Interview de Cindy Bourdier et Alexandre Selles, deux étudiants athlètes dans la célèbre université de LSU

15 novembre 2022 à 16:09

Tous deux spécialistes du 800 m, Cindy Bourdier, championne de France espoirs 2022, et Alexandre Selles, vice-champion de France espoirs 2022, se sont laissés tenter par les Etats-Unis où ils poursuivent leurs études tout en étant athlète des « Tigers » au sein de l’Université d’État de Louisiane. Dans cet entretien, les demi-fondeurs franciliens nous racontent leurs premiers pas sur le sol américain et évoquent leur avenir, avec l’équipe de France dans un coin de leur tête.

Vous avez fait le choix de partir à deux aux États-Unis, pouvez-vous nous expliquer la genèse du projet ?

Alexandre et Cindy: La première impulsion vient de Cindy qui devait faire au moins un semestre à l’étranger pour valider son diplôme d’ingénieur. Elle a donc pensé au double projet aux États-Unis qui était le meilleur compromis entre études et sport de haut niveau, sans oublier l’aventure humaine. En suivant le début des discussions avec Martin, directeur de l’agence Elite Athletes, j’ai (Alexandre, ndlr) voulu moi aussi tenter l’aventure parce que je ne voulais pas terminer mon diplôme en France. Avec Sciences Po, j’ai l’opportunité de faire la cinquième et dernière année de mon programme dans une autre université dans un système de double diplomation, j’ai donc sauté sur l’occasion quand j’ai eu le feu vert de mon école. On s’est décidé très vite, on a pris la décision en même pas une semaine car c’était un projet que l’on voulait faire à deux, même si notre décision était assez tardive pour le calendrier universitaire (mars/avril pour un départ en août, ndlr).

En septembre 2022, vous avez souhaité continuer votre double projet aux Etats-Unis à l’Université de l’Etat de Louisiane. Vous préparez des études dans quel domaine, vous pouvez nous en dire davantage ?

Alexandre et Cindy : Cindy est en dernière année d’un parcours en école d’ingénieur en France, spécialisée en Génie Industriel. Elle a pu trouver l’équivalent ici avec un master en Industrial Engineering dans le but d’obtenir le double diplôme. Quant à moi, le parcours est plutôt similaire puisque je suis en dernière année de mon parcours à Sciences Po. J’effectue donc ma dernière année en double diplomation avec un master en Mass Communication ici à LSU (Louisiana State University).

Également, pensez-vous que vous avez progressé en anglais depuis votre arrivée ?

Alexandre et Cindy : Notre niveau était plutôt bon avant d’arriver ici ce qui a facilité notre intégration. Les progrès sont toutefois flagrants car rien ne remplace le fait de devoir pratiquer au quotidien. Cependant, nous habitons en Louisiane, un état du sud réputé pour avoir un fort accent qui n’a pas forcément toujours facilité la compréhension orale avec certains locaux au début. En l’espace de deux mois on est devenu totalement « fluent », ça nous permet de communiquer aussi bien qu’en français désormais.

Retour en arrière sur la saison 2022, vous avez tous les deux amélioré votre record personnel sur 800 m.

Cindy : C’est vrai qu’on a tous les deux passé un cap la saison dernière. Après une saison hivernale plus que réussie, j’avais de grandes aspirations pour la saison estivale, mais des petits pépins physiques sont venus me ralentir, ce qui a fait que le processus a été retardé. Après mon titre de championne de France, je savais que j’en avais encore sous le pied, je sentais que je montais vraiment en puissance, donc j’ai poussé un peu ma saison en allant courir en Belgique, ce qui a porté ses fruits car sur ma dernière course je parviens enfin à faire 2’03 sur 800 m. Je pense qu’il y avait encore de quoi faire un peu mieux, mais j’ai préféré couper pour repartir en forme et reposée aux US.

Alexandre : Content du cap chronométrique passé l’été dernier en courant 1’46 sur 800 m, même si ça aurait été vécu comme un échec de ne pas atteindre ce résultat dans la saison. Satisfait de ma deuxième place aux Championnats de France U23 dans une course très relevée pour la catégorie avec deux autres coureurs en 1’45 (Yanis Meziane et Anicet Kozar). Déçu toutefois de la non-sélection pour les Championnats Méditerranéens U23 alors que tous les critères de sélection avaient été remplis. Ce n’est pas très grave, ça donne juste encore plus de détermination pour la suite.

 — Cindy, une belle récompense à peine arrivée sur votre campus américain à l’Université de l’Etat de Louisiane avec une sélection en équipe de France en septembre dernier, comment avez-vous vécu cette première sélection ?

