Lors d’un mardi soir exceptionnel, Alice Finot a fini au pied du podium du 3000 m steeple des Jeux olympiques de Paris 2024 en s’emparant du record d’Europe en 8’58″67. Quelques instants après la finale, la Française a demandé son compagnon en mariage. En demi-finales du 400 m haies, Louise Maraval a continué d’épater son monde et jouera la médaille jeudi. Résumé d’une soirée haletante au Stade de France.
Il y a des quatrièmes places frustrantes et pas du tout réjouissantes. Mais celle décrochée par Alice Finot, pour sa première finale olympique, est loin d’entrer dans cette catégorie. Une médaille en chocolat vaut tout l’or du monde. La Française de 33 ans est allée décrocher une splendide quatrième place en finale du 3000 m steeple ce mardi soir. Alice reste au pays des merveilles car la championne d’Europe de Rome a amélioré son record de France et a chipé le record continental en 8’58″67, seize ans après le sacre de la Russe Gulnara Samitova-Galkina aux JO de Pékin (8’58″81). Portée par le public et par une centaine de proches dans les tribunes, elle avait pourtant 50 mètres de retard à mi-parcours sur les fusées africaines parties comme des bombes. En mode diesel comme à son habitude, la sociétaire du CA Montreuil 93 a tout tenté dans un final de fuego grappillant quelques places. Il ne manquait pas grand-chose pour monter sur la boîte et rattraper le trio de tête dont la Bahreïni Winfred Yavi est médaillée d’or en 8’52″76 (record olympique), suivie de l’Ougandaise Peruth Chemutai (8’53″34) et de la Kényane Faith Cherotich chronométrée en 8’55″15.
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Moment incroyable : l’ingénieur de profession a annoncé avoir demandé son compagnon en mariage après cette course d’anthologie. « Le genoux à terre, c’est parce que j’ai demandé mon compagnon en mariage, avouait-elle. Je m’étais dit que si je courais sous les 9 minutes, 9 c’est mon chiffre porte bonheur, ça fait 9 ans qu’on est ensemble. Je n’aime pas faire les choses comme tout le monde. ll ne l’avait pas encore fait et je me suis dit que c’était peut-être à moi de le faire. Aujourd’hui, c’était un grand jour et j’ai offert un pin’s avec lequel j’ai couru à mon copain où il y avait marqué « l’amour est à Paris ». Je m’étais dit que je voulais qu’il me donne cette force pour courir sous les 9 minutes et que si j’arrivais à le faire, ça voulait dire beaucoup et voilà, j’ai demandé mon copain en mariage aujourd’hui. Et il a dit oui ! »
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L’analyse de sa course : « J’ai fait une course à mon image et j’avais écrit sur ma main « joue ta propre partition pour ne pas m’égarer ». J’ai fait la course rêvée et j’ai réussi à le réaliser ce soir, savoure Alice Finot qui s’entraîne en Galice (Espagne). J’ai fait une course à mon image et j’avais écrit sur ma main “joue ta propre partition” pour ne pas m’égarer. Je ne voulais pas trop vibrer trop fort avec le public, ne pas me faire happer par les filles de devant et faire la course qui me correspond et enfin avoir la meilleure version de moi ce soir. Il y avait trois péages à passer, c’était le 1 000 m, le 1 500 m et le 2 000 m et à partir de là, j’ai débranché le cerveau, j’ai lâché les chevaux et je me suis dit “ok, là, tu te reconnectes avec le public et laisse-les courir avec toi, laisse-les t’emmener vers ta meilleure version ce soir”. Les filles, elles étaient loin. Il n’y a encore pas longtemps, je me serais dit “elles sont trop loin, donne ce que tu peux dans le dernier tour, de toute façon, avant c’est trop dur”. Et en fait, j’apprends à me connaître, à me calibrer, je travaille sur des trucs spécifiques à l’entraînement et là, je me suis dit « non, c’est à 800 m qu’il faut donner le kick » et ça a commencé à devenir dur. Les dernières barrières ne sont pas bien passées. Je suis sûre que si elles passaient mieux, il y avait peut-être deux secondes de gagner encore. Le premier kilomètre est très rapide, je pensais plutôt faire 3’01, 3’02 et puis du coup, ça fait un 2000 m en 6’05 ou 6’06. Le