Championnats du monde : Noah Lyles et Shericka Jackson supersoniques sur 200 m

22 juillet 2022 à 13:37

En l’espace d’un quart d’heure ce jeudi soir, le stade Hayward Field de Eugene a été le théâtre de deux finales de 200 m très rapides. Du côté masculin, Noah Lyles a fait arrêter le panneau d’affichage en 19″31, troisième meilleure performance de l’histoire. Le sprinteur de 25 ans a mené un nouveau Sweep américain avec Kenny Bednarek (19″77) et Erriyon Knighton (19″80). Sur le demi-tour de piste féminin, la Jamaïcaine Shericka Jackson a survolé les débats avec un temps phénoménal de 21″45, deuxième meilleur chrono de tous les temps, et s’est imposée devant sa compatriote Shelly-Ann Fraser-Pryce (21″81). La Britannique Dina Asher-Smith (22″02) complète le podium. Récit d’une folle soirée !

Le légendaire 19″32 sur 200 m de Michael Johnson, lors des JO d’Atlanta en 1996 a marqué toute une génération de passionnés d’athlétisme. Il a symbolisé une période faste pour notre sport. Plus de 25 ans après, la page est définitivement tournée. Noah Lyles a conservé sa couronne sur 200 m jeudi à Eugene en devenant le troisième meilleur performeur de l’histoire sur la distance en 19″31 (+0,4 m/s), à seulement douze centièmes du record du monde détenu par Usain Bolt (19 »19 en 2019). Seuls la star jamaïcaine, deux fois, et Yohan Blake (19″26 en 2011), ont désormais couru plus vite que Noah Lyles sur le demi-tour de piste. « J’ai couru tellement vite. J’espérais vraiment que ça soit un chrono rapide, mais quand j’ai vu ce chrono, je me suis dit : sérieusement ? », s’est étonné le désormais double champion du monde, qui en a déchiré son maillot de joie et de rage aussitôt la ligne d’arrivée franchie.

 

 

Décidément, les Américains savent parfaitement profiter de leur premier rendez-vous planétaire à domicile. Après le triplé sur 100 m et au poids, voilà maintenant qu’ils occupent les trois premières places sur 200 m ! Et de quelle manière. Noah Lyles avait peut-être un sentiment de revanche avant ces Mondiaux. Le médaillé de bronze de Tokyo s’est fait voler la vedette un peu plus tôt cette saison avec l’arrivée soudaine du jeune prodige Erriyon Knighton, 18 ans et qui a réalisé (jusqu’alors) la meilleure performance de la saison en claquant un stratosphérique 19″49, ce qui fait de lui l’athlète de 18 ans le plus rapide de l’histoire, loin devant Usain Bolt (19 »93 en 2004). À Eugene, Noah Lyles voulait remettre les pendules à l’heure. Il les a sûrement cassées. Celui qui défendait son titre acquis en 2019 à Doha réalise tout bonnement un des virages les plus rapides de tous les temps en 10″15 ! Le champion du monde du relais 4×100 sort assez nettement en tête, mais va encore prendre de l’avance en offrant au public une dernière ligne droite spectaculaire, jusqu’au bout !  D’abord crédité de 19”32, le tableau d’affichage abaissera finalement la marque d’un centième. Un centième qui change tout et qui l’amène dans une tout autre dimension. C’est la troisième fois qu’un athlète parvient à défendre son titre sur 200 m après Usain Bolt (2009 et 2015) et Calvin Smith (1983 et 1987).

 

Erriyon Knighton, futur grand

Noah Lyles a mené un nouveau triplé américain dans le Hayward Field, comme Fred Kerley l’avait fait sur 100 m samedi : il a devancé Kenny Bednarek (19 »77) et le tout jeune Erriyon Knighton (19 »80). Déjà médaillé d’argent l’année dernière aux Jeux, Kenny Bednarek s’offre une nouvelle breloque du même métal aux Mondiaux. Bien parti, celui qui détient un record personnel en 19″68 réalisé l’été dernier au Japon conserve sa deuxième place dans la ligne droite et franchit la ligne en 19”77, meilleur chrono de la saison. L’histoire est belle pour celui qui a souffert d’une fracture à l’orteil cette année et qui, mine de rien, s’offre déjà son deuxième podium international à seulement 23 ans.

