Malgré une douleur persistante au dos, Duncan Perrillat a conquis son premier titre national en étant couronné champion de France de marathon en 2h17’41 à Deauville ce dimanche. Déjà sacrée en 2016, Anaïs Quemener est aussi montée sur la plus haute marche du podium chez les féminines en 2h40’37. Le Kenyan Titus Kirwa Komen (2h16’19) et l’Éthiopienne Chaltu Negasa (2h32’53) se sont imposés au scratch. Stadion était en immersion au coeur du peloton de tête à moto. Les quelques fortes averses n’ont pas entamé notre passion tout au long du parcours. On vous raconte tout !
Les artistes étaient de sortie dimanche matin sur les Planches de Deauville. Ce ne sont toutefois pas ceux à qui vous pensez ! Oubliez les stars du Festival du Cinéma Américain, Clint Eastwood, George Clooney, Johnny Depp, Sharon Stone et Nicole Kidman. L’opus 2022 de la série « Championnats de France de marathon » auquel nous avons assisté a proposé un scénario plutôt passionnant mais prévisible avec deux personnages principaux incarnés par Duncan Perrillat et Anaïs Quemener. Passionnant, mais prévisible. Ces quelques mots pourraient suffire à décrire et expliquer ce rendez-vous national. En découvrant le casting de cette saison, à moins d’une défaillance ou d’un problème musculaire des deux fondeurs tricolores, on ne voyait pas qui pouvait les empêcher de ceindre la couronne au vu de leur belle forme du moment.
Touché mais pas coulé
Le film avait pourtant toutes les raisons de virer au nanar pour Duncan Perrillat. Débarqué amoindri dans la station balnéaire normande par une douleur en bas du dos près de l’os iliaque, le pensionnaire du Neuilly-Plaisance Sports a songé plusieurs fois abandonner durant la course. « L’essentiel est assuré, je voulais être champion de France. Ce n’était vraiment pas gagné parce qu’hier j’étais en 6 min par kilomètre lors du footing, c’était l’enfer. Hier soir et ce matin, j’étais obligé de prendre des anti-inflammatoires parce que sinon je ne pouvais pas prendre le départ. Je ne me suis pas échauffé et je me suis dit on verra ce que ça donne. J’ai eu mal tout le long mais c’était soutenable ».
Alors qu’ils étaient encore sept dans le peloton de tête après le premier semi-marathon (1h08’18, sur les bases de 2h16’36), Duncan Perrillat a légèrement décroché pendant une dizaine de kilomètres, alors que les premières averses faisaient leur apparition. « Je ne me suis pas affolé mais j’ai pris le départ en étant pas « dans un état d’esprit de malade ». Lors de l’entame du deuxième tour, ça commençait à ne pas être foufou. J’ai l’habitude de courir seul et de courir au train donc progressivement j’ai recollé ». C’est réellement juste après le passage au 30e km (1h37’19), là où les organismes sont mis à rude épreuve, que les choses sérieuses ont commencé. Et c’est justement Duncan Perrillat, le couteau entre les dents qui a « planté » une partie de ses adversaires. « Ça a commencé à sauter et je me suis retrouvé avec les deux étrangers mais je suis le premier français, ça m’a rassuré. À trois kilomètres de l’arrivée, j’avais vraiment mal et je me suis dit que ça allait être dur d’aller au bout. Vers la fin, je vois que ça remonte mais j’arrive à accélérer juste ce qu’il faut pour gagner. »
Avant de rejoindre les Planches, passage par Saint-Arnoult où on a assisté à l’une des images fortes de la matinée : Plusieurs participants du marathon ont pris un tour dans la vue par les trois fuyards qui prenaient sans cesse du champ sur un peloton véritablement mis KO. Ils les encouragent et tapent dans leurs mains quand ils les voyaient passer le dos, avec une petite phrase pour les plus rigolos : « Ce n’est pas du jeu, vous êtes partis avec de l’avance ! » ou parfois s’adressaient directement à nous : « Je peux monter sur la moto ? ». À l’heure où le vent se faisait plus fort, à mesure qu’il fallait accélérer pour prendre du champ et rejoindre l’arrivée, il était temps de rallier la ligne pour mettre fin à cette belle escapade. Quelque peu réchauffé par la clameur d’une foule dense.
Une arrivée de toute beauté sur les Planches
Voilà le moment tant attendu, la dernière ligne droite sur les mythiques Planches, bordée par la plage d’un côté, ses dizaines de cabines de bain de l’autre. Si la victoire revient au Kenyan Titus Kirwa Komen (record de l’épreuve en 2h16’19), la deuxième place est obtenue par Alaâ Hrioued (2h16’37), le Marocain pensionnaire du Coquelicot 42, qui a triomphé lors des deux premières éditions (2019 et 2021). Vient ensuite l’image du sacre qui est belle, celle des bras levés d’un champion affichant sa joie et qui a serré les dents pendant plus de deux heures pour franchir le premier tricolore la ligne d’arrivée. « Je suis déçu de ne pas avoir gagné la course mais je suis content d’être champion de France et je suis très content d’avoir fini vu l’état dans lequel je suis », positive Duncan Perrillat.
