Parler de revanche serait-il ostentatoire pour Jakob Ingebrigtsen ? Le couteau entre les dents après deux premières places laissées aux Britanniques Jake Wightman en 2022 à Eugene puis Josh Kerr l’an passé à Budapest, le Norvégien n’a qu’une envie : décrocher l’or olympique au Stade de France pour la deuxième fois de rang sur la distance. Mais Kerr ne se laissera pas faire et garde toutes les chances de son côté. Leurs confrontations passées ont déjà captivé le monde de l’athlétisme, et leur duel à Paris promet d’être davantage spectaculaire. Mais le combat a déjà débuté bien avant, que ce soit sur les réseaux sociaux, par médias interposés ou lors des conférences de presse des veilles de course. Et évidemment, ces « affrontements » ont de quoi faire monter la sauce auprès des fans. Nul doute qu’ils seront nombreux devant leur télévision pour observer la finale du 1500 m le 6 août.

« Je ne suis pas là pour apaiser les tensions, je suis là pour courir un mile fantastique. Nous sommes deux compétiteurs féroces qui veulent être les meilleurs du monde, et ça ne va pas changer, peu importe les commentaires ou les déclarations hors contexte », avait indiqué avant la course Kerr le 24 mai lors de la conférence de presse de la Diamond League de Eugene où les deux fondeurs n’avaient pas échangé un regard. « Je veux être le meilleur du monde, je l’ai réussi l’an dernier, et je vais continuer. Ça peut embêter des gens ou irriter des concurrents, c’est normal, on essaie tous d’être au sommet. »

#WorldAthleticsChamps | 🥇 Quelle course ! Josh Kerr 🇬🇧 et Jakob Ingebrigtsen 🇳🇴 se sont livrés un formidable combat sur le 1500 m ! C'est le Britannique qui l'emporte devant le Norvégien. Azeddine Habz 🇫🇷 termine 11e.

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Intraitable cette année sur 1500 m, Jakob Ingebrigtsen a notamment ébloui de son talent le Meeting Herculis de Monaco en claquant le sixième chrono de l’histoire de la spécialité, avec 3’26″73, à un peu plus de sept dixièmes du record du monde d’Hicham El Guerrouj (3’26″00 en 1998 à Rome). Sur la piste monégasque, le détenteur du record du monde en salle (3’30″60 à Liévin en 2022) s’est même payé la meilleure performance européenne de tous les temps qui lui était déjà attribuée (ancien : 3’27″14 à Chorzow en 2023). Autant dire que la confiance du gamin de Sandness est au maximum.

Celle de son opposant britannique ne se situe pas au même curseur. La raison ? Il n’a pris part à aucun 1500 m en 2024 mais s’est rassuré sur Mile (1696 m), chronométré en 3”45″34 lors d’une impressionnante course à Eugene le 25 mai dernier, et en devançant… Jakob Ingebrigtsen, deuxième en 3’45″60. Le titre mondial en salle sur 3000 m en mars dernier n’a fait que conforter la stature du demi-fondeur né à Edimbourg (Ecosse).

Jakob Ingebrigtsen a montré une capacité exceptionnelle à dominer les courses tactiques avec son mélange unique de vitesse et d’endurance. Sa régularité et son palmarès impressionnant en font un favori pour les JO de Paris 2024. Le principal défi pour Ingebrigtsen sera de maintenir son niveau face à une concurrence de plus en plus féroce et de gérer la pression qui accompagne son statut de champion olympique en titre. Attention que le Norvégien ne réitère pas ses erreurs passées comme en Hongrie lorsqu’il avait coincé par manque de jus dans les derniers mètres, ce qui avait profité à Josh Kerr.

Le Britannique, lui, excelle dans les situations où une course se décide dans les derniers mètres, grâce à son kick final imposant. Sa victoire aux Championnats du monde 2023 démontre qu’il est capable de battre les meilleurs sur la plus grande scène. Après une carrière universitaire réussie aux États-Unis, l’Ecossais a rapidement gravi les échelons de l’athlétisme mondial, se positionnant comme un sérieux prétendant aux médailles. Un premier titre olympique à la clé ?

Ingebrigtsen et son expérience du haut niveau malgré ses 23 ans sait ce qu’il faut faire pour gagner lors des grands événements. Le palmarès du viking norvégien peut donner froid dans le dos à son adversaire. Champion olympique du 1500 m en 2021, double champion du monde du 5000 m (2022 et 2023), quadruple champion d’Europe (deux fois sur 1500 m et deux fois sur 5000 m en 2018 et 2022), quintuple champion d’Europe en salle, et double champion d’Europe de cross-country. Et nous n’avons même pas abordé son record du monde du 2000 m en 4’43″13… Rien que ça.

Dans le camp britannique, Josh Kerr s’est paré de bronze sur 1500 m au JO de Tokyo en 2021 avant de décrocher le plus gros titre de sa carrière aux Mondiaux de Budapest 2023. Chez lui à Glasgow, il décroche un précieux sacre mondial en salle sur 3000 m en 7’42″98 et tend à faire vaciller son armoire à trophée.

🇳🇴 Le Norvègien prend le meilleur dans le dernier tour sur Timothy Cheruiyot et bat le record olympique en 3’28’’33. Le Britannique Josh Kerr complète le podium.

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Les confrontations entre ces deux grands ennemis ont créé, au fil des années, une rivalité passionnante dans le monde du 1500 m. Ingebrigtsen, avec son palmarès impressionnant et sa constance, est souvent vu comme le grandissime favori, mais Kerr a prouvé qu’il pouvait le battre, notamment lors des Mondiaux 2023. Plusieurs scénarios pourraient avoir lieu en finale. Dans une course tactique, où le rythme est lent au début pour s’accélérer progressivement, Kerr pourrait avoir l’avantage avec son puissant sprint final.

Si la course reste serrée jusqu’aux 200 derniers mètres, le Britannique a montré qu’il pouvait surprendre et dépasser ses adversaires dans un finish serré. Mais si la course part rapidement dès le départ, Ingebrigtsen pourrait être avantagé grâce à sa capacité à maintenir un rythme soutenu sur toute la distance. Son endurance et sa régularité à des vitesses élevées pourraient lui permettre de creuser un écart décisif avant le sprint final. Un dernier plan de course que la rédaction de Stadion privilégierait pour la quête de médaille d’or qui filerait une nouvelle fois dans les bras du Norvégien. Qui passera la ligne d’arrivée en premier ? Réponse le 6 août prochain.

Alors que le programme le permet, Jakob Ingebrigtsen est également en lice sur 5000 m (séries le 7 août à 11h00, finale le 10 août à 20h00).

Texte : Dorian Vuillet
Crédits photos : Solène Decosta / STADION