Exceptionnel à tous les niveaux, le Marathon de Valence 2023 a été le théâtre de performances incroyables des Français avec cinq hommes (Mehdi Frère 2h05’43, Nicolas Navarro 2h05’53, Félix Bour 2h06’46, Morhad Amdouni 2h06’55, Benjamin Choquert 2h07’42) et quatre femmes (Mekdes Woldu 2h24’44, Mélody Julien 2h25’01, Manon Trapp 2h25’48, Fadouwa Ledhem 2h25’50) sous les minima pour les Jeux olympiques de Paris 2024. Devant, l’Éthiopien Sisay Lemma a décroché la victoire en 2h01’48, devenant le quatrième performeur de l’histoire. Récit d’une course qui fera date dans l’histoire du marathon français.
Commençons par la seule et unique mauvaise nouvelle : Il n’y a pas eu de nouveau record de France (hum, mais qu’est-ce qu’il est chafouin ce rédacteur). Sinon globalement, ça a été incroyable, fabuleux… Tous les superlatifs peuvent aller pour cette édition 2023 du Marathon de Valence, un des événements les plus enthousiasmants de la planète running depuis une paire d’années. Si on vous avait vendu une magnifique course dans les artères de la ville, on ne vous a pas menti.
Le record de France attendra encore un peu pour Mekdes Woldu
Les Jeux olympiques de Paris 2024 figurent déjà dans tous les esprits. Surtout quand l’échéance a lieu à la maison. Plusieurs marathoniens tricolores ont fait de ce rendez-vous planétaire l’objectif de leur carrière sportive. Une qualification olympique sur les 42,195 km n’est jamais l’œuvre d’un instant, ni le fruit du hasard. Mais plutôt le résultat d’un travail de longue haleine, perlé de sueur et de souffrances à l’entraînement. Ce dimanche, neuf fondeurs hexagonaux des deux sexes ont enquillé les minima olympiques (2h08’10 pour les hommes et 2h26’50 pour les femmes). On a beau convoquer nos souvenirs, scruter les moindres recoins de la mémoire, et même fouiller dans les archives : aucune trace d’une statistique pareille sur un même marathon dans l’Histoire de l’athlétisme tricolore.
Honneur aux dames avec Mekdes Woldu qui avait annoncé la couleur ! Mardi, au moment d’arriver à Valence, l’athlète de 31 ans affiliée à l’EFCVO s’était longuement confiée à Stadion, notamment pour analyser sa préparation et présenter ses ambitions. « J’espère battre mon record et faire moins de 2h26 ». En ralliant la ligne d’arrivée sur la splendide Cité des Arts et des Sciences en 2h24’44 (17e), l’élève de Thierry Choffin a abaissé son chrono de référence de près de deux minutes (2h26’34 à Hambourg en avril dernier pour son premier marathon) et ainsi définitivement scellé un des trois tickets pour la place aux JO de Paris 2024. Elle remonte également à la deuxième place des bilans nationaux derrière le record de France de Christelle Daunay (2h24’22 à Paris en 2010). Passée en 1h11’44 à mi-parcours (sur les bases de 2h23’28), Mekdes Woldu a très longtemps convoité et même été bien en avance sur ce record de France avant de connaître une fin de parcours compliquée. Une marque nationale qui lui est destinée et qui ne devrait pas lui résister encore très longtemps.
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Chapeau Mesdames !
Juste derrière, Mélody Julien (19e) s’est engagée dans une course dans laquelle elle ne devait rien s’interdire et surtout jouer sa carte à fond. La sociétaire de l’Association Multisports Montredonnaise a bluffé son monde avec un chrono de 2h25’02 (1h12’43 au semi), mettant un violent coup de plumeau à son record personnel (2h29’07 établi à Prague en mai dernier), grâce à une fin de course express. La protégée de Max Lesauvage se hisse au troisième rang des meilleures performeuses hexagonales de l’histoire.
Au coude à coude jusqu’au 31e km avec Fadouwa Ledhem (28e), Manon Trapp (27e) a finalement pris le meilleur pour deux secondes sur la sociétaire du Racing Multi Athlon (2h25’48 contre 2h25’50), terminant troisième Française du Marathon de Valence et prenant une petite option sur la sélection pour Paris 2024. Pour Manon Trapp, qui en quelques mois seulement a eu droit à un apprentissage accéléré de la distance, c’est une performance d’autant plus extraordinaire que la triple championne de France de cross-country est une néophyte sur la distance reine de la course à pied.
On était évidemment curieux de voir comment la représentante de l’Entente Savoie Athlé allait se comporter, et bien, on a vu. Une performance à laquelle elle pouvait s’attendre, après une préparation appliquée. Toujours présente dans les rendez-vous qui comptent, Manon Trapp a affiché du caractère et de l’assurance sur le macadam espagnol malgré une lourde chute au 10e km pendant un ravitaillement qui aurait pu compromettre ses chances de poursuivre son chemin. Débarquée à Valence avec un temps de référence à 2h38’58 (Valence en 2021), Fadouwa Ledhem a brisé son record personnel en mille morceaux. Il n’y aura que trois sélectionnées parmi ces quatre athlètes au maximum.
