Marathon de Paris : Record de France pour Morhad Amdouni en 2h05’22

03 avril 2022 à 14:57

Dix neuf ans après les 2h06’36 de Benoît Zwierzchiewski au même endroit en 2003, Morhad Amdouni a établi un nouveau record de France sur le Marathon de Paris ce dimanche dans le temps canon de 2h05’22, en terminant troisième derrière les Éthiopiens Deso Gelmisa (2h05’07) et Seifu Tura (2h05’10). Côté féminin, succès de la Kényane Judith Jeptum qui a survolé la course en 2h19’48, record de l’épreuve pulvérisé. Récit de cette superbe 45e édition où plus de 35 000 participants ont déboulé dans les rues de la Capitale !

Vous ne pourrez pas dire que l’on ne vous avait pas prévenu. Le plateau Elite concocté aux petits oignons par les organisateurs pouvait nous faire penser qu’on allait assister à une course « d’enfer ». Mais de là à penser que le record de l’épreuve chez les dames allait tomber, de là à penser que le record de France chez les hommes allait tomber… on ne se serait pas risqué à de tels pronostics ! C’est dans la fraîcheur, alors que le thermomètre n’était pas loin de 0 degré, mais sous les premières lueurs de soleil, que les 35 000 coureurs étaient prêts à s’élancer un peu avant 8h ce matin pour le premier SAS de départ depuis les Champs-Élysées. Loin, très loin devant l’incroyable marée humaine sur la plus belle avenue du monde pour une photo qui vaut toujours le coup d’œil, une autre course a mis aux prises des « avions ». Reste que quelques jolis chronos ont été réalisés. Tout le monde n’était pas là pour « rigoler ». Non mais !

Morhad Amdouni, marathonien capital

On le savait en pleine forme, on n’imaginait tout de même pas qu’il était capable d’un tel exploit. Dans la foulée de sa démonstration aux Championnats de France de cross-country il y a quatre semaines aux Mureaux, Morhad Amdouni a confirmé qu’il était à son aise sur le macadam parisien. Il y a deux ans à Paris, le fondeur de 33 ans avait impressionné en se classant premier Tricolore et huitième au scratch dans le temps de 2h09’14 pour son premier marathon. On n’avait encore rien vu : Il a avalé le parcours à la vitesse de l’éclair, sous les applaudissements d’un public chaud, 2h05’22 après le coup de pistolet du départ ce dimanche, nouveau record de France de la spécialité. « Je suis très heureux, ça fait du bien ! », nous explique-t-il en zone mixte quelques minutes après l’arrivée. Les passionnés de running connaissaient sans doute le talent du sociétaire du Val d’Europe Athlétisme. Ce dimanche , ils ont pu l’admirer de près. « Je remercie toutes les personnes au bord du parcours qui m’ont soutenu, ça fait vraiment du bien. J’ai remis la Tour Eiffel à sa place ! »

Accélération au 34e km

Bonnet vissé sur la tête, gants aux mains, manchons aux bras et les Nike Air Zoom Alphafly Next% « Ekiden » aux pieds, Morhad Amdouni a rapidement pris les commandes du peloton de tête, histoire de montrer à ses rivaux du jour qu’il faudra compter avec lui (14’59 au 5e km et 29’45 au 10e km). « Je me suis dès le début mis aux avant-postes pour prouver qu’en France il y a des marathoniens qui peuvent briller ». Après un passage au semi en 1h02’32 (sur les bases de 2h05’04), un groupe de dix coureurs s’était détaché, comprenant Amdouni et une armada éthiopienne de huit athlètes. La course s’est animée au km 34 lorsque l’Éthiopien Deso Gelmisa plaçait une première accélération, étirant considérablement le peloton de tête, avec dans sa roue Seifu Tura, le futur vainqueur. Seul Amdouni, grimaçant, arrivait encore à s’accrocher mais accusait 25 mètres de retard. Le champion d’Europe du 10 000 m en 2018, qui s’entraîne depuis quelques semaines sous la férule de Jean-Claude Vollmer, a remis un coup de boost dans les deux derniers kilomètres, de quoi sceller définitivement sa troisième place. Son immense joie à l’arrivée traduisait juste son bonheur de briller devant les siens. Une course que le Corse d’origine a quasiment réalisée en « negative split » comme diraient les aficionados (1h02’32 puis 1h02’50).

« Je n’aurai jamais imaginé qu’il puisse tenir aussi longtemps »

En 2003, ici-même à Paris, Benoît Zwierzchiewski avait claqué en 2h06’36 la meilleure performance européenne de tous les temps, en terminant deuxième, derrière le Kényan Mike Rotich, qui a pulvérisé le record de l’épreuve à l’époque (2h06’33). Benoît Z s’est empressé de féliciter son successeur, et de souligner toutes ses qualités à notre micro : « Je suis vraiment fier et honoré que Morhad ait été chercher ce record parce que c’est un athlète complet et d’exception. J’ai eu l’occasion de commenter la course sur France 3 et je n’ai cessé de dire tout le bien que je pense de lui. Je n’aurai jamais imaginé qu’il puisse (le record) tenir aussi longtemps ! Morhad a effectué des séances à l’entraînement qui laissaient entrevoir une grosse performance et il a concrétisé. Bravo à lui car si pour moi le Marathon de Paris est un marathon rapide, ça laisse présager de belles choses pour lui et peut-être le record d’Europe (détenu par le Belge Bashir Abdi en 2h03’36 à Rotterdam en 2021, ndlr). »

Deso Gelmisa au finish

Alors que certains des concurrents engagés attendaient encore patiemment dans les SAS, l’Éthiopien Deso Gelmisa a coupé la ligne en vainqueur en 2h05’07, proche du record de l’épreuve (2h04’21) détenu depuis le 14 octobre 2021 par le Kényan Elisha Rotich. Passé l’Avenue Foch et la banderole d’arrivée, au terme d’un final haletant dans la dernière ligne droite avec son coéquipier Seifu Tura (2h05’10), troisième du Marathon de Paris 2021, il aurait tout aussi bien pu prolonger sa course jusqu’à l’Arc de Triomphe ! « Les conditions météo étaient difficiles mais je suis très content de ce que j’ai produit aujourd’hui et bien sûr de la victoire », s’est félicité Deso Gelmisa qui a dynamité la course au 34e km.

