Le Kényan Kelvin Kiptum, proche de battre le record du monde d’Eliud Kipchoge à Londres en avril dernier (2h01’09 contre 2h01’25), sera au départ du Marathon de Chicago ce dimanche 8 octobre 2023. Avec un chrono à couper le souffle au bout ? On fait le point.
Il existe en athlétisme des records mythiques. Des frontières qui semblent infranchissables et ressemblent à des limites humaines, jusqu’au jour où elles sont effacées. Dans cette logique, on imagine sans peine que Kelvin Kiptum sera en capacité de battre le record du monde du marathon d’Eliud Kipchoge. Seize secondes : C’est ce qu’il a manqué au fondeur kényan de 23 ans à l’arrivée sous les fenêtres de Buckingham Palace pour expédier aux oubliettes les 2h01’09 (Berlin en 2022) sur marathon du roi du macadam. Le 23 avril dernier à Londres, Kelvin Kiptum a posté un ébouriffant 2h01’25, signant ainsi le deuxième temps de l’histoire sur 42,195 km. Kiptum n’a rien d’un illustre inconnu : Pour son premier marathon à Valence le 4 décembre 2022, il s’était distingué avec un temps de 2h01’53, devenant déjà le troisième homme le plus rapide de l’histoire de la discipline derrière son compatriote et l’Éthiopien Kenenisa Bekele (2h01’41 en 2019 à Berlin).
« Préparez-vous pour le spectacle »
Kelvin Kiptum apparaît comme le digne héritier d’Eliud Kipchoge mais ne semble pas avoir envie d’attendre son tour et encore moins de vivre dans l’ombre d’un tel monument. Les deux fusées kényanes, qui pour l’instant se livrent des duels à distance, ne devraient pas se retrouver sur la même ligne de départ avant le très attendu marathon des Jeux olympiques de Paris 2024. Sur ses deux marathons (Londres et Valence), le natif d’Eldoret s’est imposé en solitaire, en attaquant à chaque fois autour du 32e kilomètre. Dans la capitale anglaise, l’élève de Gervais Hakizimana (coach rwandais) était passé en 1h01’40 au semi-marathon et avait donc bouclé son effort en negative split, avec un deuxième semi supersonique (59’45).
Toutefois, Kelvin Kiptum n’a couru qu’une seule fois cette année, c’était à Londres. Il est donc difficile de juger de sa forme actuelle à Chicago ce dimanche. S’il est en pleine possession de ses moyens, celui qui se prépare une grande partie de l’année à Kapsabet, un spot idéal pour la course à pied dans la région du Rift au Kenya, sera difficile à déloger de la première place. « Je me dirige vers le marathon de Chicago Bank of America 2023. Préparez-vous pour le spectacle », a-t-il annoncé sur sa page Facebook, promettant une course incroyable.
Une rude adversité à Chicago
Son camarade d’entraînement Benson Kipruto (dossard 1), vainqueur du Marathon de Chicago en 2022 (2h04’24) et du Marathon de Boston en 2021 (2h09’51), ne le laissera pas lui prendre sa couronne si facilement. L’Éthiopien Seifu Tura, souverain en 2021 à Chicago en 2h06’12, connaît aussi la recette pour grimper sur la plus haute marche du podium. Le Belge Bashir Abdi, recordman d’Europe en 2h03’36 (Rotterdam en 2021) ainsi que médaillé de bronze aux JO de Tokyo en 2021 puis aux Mondiaux de Eugene en 2022, sera un adversaire coriace. Le record du parcours détenu par Dennis Kimetto depuis 2013 en 2h03’45 est en très grand danger. À noter que le meilleur chrono d’Eliud Kipchoge sur le tracé de Chicago est de 2h04’11, établi en 2014.
Selon vous, Kelvin Kiptum peut-il réussir à battre le record du monde du marathon ? Pour cela, il faudra que toutes les planètes soient complètement alignées et qu’il soit dans un très grand jour. 42,195 km en 2h01’09, cela représente une vitesse moyenne de 20,9 km/h ce qui donne 2’52 par kilomètre…
Ruth Chepngetich pour la passe de trois
Quatre records du monde ont été réalisés sur le Marathon de Chicago. Le dernier en date a été établi en 2019 par la Kényane Brigid Kosgei en 2h14’04, battu depuis par Tigist Assefa en 2h11’53 à Berlin. Le parcours de cette épreuve emblématique est propice aux performances et réputé pour être l’un des plus rapides au monde. Ne comptez pas sur Ruth Chepngetich pour vous dire le contraire. La Kényane de 29 ans a remporté les deux dernières éditions avec 1’49 d’avance en 2021 (2h22’31) puis 4’11 d’avance en 2022 (2h14’18) sur sa dauphine.
L’an passé, la championne du monde de Doha en 2019 était partie sur une cadence très élevée, avec un passage au semi-marathon en 1h05’44 (sur les bases de 2h11’28), une bonne minute plus vite que le semi le plus rapide dans un marathon féminin, signé Mary Keitany (1h06’54). À titre de comparaison, lorsque Brigid Kosgei a battu le record du monde, elle était passée en 1h06’59. À l’arrivée, Ruth Chepngetich s’était imposée en 2h14’18, se hissant au troisième rang du bilan planétaire.
Genzebe Dibaba et Sifan Hassan en lice
Deux des plus grandes stars des pistes de la décennie vont croiser le fer pour la première fois dans les rues de Chicago : L’Éthiopienne Genzebe Dibaba (32 ans) et la Néerlandaise Sifan Hassan (30 ans) ont remporté à elles deux 12 médailles mondiales/olympiques entre 2015 et 2023. Pour sa grande première sur 42,195 km, la première citée avait pris la deuxième place à Amsterdam en 2h18’02, venant buter à huit secondes du record de sa grande sœur Tirunesh (2h17’56, à Londres en 2017). La deuxième citée a parachevé sa première incursion sur marathon avec un temps de 2h18’33 à Londres en avril dernier. Alors qu’elle semblait en difficulté après l’heure de course, la fondeuse de 30 ans, qui avait été même contrainte à ralentir pour s’étirer au niveau de la hanche gauche, avait impressionné en rattrapant progressivement son retard sur le groupe de tête. Dans l’ultime ligne droite, elle avait logiquement fait parler son finish pour régler ses rivales au sprint.
La concurrence sera féroce et aussi incarnée par Joyciline Jepkosgei (2h17’43 en 2021 à Londres), Megertu Alemu (2h18’32 en 2022 à Londres), deuxième du marathon de Londres en 2023 en 2h18’37, et l’Américaine Emily Sisson, deuxième du marathon de Chicago en 2022 en 2h18’29. On aura un œil attentif sur le temps de la Française Emeline Delanis qui avait réalisé une belle prestation en 2022 pour sa première apparition sur marathon. La pensionnaire d’Athlé St-Julien 74, qui s’entraîne aux Etats-Unis depuis 2016, avait rallié la ligne située à Grant Park au douzième rang chez les dames (174e au scratch) en 2h32’36 (3’37 de moyenne par km). Chaque année, plus de 45 000 participants prennent le départ du Marathon de Chicago.
Crédit photo : Julie Fuster / STADION