Soirée grandiose au stade Charléty ! Les demi-fondeurs Faith Kipyegon et Lamecha Girma ont écrit une nouvelle page de l’histoire de l’athlétisme au Meeting de Paris en améliorant les records du monde du 5000 m (14’05″20) et du 3000 m steeple (7’52″11). Jakob Ingebrigtsen a fait voler en éclats la meilleure performance mondiale de tous les temps sur le 2 Miles en 7’54″10. Les Français Just Kwaou-Mathey (13″09 sur 110 m haies), Wilfried Happio (48″26 sur 400 m haies), Benjamin Robert (1’43″48 sur 800 m), Léna Kandissounon (1’59″65 sur 800 m) et Margot Chevrier (4,71 m à la perche) ont également brillé devant près de 18 000 spectateurs. Récit !
En toute honnêteté, on a longtemps hésité à savoir lequel de Jakob Ingebrigtsen, Faith Kipyegon et Lamecha Girma allaient illustrer la photo de l’article du Meeting de Paris 2023. Les deux derniers nommés ne nous en voudront certainement pas. Venu dans la Ville Lumière avec l’objectif clair de s’emparer de la meilleure performance mondiale du double miles, Jakob Ingebrigsten peut rentrer en Norvège avec le sentiment du devoir accompli. Alors que l’ancienne marque était détenue depuis 1997 par le Kenyan Daniel Komen, seul homme à être parvenu à descendre sous les 8 minutes (7’58″61 en juillet 1997 à Hechtel, Belgique), le champion olympique du 1500 m à Tokyo a avalé les 3218 m en 7’54″10 ! « C’était une bonne course. Le public a été incroyable ! Sans leur aide, ça aurait été beaucoup plus dur ».
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Moins d’une semaine après avoir battu le record du monde du 1500 m lors de la Diamond League de Florence (3’49″11), la Kényane Faith Kipyegon a encore fait parler son immense talent pour venir s’emparer du record du monde du 5000 m en 14’05″20 ! « Je ne pensais pas du tout au record du monde, je ne sais pas comment j’ai fait ça. Je me suis juste concentrée sur la Wavelight, j’ai essayé d’être relâchée et de profiter de ma course. Quand j’ai vu que j’avais battu le record du monde, j’étais très impressionnée ! Je suis trop contente ! ». Ironie du sort, la double championne olympique du 1500 m s’impose sur l’Éthiopienne Letesenbet Gidey (4’07″94), qui n’est autre que l’ancienne détentrice du record du 5 000 m (14’06″62 en 2020). À l’issue de la course, on cherche nos mots mais ce qui va suivre va nous les faire perdre à tout jamais.
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À l’issue d’une course pleine de maîtrise, où il a rapidement pris les choses en main, se positionnant même devant le lièvre, l’Éthiopien Lamecha Girma s’est offert un nouveau record du monde sur 3000 m steeple. « Je suis très heureux ! Heureux et fier. Le record du monde n’est pas une surprise, je m’étais préparé à le battre ce soir, à Paris. » Grâce à un chrono de 7’52″11, le double vice-champion du monde, déjà détenteur du record du monde du 3000 m en salle lors du Meeting de Liévin en février dernier (7’23″81) efface des tablettes les 7’53″63 de Saif Saaeed Shaheen qui dataient de 2004. Dans la même course, le Français Djilali Bedrani signe un chrono de 8’21″70. « J’étais sur la course du record du monde, c’est une belle expérience ! Pour ma part, je m’attendais à mieux je suis parti un peu ambitieux car je sentais que j’avais les cannes pour y aller. J’ai pris des risques, j’ai tenté aujourd’hui, ce n’est pas passé, mais je reste confiant pour la suite », relativise le vice-champion de France de cross court cet hiver à Carhaix.
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Jimmy Vicaut et Kevin Mayer annoncent la couleur
Dès le pré-meeting, les performances s’emballaient et les athlètes tricolores annonçaient la couleur, à l’instar de Jimmy Vicaut. Victorieux de sa série du 100 m, le sociétaire du Lille Métropole Athlétisme signait un prometteur chrono de 10″06 (+0,2 m/s), égalant ainsi la meilleure performance française de la distance. « Je suis vraiment content. Enfin ça se lâche, ça se libère ! Je suis confiant pour les minima pour Budapest (10″00). Maintenant, il faut bien bosser », annonçait en zone mixte le recordman de France sur la ligne droite (9″86).
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Toujours en pré-meeting, le recordman du monde de décathlon Kevin Mayer se distinguait, à son tour, en remportant le triathlon (2699 points). Bien entendu, l’applaudimètre a été scruté avec attention au moment de sa présentation. « J’ai repris l’athlé vraiment à 100 % la semaine dernière, là j’ai enchaîné trois épreuves en moins de 2h… L’échauffement des haies a duré dix minutes, c’était vraiment court. Pour la première fois de ma vie, j’ai ressenti du lactique. » Malgré cela, le combinard claque le meilleur chrono de sa saison en 13″70). « Je me suis dit « relâche » pour ne pas que ça pète. Je fais 13″70 comme ça, je ne comprends pas. C’est très très prometteur », se félicite-t-il. Le combinard réalise également sa meilleure marque de l’été au lancer de poids, avec tout de même un goût d’inachevé. « Je fais mon record a l’échauffement avec 15,80 m, je me dis « c’est bon, j’ai les 17 mètres » ! Et après je lance n’importe comment parce que je veux trop en mettre. Ce sont des erreurs de début de saison », analyse le double vice-champion olympique, qui a par la suite atterri à 7,26 m (+2,9 m/s) en saut en longueur.