deuxième kilomètre devait être très loin mais je sais que les autres pètent après. Ce qui manque, c’est le 2 000 m. Il va falloir faire d’autres courses où je passe le 2000 m sous les 6 minutes. Ça va faire mal, il faudra voir jusqu’où ça tient. Ce sera des courses d’essais, de calibrage et il n’y en a pas eu assez cette année, j’ai fait qu’une Diamond League. Et il n’y a que les Diamond Leagues maintenant où je peux aller faire ce genre de chrono. Il y en a eu trois qui étaient sur d’autres continents, donc je n’ai pas pu le faire avant la Diamond League de Paris qui était une bonne prise de marque. Il reste des choses à faire, c’est ça qui est sympa. Tout ça veut dire que ma carrière ne s’arrête pas à Paris 2024, il y a encore des choses à aller chercher devant comme courir avec les filles des hauts plateaux. Aujourd’hui, je suis une athlète accomplie et que demander de mieux ? La place, c’était un bonus. Elle n’est pas très loin mais la vie et l’athlé continuent. Peut-être que je dois prendre des grosses vacances. »
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Une fulgurante Louise Maraval en finale du 400 m haies
Troisième chrono des engagées de sa demi-finale du 400 m haies, Louise Maraval pouvait espérer gratter une place de finaliste. En quatrième position avant la dernière ligne droite, la jeune pépite tricolore a terminé 2e au finish avec un magnifique chrono de 53″83, derrière une Sydney-Mclaughlin Levrone ultra-concentrée et largement supérieur en 52″13. La Vendéenne de l’Entente Sèvre a royalement obtenu son billet pour la grande explication jeudi (20h25) mais devra faire baisser son chrono si elle veut rivaliser avec sa concurrente du jour et Femke Bol en 52″57 dans la troisième demie, également facilement qualifiée. Shana Grebo a coincé dans la première demie à la quatrième place (54″84).
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« Je vais essayer de titiller les meilleures mondiales »
« Je suis contente, c’est ce que je voulais : rentrer en finale, que ce soit par une qualif directe ou au temps, expliquait Louise Maraval. Je passe à la place, c’est encore mieux, il n’y a pas besoin d’attendre. J’ai bien récupéré des trois courses précédentes, donc je remercie tout le staff médical parce que c’était un défi. Je suis fier de l’avoir relevé. Maintenant, il va y avoir la finale la plus rapide de l’histoire à mon avis, il va falloir que je m’en serve pour améliorer mon chrono et aller jouer à la bagarre. La ligne droite, c’était fou. Je sentais que j’étais à la bagarre, mais que je pouvais passer la fille devant moi. C’est un soulagement quand je passe la ligne, parce que je sais que je suis deuxième et que je vais pouvoir recourir dans deux jours. Je vais profiter encore de cette atmosphère. La clameur, je l’ai sentie au départ, pendant la course, tout le temps. Entre l’ambiance et une course avec de la concurrence comme j’aime, je m’éclate ! C’est le plus important pour que je performe. Il y a encore moyen de faire mieux en finale, à condition de bien récupérer. Je vais essayer de titiller les meilleures mondiales. À un moment donné, j’aurais probablement des limites, on verra si c’est jeudi ou plus tard. En tout cas, je vais essayer de passer encore des étapes. Il faut que je profite de cette énorme course pour élever encore mon niveau. Mes marges de progression ? Il y en a beaucoup : la façon de partir, franchir plus vite, finir encore plus fort. J’ai encore plein de choses à apprendre. Je prends de l’expérience au fur et à mesure. Là, le plan que j’ai réussi à appliquer, c’était de partir fort, comme j’avais réussi à le faire grâce à Shana (Grebo) aux championnats de France Élites. Je savais que la Jamaïcaine et la Sud-Africaine allaient partir vite. Je voulais tenir le plus longtemps possible, en sachant que la bagarre à la fin, c’est ce que j’aime le plus. On va construire un nouveau plan pour la finale. L’ambiance est dingue, j’adore ça. Je vais la vivre une cinquième fois sur la piste, je profite de ma chance. »
Cole Hocker surprend tout le monde sur 1500 m !
