du Mont-Blanc sur l’UTMB 2024

31 août 2024 à 15:00

Le Français natif d’Annecy Vincent Bouillard a explosé à la face du monde, écrasant la concurrence, en triomphant sur l’UTMB, la plus grande course de la planète de l’ultra-trail, à Chamonix ce samedi. Un autre Tricolore, Baptiste Chassagne, dixième en 2023, monte sur la deuxième marche du podium. L’ultra-favorite américaine Katie Shide décroche une deuxième victoire après celle acquise en 2022 et atomise le record de l’épreuve détenu par sa compatriote Courtney Dauwalter (22h30’55). Récit en direct du pied du Mont-Blanc.

« Si vous avez des informations à nous donner concernant Vincent Bouillard, nous sommes preneurs, n’hésitez pas à nous les partager ». Voici la requête demandée aux internautes par le commentateur Yoann Jadaud lors de la prise d’antenne du live à 7 heures. Et les informations tombent au compte-gouttes. Le microcosme de l’ultra-trail s’est en effet réveillé ce matin en croyant à un bug sur la plateforme de résultat. Il fallait se frotter les yeux pour être certain de bien apercevoir qui virait en tête de la course : un nom jusque-là quasi inconnu du grand public. Alors que le favori Jim Walmsley avait pris les devants en début de soirée hier, c’est un leader inattendu Vincent Bouillard (31 ans, 70e cote UTMB Index sur la liste des engagés) qui a émergé au milieu de la nuit… et qui a levé les mains en premier.

 

 

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Il développe des chaussures de trail pour HOKA… qu’il utilise lui-même en compétition !

Impressionnant depuis le départ hier à 18h00 sur la Place Triangle de l’Amitié, le natif d’Annecy n’a jamais délogé du top 10, à l’issue d’une course pleine d’intelligence et parfaitement maîtrisée, qu’il a décantée à Courmayeur (83e km), à la suite de l’abandon de Jim Walmsley (voir plus bas). À ce moment de la course, personne n’aurait parié un centime sur sa victoire. Pourtant, l‘ingénieur produit chez HOKA (il a commencé en tant que stagiaire en 2016 au sein de l’équipementier qui a vu le jour dans les Alpes en 2009), qui mène une carrière professionnelle exigeante, a ensuite creusé l’écart pour vivre une deuxième partie d’aventure en solitaire, pour ce qui était sa toute première incursion sur l’épreuve chamoniarde.

Désormais installé à Marcellaz-Albanais depuis mai, Vincent Bouillard, qui a rejoint les bureaux de HOKA à Annecy, ne possède par ailleurs pas de contrat professionnel avec la marque. Une anomalie qui devrait vite être rectifiée auprès de son employeur après sa prestation magistrale sur les sentiers du tour du Mont-Blanc. Il se fait très discret sur les réseaux sociaux (263 abonnés avant ce samedi). Désormais, chacune des sorties en compétition de l’Annécien sera scrutée à la loupe, analysée, décortiquée.

 

« Ça fait 20 ans que je prépare ça »

Le natif d’Annecy paraissait toujours très à l’aise et discutait même avec le « caméra-runner » qui le suivait pour la retransmission de la course : « Ça fait 20 ans que je prépare ça, c’est un rêve de gamin. Ça fait pratiquement depuis le début de l’UTMB que je viens voir la course en tant que spectateur, bénévole puis pour le boulot », explique l’ancien pensionnaire d’Annecy Haute Savoie Athlétisme qui a effectué une reconnaissance du parcours pour la première fois fin juillet aux côtés de Thibaut Garrivier, athlète HOKA contraint à l’abandon.

 

 

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Troisième chrono derrière Jim Walmsley et Kilian Jornet

Vincent Bouillard a négocié les 171 km et quelques 10 000 m D+ en moins de 20 heures, en 19h54’23. Une performance stratosphérique et magistrale qui constitue le troisième meilleur chrono de l’histoire derrière les 19h37’43 de Jim Walmsley en 2023 et les 19h49’30 de Kilian Jornet en 2022. Deux monstres sacrés de la discipline sur le globe. Passé par l’athlétisme (9’35″66 sur 3000 m steeple en 2016, un même un record à 3,00 m au saut à la perche en 2009 lorsqu’il était cadet!), le cyclisme et le triathlon, l’ultra-traileur français a fait ses études à Lyon avant de s’expatrier aux États-Unis pour rejoindre team innovation HOKA.

