Près de cinq mois après, l’athlétisme a ressuscité vendredi soir au Stade Louis-II. Les Français Wilhem Belocian (110 m haies), Jimmy Gressier (5000 m), Benjamin Robert (800 m) et Pierrik Jocteur-Monrozier (1500 m) ont profité d’un Meeting Herculis de Monaco de très bonne facture pour battre leur record personnel. Djilali Bedrani a lui aussi brillé en se classant troisième du 3000 m steeple. Quelle soirée !
Hasard du calendrier, le Meeting de Monaco et le choc des quarts de finale de la Ligue des champions à Lisbonne entre le FC Barcelone de Messi et le Bayern Munich de Lewandowski se sont déroulés à la même heure ce vendredi soir. Force est de reconnaître que les grands champions n’étaient pas tous au Portugal. Malgré un protocole sanitaire très strict, le Rocher a réussi comme chaque année à battre le rappel des pépites de la piste et ce sont pas moins de 13 champions du monde en titre, un record, qui étaient présents au Stade Louis-II.
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Belocian dans le bon tempo
Wilhem Belocian a montré l’exemple sur la piste du stade Louis II. Convaincant en 13″38 mardi lors de sa rentrée sur 110 m haies à Turku (Finlande), le protégé de Ketty Cham a haussé son niveau pour décrocher la troisième place en 13″18 (+0,8 m/s), abaissant de sept centièmes son record personnel. Derrière l’Espagnol Orlando Ortega, auteur de la meilleure performance mondiale de l’année en 13″11 et du Britannique Andrew Pozzi, record égalé en 13″14, le hurdler du Stade Lamentin s’offre le scalp du champion du monde américain Grant Holloway (13″19). Le champion du monde juniors 2014 quitte Monaco avec des données sur lesquelles se réjouir malgré quelques fautes sur les obstacles : « Je ne suis pas surpris car j’ai bien travaillé malgré la préparation tronquée mais tout est oublié lors de la course. J‘ai beaucoup travaillé mon départ et je suis resté au contact. Il y a beaucoup de travail à faire mais c’est prometteur », a expliqué au micro de Canal +, celui qui devient le cinquième Français le plus rapide de l’histoire sur les haies hautes. Le décor était planté.
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Gressier dans une course de légende
Fidèle à sa réputation de réunion de rêve pour les demi-fondeurs, le Meeting de Monaco a été le théâtre d’une nouvelle marque planétaire. Elle a été réalisée par Joshua Cheptegei, champion du monde du 10 000 m à Doha en 2019, qui, en 12’35″36, a explosé d’un peu moins de deux secondes le record du monde du 5000 m détenu depuis 2004 par l’Éthiopien Kenenisa Bekele (12’37″35). Dans cette course pour l’histoire, Jimmy Gressier a su profiter de la locomotive ougandaise pour descendre pour la première fois de sa carrière sous les 13’20, avec une septième place en 13’15″77 (ancien record 13’23″04) : « J’échoue à deux secondes des minima pour les JO de Tokyo mais ce n’est pas l’essentiel ce soir. Je sais que dans ma tête, je peux les faire. Il faut savourer, c’est tellement un sport dur, un sport difficile que chaque moment, dans le mal ou le plaisir, il faut le savourer. J’ai vécu un moment de plaisir avec tout ce public malgré le coronavirus. C’est fou mais c’est Monaco ! Je cours mon premier 3000 m steeple à Decines le 29 août, on verra ce que ça peut donner. Au football, j’étais polyvalent et j’ai envie d’être polyvalent dans la course à pied en faisant à peu près toutes les disciplines », détaille le triple champion d’Europe espoirs de cross qui revient de trois semaines intensives de stage à Font-Romeu.
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Les Bleuets en mode record
Sur 800 m, l’Américain Donovan Brazier, favori annoncé, a amélioré sa propre meilleure performance mondiale 2020 en 1’43″15. Dans sa foulée, arrivé avec un chrono de référence de 1’46″52 dans la Principauté, Benjamin Robert a atomisé de plus deux secondes son record personnel en coupant la ligne en quatrième position en 1’44″56. Un gouffre. Pour son premier Meeting de la Diamond League, le demi-fondeur de 21 ans a affiché du caractère et de l’assurance. Le pensionnaire du CA Montreuil a été bien lancé par le lièvre, le spécialiste du 400 m Mame-Ibra Anne (passage au 400 m en 50″40), et a ensuite parfaitement géré son effort au terme d’une dernière ligne droite pleine de fougue : « Je n’y crois pas, ce sont minima pour les JO de Tokyo. Je finis fort, mais je peux prendre encore plus de risques. Ce n’est que le début », souriait Benjamin Robert à sa sortie de la piste. Il réalise la deuxième meilleure performance française de tous les temps en espoirs derrière le chrono de Pierre-Ambroise Bosse (1’42″53), réalisé ici même à Monaco il y a six ans. Surtout, il passe de la trente-neuvième à la septième place au bilan français de toute l’histoire de la discipline.