Cindy : Ce qui est marrant c’est que j’ai appris ma sélection en équipe de France en atterrissant à Atlanta pendant mon voyage pour LSU. Ça a été une belle surprise, et c’est surtout venu clôturer ma saison en beauté. Cependant, j’ai fait le choix de couper quelques semaines en août car je savais qu’autrement, avec le départ aux US, la saison allait être longue. La préparation a donc été très courte car, en plus du changement d’entraîneur, j’ai dû d’abord m’adapter au climat de Louisiane qui était très chaud et humide à cette période de l’année. J’ai effectué très peu d’entraînements spécifiques pour me préparer pendant environ deux semaines. Cependant, c’était une expérience géniale, qui me servira sans aucun doute pour la suite. Ça donne vraiment envie de faire encore mieux pour être en mesure de rivaliser avec les meilleures dans les championnats à venir.

Comment se passe votre nouveau rythme de vie ? Comment se passe la vie dans un campus avec notamment plus de 37 000 étudiants ?

Alexandre et Cindy : Le rythme est totalement différent. Les entraînements ont lieu assez tôt, 7h du matin tous les jours, notamment pour éviter la chaleur. Mais on s’y fait assez vite et ça devient juste une nouvelle routine. La vie sur le campus est très agréable. Un des points positifs est la proximité avec le stade et tous les autres lieux du quotidien (kiné, cafétéria, salle de classe…), nous n’avons pas de déplacements superflus dans la journée. Pour ce qui est du grand nombre d’étudiants, ça se remarque par la taille assez impressionnante du campus mais on ne ressent pas forcément une forte densité d’étudiants (probablement du fait de la taille du campus). On côtoie d’ailleurs essentiellement nos teammates d’entraînements parce qu’avec 37 000 personnes c’est un peu mission impossible de tisser des liens en dehors du groupe.

En quoi le rythme, la méthode et la charge d’entraînement sont différents par rapport à la France ?

Alexandre : Bien que le rythme soit différent, j’aime beaucoup les entraînements matinaux. Ça permet d’être frais sans avoir la journée de cours/déplacements dans les jambes, ce qui créé quand même pas mal de fatigue pour moi en France. Ça permet également d’enchainer le matin avec le kiné (disponible 7j/7) avant d’aller en cours et ça, ça n’a pas de prix. Pour ce qui est de l’entraînement il n’y a pas de grand changement de mon côté, la vision du coach est vraiment similaire à celle de mon coach français (Lahcen Salhi), je retrouve donc une vraie continuité et c’est super agréable. Le kilométrage reste identique à ce que je faisais à cette période de l’année en France. C’est bien loin des clichés que l’on entend souvent sur l’entraînement US par rapport au fait qu’ils ne font que « borner » sans vraiment de qualité. Ici, c’est la qualité avant tout.

Cindy : J’ai globalement la même vision qu’Alexandre : les entraînements matinaux nous permettent d’avoir la journée pour récupérer, se reposer, aller chez le kiné… Et on peut organiser le reste de notre journée comme on le souhaite. Concernant l’entraînement, c’est assez différent que ce que j’avais l’habitude de faire en France pour ma part. Je fais plus de qualité et moins de quantité ici. Au départ ça me faisait bizarre, j’avais l’impression de ne jamais en faire assez. Mais finalement, je suis beaucoup plus fraiche et donc vraiment plus forte sur les séances qualitatives. C’est donc une vision différente de ce dont j’avais l’habitude, mais qui me plaît vraiment bien.

Que pouvez-vous dire de votre nouveau cadre d’entraînement (infrastructures, suivi, accompagnement) ?

Alexandre et Cindy : Nous avons la chance d’être dans une université possédant très certainement les meilleures infrastructures sportives du pays, et ça se ressent énormément au quotidien. D’un point de vue médical : kinés présents à l’entraînement et dispo 7j/7, médecins, ostéopathes, diététiciens ou encore des psychologues. Nous avons un bâtiment entier dédié à ces soins avec tous les appareils de récupération possibles et imaginables. On a également accès à une cafétéria réservée aux étudiants-athlètes où tout est excellent d’un point vue nutritif (et gustatif !) où nous mangeons matin, midi et soir. On est assez chanceux parce qu’autrement il serait compliqué de manger sainement dans un pays où ce n’est pas vraiment la norme. Et c’est sans parler de la piste outdoor, indoor (piste que nous n’utilisons d’ailleurs quasiment pas car le climat ne nous en donne pas vraiment l’utilité) ou encore la salle de muscu réservée à l’athlétisme.