Cinq Français sous les minima olympiques
Il est arrivé à Valence avec une envie qui saute aux yeux. Rien ne pourrait l’effrayer ni tempérer son enthousiasme. De retour sur l’asphalte de la ville espagnole pour la quatrième fois (2h14’25 en 2019, 2h08’55 en 2020, 2h09’18 en 2022), Mehdi Frère (9e au scratch) s’est toujours mis en évidence à Valence et l’a encore montré ce dimanche (il y détient aussi son record sur semi en 1h00’32 en 2022) pour boucler les 42,195 km en 2h05’43, renvoyant au fond de la cave son chrono de référence. Mehdi Frère (27 ans) est un fondeur à la progression linéaire capable de coups d’éclat. Mais presque davantage que ce nouveau record, c’est la manière avec laquelle le fondeur du Pays de Fontainebleau Athlétisme l’a battu qui doit être mis en exergue. Dans un contexte forcément très relevé, le dix-huitième des Mondiaux de Budapest est parti avec le deuxième groupe sur les bases de 2h05/2h06 (1h02’54 au semi), au risque de baisser pavillon, mais a tenu bon, et même mieux que ça. En 2h05’43, Mehdi Frère remonte à la deuxième place du bilan national de tous les temps derrière le record de France de Morhad Amdouni (2h05’22).
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Son état de forme du moment et sa préparation sérieuse semblaient en mesure de lui permettre de repartir de la côte sud-est de l’Espagne avec un chrono de tout premier plan. Pour la troisième fois en un an, Nicolas Navarro (14e) s’est acquitté du niveau de performance requis pour Paris 2024. L’athlète de la SCO Ste Marguerite a coupé la ligne d’arrivée dix secondes après Mehdi Frère en 2h05’53, abaissant de près d’une minute son record (2h06’45 à Séville en 2023). Au prix d’une remarquable fin de course, Félix Bour (16e) a impressionné pour mettre une claque à son record personnel : 2h06’46, c’est quatre minutes de mieux (2h10’43) qu’il y a un an ici-même.
La matinée bleue s’est prolongée sous les auspices de Morhad Amdouni (17e en 2h06’55), recordman de France du marathon en 2h05’22 depuis 2022 à Paris, et de Benjamin Choquert (26e en 2h07’42, ancien : 2h09’26 à Valence en 2022) qui ont aussi pris le train en marche pour s’affranchir des minima olympiques. Comme d’habitude, il y aura trois athlètes français maximum retenus sur marathon. D’autres belles performances ont émaillé le Marathon de Valence, à l’instar de Michaël Gras (32e en 2h08’40), Emmanuel Roudolff-Lévisse (40e en 2h09’38) et Valentin Gondouin (45e en 2h10’58), pour son baptême sur la distance, qui complètent ce quintet record.
Un festin de chronos
Ils étaient exactement 4662 Français (2e délégation derrière les 13 000 Espagnols) à avoir sacrifié la grasse matinée du dimanche matin pour vivre ce Marathon de Valence. Parmi eux, ils sont plusieurs à avoir brillé, profitant des conditions idéales et de l’atmosphère toujours spéciale de la ville, pour réaliser d’excellents chronos. Soulignons les performances de Jason Pointeau (2h13’00), Alexis Godefroy (2h13’29), Freddy Guimard (2h13’56), Riad Guerfi (2h14’18), Maxime Lopez (2h15’20), Krilan Le Bihan (2h15’30), Clément Leduc (2h15’38) et Julien Navarro (2h15’45). Du côté des dames, Émilie Jacquot-Claude (2h31’54), Agate Violleau (2h35’03), Virginie Barrand (2h35’25), Mathilde Sénéchal (2h35’44), Salomé Brun (2h36’12), Augustine Emeraux-Lombard (2h36’36), Léa Navarro (2h36’47), Chloé Reitz (2h37’10) et Alice Michel (2h39’13) ont réalisé le meilleur temps de leur carrière.
Sisay Lemma et Worknesh Degefa étaient les plus forts
En tête de peloton, la palme est revenue à l’Éthiopien Sisay Lemma en 2h01’48, s’emparant pour cinq secondes du record du tracé de Kelvin Kiptum (2h01’53 en 2022) et s’élève au quatrième rang des marathoniens les plus rapides du monde derrière Kiptum (2h00’35), Eliud Kipchoge (2h01’09 en 2022) et Kenenisa Bekele (2h01’41 en 2019). Le vainqueur du marathon de Londres 2021 a devancé le Kényan Alexander Mutiso (2e en 2h03’11) ainsi que ses camarades Dawit Wolde (2h03’48) et Kenenisa Bekele (2h04’19, premier homme à 40 ans et plus à descendre sous les 2h05). À l’heure de faire les comptes, 40 coureurs sont passés sous la barre des 2h10 (contre 24 en 2022).
Chez les femmes, la victoire n’a pas échappé à l’Éthiopienne Worknesh Degefa qui a rallié la ligne d’arrivée après 2h15’51 d’effort, et est accompagnée sur le podium par ses coéquipières Almaz Ayana (2h16’22) et Hiwot Gebrekidan (2h17’59).
Tous les résultats du Marathon de Valence 2023, en cliquant ici.
Crédits photos : Antoine Decottignies / STADION