2h11’52 pour la première de Julien Wanders

Ses débuts étaient très attendus ! Avant ce dimanche 3 avril, les passionnés de running s’interrogeaient : Julien Wanders avait-il les capacités physiques et mentales pour devenir un grand marathonien, après avoir claqué des chronos de mutant sur les distances inférieures ? On pouvait s’attendre à un gros chrono, mais encore fallait-il le réaliser car le tempo devait être assuré, la météo clémente, et un organisme d’immense champion qui allait se confronter pour la première fois à ce terrible effort. Invité à ouvrir son compteur dans les rues de Paris, le franco-suisse de 26 ans est allé au bout de lui-même pour sa première expérience. Malgré sa méconnaissance de l’épreuve, le recordman d’Europe du 10 km (27’13 en 2020) et du semi-marathon (59’13 en 2019) a été dans le rythme dans la première partie de course, pour un premier semi-marathon bouclé en 1h04’00 (bases de 2h08), malgré des ennuis gastriques qui l’ont contraint à faire deux passages aux toilettes, chacun d’une trentaine de secondes.

L’athlète de l’Entente Athlétique de l’Arve (Haute-Savoie) ne s’est ensuite plus ravitaillé jusqu’au 35e km. Dans ces conditions, Julien Wanders a bouclé sa course dans un temps très respectable de 2h11’52, mais en dessous de son objectif chronométrique situé entre 2h06 et 2h10. Il a terminé l’épreuve en hypoglycémie et avec un début d’hypothermie, qui ont nécessité qu’il aille se faire requinquer dans la tente sanitaire à l’arrivée. Pour la petite étincelle, il faudra donc attendre quelques temps. En somme, à l’image de l’abnégation que requiert la discipline elle-même… Pour info, Wanders portait les Asics MetaSpeed Sky 2 durant l’épreuve, qui seront disponibles sur le marché dans quelques semaines.

Les Français n’étaient en nombre au départ de cette 45e édition du Marathon de Paris, mais la qualité certainement. Seizième en 2h10’55 Michaël Gras a renvoyé au fond de la cave son record personnel de 2h16’12 réalisé à Francfort (Allemagne) en 2017. On peut citer aussi les 2h16’43 de Gaëtan Cals (22e), les 2h17’24 de Mohamed Serghini (23e) et les 2h17’51 de Florian Caro (24e). Le recordman d’Europe du 5 km (13’18) Jimmy Gressier a fait office de lièvre de luxe jusqu’au 25e km pour Dorian Louvet, finaliste de l’édition 2020 de l’émission Koh Lanta, lequel a rallié la ligne d’arrivée au 35e rang en 2h27’49. Bien évidemment, comment ne pas souligner la performance du Français Julien Casoli dans la course handisport en fauteuil qui s’est imposé en 1h38’35 pour la cinquième fois à Paris, dix ans après sa première victoire en 2012.

Une première femme sous les 2h20 à Paris !

Côté féminin, bien que partie sur des bases idoines (5e km en 16’08 et 10e km en 32’23), la Kényane Judith Jeptum s’est muée en fusée pour réussir l’exploit de faire tomber le record de l’épreuve détenu depuis 2017 par sa compatriote Purity Rionoripo (2h20’55). La vainqueure du Marathon d’Abou Dhabi 2021 a pris la poudre d’escampette à partir du 25e km pour ensuite faire un cavalier seul jusqu’à la ligne d’arrivée. Judith Jeptum a devancé les Éthiopiennes Fanti Jimma (2h22’52), et Besu Sado (2h23’16). Quatorzième en 2h35’13, Émilie Jacquot-Claude s’est parée du titre honorifique de première Français. Elle a bien géré son effort, remplissant avec brio son objectif, en approchant les 2h35, nouveau record personnel. Marjolaine Nicolas (2h35’43) et Anaïs Quémener (2h37’26) ont également donné satisfaction.

Nouveau succès populaire

Alors que nous finissons la rédaction de ce compte-rendu en tribune de presse, le chronomètre en haut de l’arche tourne depuis déjà plus de quatre heures et les arrivées continuent de se succéder. C’est le moment où cette course emblématique prend une saveur toute particulière. Les incroyables performances des fondeurs des hauts plateaux n’en ont pas pour autant fait oublier les efforts des milliers d’anonymes qui ont aussi réalisé un exploit en franchissant la ligne d’arrivée. Une vraie fierté pour ceux que l’on appelle les « Finishers ». Pour beaucoup d’entre eux, apercevoir l’Arc de Triomphe et réussir à boucler les 42,195 km représente un défi tout aussi exceptionnel que celui de franchir la distance en un peu plus de 2 heures pour un coureur de calibre planétaire comme Morhad Amdouni. Des champions aux néophytes, l’épreuve marque les esprits de tous ceux qui y participent !

Tous les résultats du Marathon de Paris, en cliquant ici.

Crédits photos : Julie Fuster / STADION

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