Tout est vraiment mis en place pour réussir et être performant. Les cours sont aussi importants que le sport. Si nous ne validons pas notre semestre, nous ne sommes plus éligibles pour les compétitions. Il y a donc tout qui est mis en place pour notre réussite scolaire s’il y a un besoin quelconque à commencer par un conseiller académique, des cours particuliers ou une salle d’étude. Comme pour le côté sportif, tout est fait pour nous accompagner au mieux.

— Justement, en parlant d’accompagnement, relatez nous celui de l’agence Elite Athletes ?

Alexandre et Cindy : Notre requête de base était assez particulière : Partir à deux en s’engageant relativement tardivement dans le processus. Cependant, Martin, directeur de l’agence Elite Athletes, a été très efficace pour nous proposer des opportunités très intéressantes assez rapidement. Ce qui nous a permis de nous engager avec LSU très rapidement grâce à un coup de cœur avec le coach (sa vision de l’entraînement) mais également pour la réputation de LSU (32 fois champion NCAA D1, champion NCAA D1 en 2021, berceau de très nombreux grands athlètes internationaux ou encore le climat) qui est l’une des plus grosses universités du pays en athlétisme et surtout la plus grosse tous sports confondus. D’un point de vue administratif, tout était très complet. Le système américain est très différent et complexe. Nous avions définitivement besoin de cette aide, surtout vu la rapidité avec laquelle nous devions agir. L’agence est toujours présente après le départ. Dans mon cas (Alexandre), Martin m’a été d’une aide précieuse pour accélérer un processus de validation de mes bulletins avec LSU pour me permettre de valider officiellement mon admission. Ils prennent aussi de nos nouvelles pour être certain que tout se passe pour le mieux sur place.

Actuellement en pleine saison de cross, comment ça se passe pour vous deux qui êtes plutôt des pistards ?

Alexandre : Pas de cross pour moi, je suis chanceux j’ai réussi à y échapper ! Ma saison commencera en janvier avec l’indoor. J’en profite donc pour me préparer au mieux en me concentrant sur l’entraînement.

Cindy : Même si nous sommes des pistards, nous avons l’habitude de construire une grosse base foncière pendant la période hivernale. Pour ma part, j’ai toujours couru les cross en France, mais c’est totalement différent ici. D’une part, même si les parcours sont beaucoup moins exigeants qu’en France (très plats, secs et roulants), la distance à parcourir est 6km ici, ce qui est vraiment long, et dur en tant que coureuse de 800 m. D’autre part, le niveau est beaucoup plus élevé ici, ce qui augmente la difficulté.

Le collectif est important dans les groupes d’entraînement aux Etats-Unis. Comment est l’ambiance dans l’équipe ? Est-ce que vous ressentez un effet de groupe ?

Alexandre et Cindy : C’est un des aspects qui nous a le plus impressionnés dans l’équipe. Il y a un vrai esprit d’équipe ici, l’ambiance est top. Les américains sont très accueillants et « friendly », ce qui favorise vraiment un fort effet de groupe. Les coachs nous rappellent constamment qu’on est une équipe et que nous devons avancer ensemble, y compris à l’entraînement. C’est vraiment génial car ça engendre d’une part une vraie cohésion d’équipe, et nous nous tirons tous vers le haut, c’est hyper motivant.

Projetons-nous sur 2023, quels sont vos objectifs et vos ambitions ?

Alexandre et Cindy : Courir toujours plus vite évidemment, sans se fixer de limites. Nous avons pas mal d’objectifs ici aux US. Bien évidemment se rendre aux Nationals indoor et outdoor avec à chaque fois la finale en ligne de mire. Pour la saison indoor, nous avons aussi à cœur d’être performants sur des épreuves de relais pour valoriser le travail d’équipe et parce que du côté féminin comme masculin il y aura des très belles perfs à aller chercher (notamment sur le relais 1200/400/800/1600). Nous avons la chance de faire partie d’une conférence avec un très haut niveau, certainement le plus haut niveau sur 800 m du pays : Southeastern Conference (SEC). Nous aurons donc également à cœur d’être très performants lors de ces échéances qui sont essentielles pour l’université. Pour ce qui est de la France et les échéances internationales, nous venons de passer dans la catégorie senior, l’objectif est donc de s’imposer au niveau français pour à terme être présents dans les grandes échéances internationales.

Si vous aussi, vous souhaitez tenter l’aventure américaine pour les rentrées 2023, 2024 ou 2025, contactez Elite Track & Field : martin@eliteathletes.fr

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