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Just Kwaou-Mathey, juste derrière PML et Doucouré
Mais ils ne sont évidemment pas les seuls à avoir illuminé le Stade de Charléty vendredi. Sur la route des Championnats du monde de Budapest, qui se dérouleront du 19 au 27 août prochain, les Français ont montré de belles choses et le bout de leur nez. La soirée bleue s’est prolongée sous les auspices de Just Kwaou-Mathey ! Après avoir porté son record personnel à 13″27 sur cette même piste l’an dernier, « JKM » a, cette année, commencé par retirer deux centièmes à sa meilleure marque en séries du 110 m haies (13″25). Puis, le médaillé de bronze aux championnats d’Europe de Munich a récidivé en finale avec un temps de 13″09 (-0,5 m/s), le hurdleur de l’Evreux AC a pulvérisé son ancienne marque de dix-huit centièmes, et passe pour la première fois de sa carrière sous les 13″10.
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« C’est extraordinaire ! Je savais que j’étais en forme, mais je ne m’attendais pas à un chrono de cette catégorie ! Je suis très fier d’avoir fait ça à Paris. Je suis très heureux. Je suis très content de ma course, de ma performance et de ma compétition. Ce n’est que le début, il reste encore beaucoup de choses à faire. Je n’ai aucune limite, la saison vient de commencer. ». Il est devenu samedi en moins de temps qu’il ne faut pour le dire le troisième Français le plus rapide de l’histoire sur 110 m haies derrière Pascal Martinot-Lagarde (12″95 en 2014) et Ladji Doucouré (12″97 en 2005).
Toujours sur les haies, mais cette fois-ci sur le tour de piste, Wiflried Happio se classe deuxième d’une course pleinement maîtrisée, et s’offre, lui aussi, sa meilleure marque estivale (48″26). « Je suis dans le programme, ça descend doucement mais sûrement, ça fait plaisir », apprécie le vice-champion d’Europe l’an dernier à Munich. Engagé dans la même course, et pour sa rentrée en la matière, Ludvy Vaillant réalise, quant à lui, un probant chrono de 48″60.
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Le festin de chronos sur 800 m
Dans une course féminine de 800 m ultra rapide remportée par la Britannique Keely Hodgkinson (record national en 1’55″77), la Française Léna Kandissounon est descendue, pour la première fois de sa carrière, sous la barre des deux minutes (1’59″65) ! « J’en voulais vraiment ! J’avais super faim avant la course, tout était très clair et j’étais très sereine ! ». En retranchant près de trois secondes à son ancienne marque (2’02″50), la sociétaire du Haute Bretagne Athlétisme s’offre du même coup les minima pour les championnats du monde de Budapest (fixés à 1’59″80). « Je plane encore ! J’explose mon record et je fais une grosse performance, je suis très très contente ». En coupant la ligne d’arrivée en 2’00″14, Agnès Raharolahy pouvait elle aussi avoir le sourire. La médaillée de bronze des Championnats d’Europe en salle d’Istanbul signe la meilleure performance de sa saison.
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Dernière course de la soirée, mais pas des moindres, le 800 m masculin a permis aux trois Français engagés de réaliser un joli tir groupé. Après avoir longtemps pointé en deuxième position, Benjamin Robert termine finalement cinquième, en améliorant son record personnel ! Le vice-champion d’Europe en salle retranche 27 centièmes à sa meilleure marque, déjà réalisée ici l’an passé (1’43″75), et vient signer un chrono de 1’43″48 ! « Je suis content de ce que j’ai fait, de mon engagement. J’ai montré que je pouvais jouer avec les meilleurs. Je voulais gagner, mais je préfère faire cinquième avec ce chrono là, plutôt que de gagner avec un moins bon chrono ». Respectivement septième et huitième de cette course gagnée par le Kényan Emmanuel Wanyonyi (1’43″27), Azeddine Habz (1’43″90) et Yanis Meziane (1’44″78) étaient eux à leur bonheur d’un record personnel. Déjà acquitté des minima pour Budapest sur 1500 m, Habz s’offre également les minima sur 800 m.
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Minima et record pour Margot Chevrier
« J’ai emmené plein de perches pour demain. J’ai un étui complet et j’en ai même achetées des nouvelles », avouait Margot Chevrier en conférence de presse d’avant compétition. Achats amortis pour la double championne de France de la discipline ! En franchissant une barre à 4,71 m, dès son premier essai, l’élève de Sebastien Reisdorffer efface ses 4,70 m réalisés l’an dernier à Salon-de-Provence, et s’offre les minima pour les championnats du monde de Budapest ! « J’ai eu un échauffement super difficile, mais une fois que je me suis mise dedans, j’ai facilement trouvé mes repères. Le public était incroyable ! Quand il y a 18 000 personnes qui crient ton nom et qui font la clap, forcément c’est plus facile, savoure la perchiste qui termine deuxième du concours derrière l’Australienne Nina Kennedy (4,77 m), et devant la championne du monde en titre américaine, Katie Moon. J’ai fait le taf pour la suite de la saison, je peux continuer tranquillement et à tête reposée. »
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Texte : Emeline Pichon et Alessia Colizzi
Crédits photos : STADION