Un autre espoirs tricolore, pour son baptême de feu dans la cour des grands, a brillé. Pierrik Jocteur-Monrozier (22 ans), étudiant en quatrième année de médecine, a lui aussi raboté de plus deux secondes son meilleur temps en franchissant la ligne d’arrivée du 1500 m en 3’35″00 pile (ancien 3’37″60). Un chrono synonyme de quatrième performance française de tous les temps chez les espoirs. Le sociétaire du SA Toulouse UC a terminé neuvième d’une course marquée par la victoire du Kényan Timothy Cheruiyot (3’28″45) et par le record d’Europe du prodige norvégien Jakob Ingebrigtsen (3’28″68). Un record d’Europe qui était détenu depuis 2013 par Britannique Mo Farah en 3’28″81.
On connaît un coach qui doit être certainement très heureux de ses poulains ce soir. En plus de Benjamin Robert et de Pierrik Jocteur-Monrozier, un troisième athlète entraîné par Sébastien Gamel à Toulouse s’est mis en évidence. Révélé aux yeux du grand public lors des Mondiaux de Doha et sa cinquième place sur 3000 m steeple, Djilali Bedrani a livré une solide prestation sur 3000 m steeple en accrochant une très belle troisième place en 8’13″43. Décomplexé, le steepleur de 26 ans a joué crânement sa chance pour sa course de rentrée sur sa distance de prédilection : « C’était une course de niveau mondial. Il faut continuer à s’entraîner pour faire baisser le chrono, j’ai beaucoup travailler la vitesse cet été et je cherchais à réaliser un chrono mais malheureusement le premier kilo ne s’est pas couru assez vite. Je termine troisième de la course, c’est ce qu’il faut retenir ». La victoire revient au Marocain Soufiane El Bakkali en 8’08″04 devant le Kényan Leonard Kipkemoi Bett (8’08″76).
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Ludvy Vaillant en progrès
Placé au couloir 7 qu’il affectionne, le Norvégien Karsten Warholm, star planétaire du 400 m haies, a encore réalisé un chef d’œuvre en dominant la course en 47″10, le record de la réunion monégasque. Le tout en treize foulées tout du long de la course. Cela constitue le huitième chrono de tous les temps et le deuxième de sa carrière derrière son record d’Europe (46″92 en 2019). Pour sa deuxième course de la saison, Ludvy Vaillant a retrouvé quelques sensations en prenant la quatrième place en 49″35 qui avait de quoi le ravir à l’arrivée : « Je suis très rassuré par rapport à mes débuts mardi à Turku (50″37) où j’étais à la recherche de repères et de sensations ».
Liv Westphal termine au neuvième rang du 5000 m en 15’39″66 (record en 15’28″71) juste devant Alessia Zarbo (10e en 16’09″70) qui s’est approchée près du record de France juniors de Charlotte Audier (16’07″72 en 1988). Marvin René (20″97) et Mouhamadou Fall (21″20) ont respectivement pris la septième et la huitième place d’un 200 m (+0,7 m/s) dominé par l’Américain Noah Lyles en 19″76, la meilleure performance mondiale 2020. De son côté, l’Angevine Amandine Brossier s’est classée huitième du 400 m en 52″98.
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6 mètres pour Duplantis
Le recordman du monde du saut à la perche (6,18 m) Armand Duplantis est resté pour sa part maître de sa discipline en franchissant 6 mètres à sa troisième tentative. Tarif minimum pour le Suédois : « Je voulais être au-dessus de 6 mètres mais j’aurai voulu faire des meilleurs sauts à 6,15 m. J’ai eu des problème sur ma course d’élan mais je sais ce que je dois faire pour aller plus haut ». Un concours auquel aurait dû faire partie Valentin Lavillenie qui a été contraint de déclarer forfait ce vendredi après avoir été testé positif (asymptomatique) au Covid-19. Ses camardes Thibaut Collet (perche) et Hugo Hay (5000 m), qui ont dîné avec le perchiste clermontois, par mesure de précaution, n’ont également pas pu se joindre à la fête. Ils auraient dû honorer leur première participation à un Meeting de la Diamond League. Le protocole sanitaire mis en place par les organisateurs du Meeting de Monaco, chaque athlète participant doit présenter un test PCR négatif de moins de 72 heures au Covid-19 pour prendre part à l’événement.
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Retour des frissons !
Le Stade Louis-II a apprécié le retour de la Diamond League à l’occasion du Meeting de Monaco, avec un public heureux de retrouver l’ambiance d’un stade, un bonheur auquel la crise sanitaire avait mis un terme depuis mars dernier. La compétition a déplacé près de 5000 spectateurs, respectueux des gestes barrières et du port du masque. Histoire de plonger les athlètes, les spectateurs et les téléspectateurs dans effervescence d’un stade plein, World Athletics a eu la bonne idée d’introduire un système permettant de recréer artificiellement l’atmosphère d’une réunion d’athlétisme grâce à des bruits d’ambiance préenregistrés. La compétiton a offert du grand spectacle et pas moins de onze meilleures performances mondiales de l’année ont été réalisées.
Athlétisme, on a eu grand plaisir à te revoir mais on a tous hâte de te retrouver dans ta forme la plus éclatante !
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Crédit photo : STADION