Une victoire que le fondeur de 29 ans savoure d’autant plus qu’il prend une revanche sur sa disqualification de l’année dernière qui l’avait privé du titre, récupéré par le Dijonnais Alexandre Bourgeois, au motif qu’il ne portait pas le maillot de son club, comme l’exige le règlement de la FFA. Il est de coutume que les actrices et acteurs viennent sur les Planches inaugurer leur nom qui est peint en lettres noires sur les lices qui séparent les cabines de plage. Toute proportion gardée, c’est un peu l’Hollywood Boulevard « à la française ». Néanmoins, il n’est malheureusement pas à l’ordre du jour que Duncan Perrillat inaugure sa propre cabine. Le champion d’Europe par équipes de cross-country à Dublin l’hiver dernier a devancé les épatants Aurélien Olivier (2h17’45) et Gabriel Briand (2h18’17).
Anaïs Quemener, six ans après
Si l’Éthiopienne de l’Amicale Athlétisme du Roumois Chaltu Negasa n’a laissé aucune chance à ses adversaires pour la victoire chez les dames en 2h32’53 (record de l’épreuve), Anaïs Quemener n’est toutefois pas venue en villégiature pour profiter du magnifique parcours normand et a revêtu une fois de plus l’écharpe bleu-blanc-rouge. Une belle satisfaction pour la jeune femme de 31 ans au sourire communicatif après la course, qui s’est offert un deuxième titre national sur marathon et a donc obtenu exactement ce qu’elle était venue chercher, la médaille d’or. « Je suis vraiment très heureuse, confie à l’arrivée l’athlète licenciée au club francilien de la Meute Running. J‘étais sur mes allures, en passant avec 30 secondes d’avance sur mon passage au semi-marathon (1h17’41). Dès le début de la seconde partie de course, on s’est pris une grosse pluie mais jusqu’au 32e km ça a été. À partir de là, ça a été doucement la descente aux enfers. J’ai un peu subi mon rythme de départ mais bon j’ai essayé de limiter la casse et de rester sur mon objectif de moins de 2h40. Je n’ai pas réussi à faire moins de 2h40, réalisant 2h40’37. Désormais, focus sur la saison de cross puis sur le marathon de Paris en avril. »
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Il y a sept ans en 2016, Anaïs Quemener avait réalisé un impressionnant cavalier seul en terre tourangelle en s’imposant dans le temps de 2h55’26, avec 1 minute et 22 secondes d’avance sur sa première dauphine, Nathalie Tavernier (2h56’48). C’est une nouvelle victoire sans conteste avec près de 10 minutes d’avance sur sa dauphine. En effet, Alexandra Droulin (2h50’05, titrée en Master) et Leila Le Coquet (2h52’09) s’installent sur la deuxième et troisième place.
De la pluie sur la course, mais du soleil dans les cœurs
Revu pour cette troisième édition, le circuit est désormais plus roulant. Tracé en deux boucles, chacune affichant 50 mètres de dénivelé seulement, le parcours a mené les coureurs à travers les communes de Deauville, Saint-Arnoult, Tourgéville et Benerville-sur-Mer ainsi que les sites incontournables du territoire de Deauville : le casino, les deux hippodromes de Deauville-La Touques et de Deauville-Clairefontaine, ou encore les haras environnants. Les efforts des coureurs ont été récompensés par une dernière ligne droite le long de la plage puis sur les Planches de Deauville entre de nombreux spectateurs.
Tout au long du tracé, qui était en forme de deux boucles de 21 km environ, il fallait d’abord voir ces sourires. Apprécier ces nombreux gestes de la main d’un public tout simplement heureux d’être au bord du circuit pour acclamer les forçats de la route. Assis sur le siège passager d’une moto, plusieurs sens étaient mis en éveil. La vue, tout d’abord, avec ces marées humaines amassées sur des trottoirs. Le public était partout, passant parfois la tête par la fenêtre de leur habitat ou à travers la haie de leur jardin. L’ouïe, ensuite, avec cette clameur qui se devine à mesure que l’on s’approche et qui se fait de plus en plus forte au moment de passer, ou encore avec les musiques de rock, appréciées par les mélomanes.
Si la pluie a épargné les coureurs durant la première heure, elle s’est bien rattrapée sur la suite de la course. Il a fallu beaucoup de courage aux participants trempés jusqu’aux os pour tenir le rythme. Qu’importe la pluie, le soleil était dans les cœurs et la bonne humeur dans le peloton des coureurs et sur les points de ravitaillement. À l’arrivée, les coureurs se refaisaient la course dans leur tête, soulagés d’être arrivés mais avec déjà dans un coin de tête l’excitation de la prochaine participation. Au total, ce sont près de 1500 finishers qui ont bouclé fièrement les 42,195 km, un challenge que certains se voient déjà retenter l’an prochain, en espérant cette fois-ci que les éléments météo seront un peu plus cléments !
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Crédits photos : STADION