Il y rencontre son épouse Kamilah avec qui il s’est marié l’an passé. C’est d’ailleurs sa dulcinée qui a géré son assistance tout au long de la course (elle n’avait pas de pass Elite au départ de la course pour se déplacer facilement entre deux ravitaillements, avant de trouver un logique arrangement avec les organisateurs lorsque son mari a pris les commandes, ndlr).

 

Spectateur, bénévole, assistant… à grand vainqueur !

Tout le public était suspendu aux lèvres de Vincent Bouillard qui a pris le temps de raconter son histoire d’amour avec l’UTMB sous l’arche d’arrivée, sur un ton calme et posé. « C’est incroyable déjà de prendre le départ de cette course, c’est un rêve qui se réalise. La première fois que je suis venu sur cet événement j’étais gamin. J’ai vécu l’UTMB en tant que spectateur et j’ai découvert l’effervescence de cette course. Je l’ai vécue en tant que bénévole, puis avec mon travail chez HOKA (partenaire titre), et j’ai aussi fait l’assistance pour des amis proches. Ça me trottait dans la tête depuis tout gamin de faire cette course. Je dois remercier ma compagne Kamilah qui a été la première à me pousser. »

 

Cinquième de la MaXi-Race début juin

Le Français de 31 ans, qui réalise un kilométrage hebdomadaire important depuis de nombreuses années, ambitionnait aux mieux un top 10 : « Je m’étais fixé trois objectifs. Un objectif C qui était de finir en moins de 24 heures, B qui était près des 21 heures et A qui était top 10 voir proche du podium, mais pas la gagne. Jim Walmsley et Tim Tollefson sont des amis dans la vie qui m’ont inspiré. » Avant ce samedi, Vincent Bouillard avait comme principal fait d’arme une cinquième place lors de la dernière MaXi-Race (90 km) à Annecy le 1er juin dernier derrière Mathieu Blanchard, Thibaut Garrivier, Aurélien Dunand-Pallaz, qui ont tous les trois abandonné, et Baptiste Chassagne. Il n’avait également disputé qu’un seul 100 miles (160 km) qu’il a remporté. C’était le Kodiak Ultra Marathon en 2023 aux États-Unis.

 

 

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Baptiste Chassagne se révèle

Champion de France de cross long 2023 à Millau et dixième l’an passé sur l’UTMB pour sa première apparition, Baptiste Chassagne se classe deuxième de ce sommet mondial du trail, abaissant sa marque de plus d’une heure (20h22’45 contre 21h38’11). Ce Lyonnais fan de Saint-Etienne a résisté à la tentative de remontée de l’Équatorien Joaquin Lopez, troisième en 20h26’22. « J’allais écrire notre devise, en vert et contre tous. En réalité, j’ai envie d’écrire, en vert et avec tous. Y croire ne fait pas tout. Mais ça assure l’essentiel ».

Vainqueur de la Hardrock 100 (164,9 km, 10 118 m D+, à Silverton dans le Colorado, le 13 juillet) avec le record de l’épreuve en poche, Ludovic Pommeret n’en finit plus de nous étonner à 49 ans. Lauréat en 2017, le Savoyard prend la cinquième place de cet UTMB 2024, avec un chrono sous les 21 heures (20h58’18). « Je me suis dit que j’allais prendre des risques. Cette place m’apporte une nouvelle grande joie après la Hardrock. Je suis vraiment content pour Vincent aussi. C’est un gars vraiment bien, je savais qu’il pouvait faire quelque chose de grand et son entraînement a payé ». Sixième place pour Arthur Joyeux-Bouillon (7e en 2022, 9e en 2023) qui bat son record de vingt minutes en 21h12’12. Les Français se sont aussi illustrés avec Gautier Bonnecarrère (21h45’16) et Yannick Noël (21h45’18), respectivement neuvième et dixième, et pas attendus à pareille fête.

 

 

Katie Schide, quelle démonstration !