Au passage, retenez bien ce nom : Erriyon Knighton. Lui s’offre sa première médaille, et certainement pas la dernière. À seulement 18 ans, Erriyon Knighton continue d’époustoufler les puristes. Le départ n’étant pas son point fort, le recordman du monde juniors sort tout de même troisième à l’entrée du virage. C’est un 19″80 qui attend le jeune prodige au bout de la ligne droite, soit le meilleur temps de l’histoire pour une troisième place, exæquo avec un certain… Christophe Lemaître, qui avait été crédité du même chrono à Daegu en 2011. C’est aussi un record de précocité pour l’Américain qui est le plus jeune médaillé de l’histoire sur la distance en championnat (18 ans et 174 jours), et le deuxième toutes disciplines confondues derrière le Kényan Richard Chelimo lors du 10 km en 1991 (18 ans et 127 jours). L’élève de Mike Holloway, content de glaner une première breloque malgré un petit lapsus : « Je suis très heureux d’avoir gagné ma première médaille d’or… euh mondiale ! ». Révélateur ? Dans tous les cas, Knighton n’aura que 20 ans pour Paris 2024, et le duel avec Lyles dans les échéances à venir s’annonce déjà épique. Et dire que celui que certains voient comme le digne successeur de Bolt n’a commencé l’athlé qu’en 2019… Prodigieux.

 

Shericka Jackson, stratosphérique en 21″45

Sur le demi-tour de piste féminin, ce sont plusieurs générations de passionnés d’athlétisme qui risquent de prendre un coup sur la tête. Le controversé vieux record du monde Florence Griffith-Joyner (21″34 à Séoul) datant de 1988 a bien failli tomber cette nuit. Shericka Jackson a claqué un retentissant 21″45 (+0,6 m/s), signant le deuxième chrono de l’histoire sur 200 m. Un chrono qui a de quoi faire pâlir des athlètes seniors et expérimentés. Médaillée d’argent sur 100 m lundi, la Jamaïcaine prend sa revanche sur Tokyo où elle avait été éliminée dès les séries après avoir coupé trop tôt. Cette fois, l’effort aura perduré jusqu’au bout. Avec cette breloque dorée, la sprinteuse de 28 ans possède désormais dans son armoire à trophées les trois métaux après l’argent sur le 100 m à Eugene et le bronze sur le 400 m de Doha. Le tout sur trois épreuves. Rapide et polyvalente. À Kingston fin juin, Shericka Jackson avait dominé le 100 m et le 200 m de ses championnats nationaux. Elle était d’ailleurs devenue la troisième meilleure performeuse de l’histoire, en 21 »55. Un temps qui laissait présager celui de cette nuit historique qui restera à jamais gravé pour le sprint mondial.

 

 

Deuxième, Shelly-Ann Fraser-Pryce continue sa récolte. La voici vice-championne du monde en 21″81, sa meilleure course de la saison et une belle communion avec sa compatriote Jackson à l’arrivée. Pour compléter le podium, il fallait compter sur la régularité de Dina Asher-Smith. Tenante du titre, la Britannique récupère sa sixième médaille mondiale en carrière grâce à un chrono de 22″02. Au final, c’est le sixième doublé pour la Jamaïque sur le demi-tour de piste féminin, et la cinquième médaille d’or, sur le globe, personne ne fait mieux ! Un triplé américain, un doublé jamaïcain, des chronos à couper le souffle… Les amateurs de vitesse ont encore une fois été gâtés. Et quand il n’y en a plus, il y en a encore ! Les relais 4×100 m débutent dès cette nuit à partir de 2h40 en France, avec des équipes américaines et jamaïcaines qui risquent de faire parler la poudre sur le stade Hayward Field… et une équipe de France qui veut tirer son épingle du jeu.

Texte : Briac Vannini
Crédits photos : Solène Decosta / STADION

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