Alors qu’on promettait une bataille sans merci pour l’or entre les deux meilleurs ennemis Jakob Ingebrigtsen et Josh Kerr dans la finale du 1500 m, un invité surprise nommé Cole Hocker savourait le premier, mettant une claque record olympique en 3’27″65 (contre 3’28″32). L’Américain devançait finalement d’un rien le champion du monde en titre Kerr (3’27″79) et son compatriote Yared Nuguse (3’27″80). Pilote de l’avion alors qu’il restait derrière lors des séries et demies, Ingebrigtsen a craqué à 50 mètres de la fin et se retrouve bredouille dans sa spécialité (4e en 3’28”24). « C’était la course à laquelle je m’attendais, analysait le Norvégien. Tout dépendait de ce que je ressentais, de ma capacité à récupérer des courses précédentes. Je me sentais extrêmement bien et c’est pour cela que j’ai poussé un peu trop le rythme. »
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Gabby Thomas tient son rang en finale du 200 m
Toute l’île de Sainte-Lucie voulait voir son icône Julien Alfred réaliser le doublé 100 m – 200 m. C’était sans compter sur l’imperturbable Gabby Thomas plus rapide que tout le monde. 21″83, c’est le chrono de l’Américaine, bien plus rapide qu’Alfred, auteure d’un mauvais départ, et flashée en 22′ »08. L’Américaine Brittany Brown (22″20) complète le podium. Avec le meilleur chrono des demi-finales (21 »86) et un record perso’ supersonique à 21″60 flashé il y a un an (le 9e meilleur temps de tous les temps), la diplômée d’Harvard était donnée favorite sans les Jamaïcaines Elaine Thompson-Herah, Shelly-Ann Fraser-Pryce et Shericka Jackson blessées. Très à l’aise dès les premiers mètres, les grandes foulées de la sprinteuse de 27 ans, ont fait la différence. Avec une avance considérable à la sortie du virage, la native d’Atlanta a rapidement pris le contrôle de la course, laissant ses concurrentes incapables de contester sa domination. L’athlète qui a décroché la médaille de bronze au demi-tour de piste à Tokyo semblait inarrêtable et prête à monter sur la plus haute marche du podium sans aucune entrave. Alors que la Sainte-Lucienne restait à proximité, elle ne parvenait pas à réduire l’écart trop grand.
Camryn Rogers et Miltiadis Tentoglou autres médaillés d’or ce mardi soir
La Canadienne Camryn Rogers a remporté l’or au marteau grâce à un jet mesuré à 76,97 m. Seulement cinquième aux JO de Tokyo il y a trois ans, la championne du monde de Budapest a devancé l’Américaine Annette Echikunwoke (75,48 m) et la Chinoise Jie Zhao (74,27 m). La triple championne olympique en titre, la Polonaise Anita Wlodarczyk a terminé au pied du podium (74,23 m). Déjà injouable en qualif’ de la longueur survolée avec un saut à 8,32 m quand la quasi-majorité de ses adversaires n’avait pas dépassé les 8 mètres, Miltiadis Tentoglou a conservé son titre olympique grâce à un saut mesuré à 8,48 m. Le Grec est devenu le premier athlète à conserver son titre depuis Carl Lewis, vainqueur quatre fois de 1984 à 1996. Finalement, le Jamaïcain Wayne Pinnock est reparti avec l’argent (8,36 m) tandis que le crack Italien Mattia Furlani (8,34 m) s’est paré de bronze.
Tous les résultats de l’athlétisme aux JO de Paris 2024
Texte : Dorian Vuillet
Crédits photos : Solène Decosta & Gaëlle Mobuchon / STADION