 Dotée du dossard numéro 1 au départ, Katie Schide a terminé numéro 1 à l’arrivée. Une deuxième victoire après celle remportée en 2022 qui ne souffre d’aucune contestation possible. Mais alors vraiment aucune. La plus Française des Américaines, compagne de Germain Grangier, s’impose à Chamonix après avoir survolé la course de A à Z et réussit son pari de remporter deux courses mythiques de l’ultra-trail en 2024 : la Western States en juin et l’UTMB donc ce samedi.

Ultra-favorite de l’épreuve alors que la reine Courtney Dauwalter n’était pas au départ, elle se permet même de battre le record de sa compatriote (22h30’54 en 2021) d’une vingtaine de minutes (22h09’31). C’est une treizième place au scratch pour Katie Schide, qui en termine juste derrière Thibaut Baronian (champion de France de trail court 2023), douzième en 22h07’48 pour son premier UTMB. Katie Schide poursuit l’hégémonie américaine avec une cinquième victoire consécutive (2 pour Schide et 3 pour Dauwalter en 2019, 2021 et 2023). On peut regretter l’absence de la reine Courtney Dauwalter qui aurait rajouté du piquant à une course qui a été somptueuse. L’empoignade entre les deux traileuses aurait certainement valu le détour.

 

 

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« Je voulais pouvoir courir sous les 22 heures »

« Par rapport à mon plan de course, je ne suis pas allée plus vite que quand j’ai gagné en 2022, confie la native du Maine, au nord-est des États-Unis. J’ai eu l’impression que les hommes sont allés beaucoup moins vite au début de la course mais je ne me suis pas préoccupée de tout ça. J’ai doublé beaucoup de personnes qui étaient autour de moi. Je voulais pouvoir courir sous les 22 heures, je n’ai pas réussi, mais c’était mon objectif, je savais que j’avais les jambes. Je remercie tout le monde au bord des chemins ».

La Néo-zélandaise Ruth Croft (lauréate de l’OCC en 2019 et 2018) rallie la ligne au deuxième rang en 22h48’37, à 40 minutes de Katie Schide. La Canadienne Marianne Hogan (2e de l’UTMB 2022 derrière Katie Schide, 23h11’15) complète le podium. La première Française se classe cinquième et il s’agit de Blandine L’Hirondel (3e en 2023) qui a mis un point d’honneur à boucler cet UTMB, au bout d’un combat qui aura duré exactement 24h35’54. La double championne du monde (2019 et 2022), vainqueure de la CCC en 2022 et de l’OCC en 2021, a malheureusement connu des problèmes d’ampoules aux pieds assez tôt dans la course.

 

 

Jim Walmsley, Mathieu Blanchard et Aurélien Dunand-Pallaz ne sont pas allés au bout

Il y a eu de la casse chez les favoris, beaucoup plus que les autres années, notamment chez les messieurs. Tout d’abord, la nuit a eu raison des Français Mathieu Blanchard (troisième en 2021, deuxième en 2022 et quatrième en 2023), Aurélien Dunand-Pallaz (deuxième en 2021) et Anne-Lise Rousset (deuxième de la Hardrock 100 en 2023) qui ont mis le clignotant au Lac de Combal (70e km), l’Américain Jim Walmsley (vainqueur de l’UTMB en 2023) et l’Espagnol Pau Capell (vainqueur de l’UTMB en 2019) se sont retirés à Courmayeur (83e km après 9h d’effort) alors que le Britannique Tom Evans (vainqueur de la CCC en 2018 et troisième de l’UTMB 2022), a mis fin à son aventure au Grand Col Ferret (106 km).

Amoindri par une douleur au genou depuis sa victoire en juin à la Western States (Californie), Jim Walmsley ne s’offrira pas le doublé sur deux courses mythiques de l’ultra-trail : la Western States et l’UTMB. Déjà contraint à l’abandon en 2022 et 2023, Pau Capell devra retenter sa chance pour décrocher une deuxième couronne sur la reine des courses d’ultra-trail à Chamonix.

Merci messieurs dames pour les émotions, rendez-vous l’année prochaine pour la 22e édition !

Tous les résultats de l’UTMB 2024

Crédit photo : UTMB

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