Du 28 août au 3 septembre 2023, Chamonix va vivre au rythme de l’un des plus prestigieux ultra-trails de la saison, l’UTMB 2023. Les premières courses de la 20e édition de l’Ultra-Trail Mont-Blanc s’élanceront avant le rendez-vous des géants le vendredi 1er septembre pour la finale des UTMB World Series. Malgré les forfaits de Kilian Jornet et de François d’Haene, les autres stars comme Mathieu Blanchard ou Courtney Dauwalter seront bien présentes en Haute-Savoie parmi les 10 000 coureurs inscrits sur les huit épreuves d’une semaine en haute altitude. Tour d’horizon sur les principaux favoris des différentes courses attendues.

Que serait l’ultra-endurance sans l’UTMB ? Depuis maintenant 20 ans, les meilleurs spécialistes sillonnent la Vallée des Alpes entre la France, l’Italie et la Suisse à la recherche de sensations fortes et de performances toujours plus époustouflantes les unes que les autres. L’UTMB, c’est aussi le plus grand événement de la planète réunissant tous les fans de trail qu’ils soient professionnels ou amateurs, français ou étrangers (107 nationalités représentées en 2023 contre 100 en 2022), hommes ou femmes (21,5% sur l’ensemble des 8 épreuves). Cette année, pas moins de 10 000 coureurs sont attendus dont 2300 (sur 6578 demandes) seront au départ de la course phare de la semaine : l’UTMB. Un parcours de 171 km et 9963 mètres de D+ dont le coup d’envoi sera donné le vendredi 1er septembre à 18h00 (temps maximum autorisé : 46h30).

Plusieurs passages à 2500 m de haut pourraient faire mal aux jambes… et à la tête pour les meilleurs coureurs qui devront rejoindre le col du Bonhomme au milieu de la nuit avant de faire face au fameux col de la Seigne près de la frontière franco-italienne. Le refuge Bonatti devrait être atteint à la moitié de la course après quasiment 18 kilomètres grimpés à 2 000 m d’altitude. Les traileurs verront ensuite la Suisse et une dernière étape au passage de la « Tête aux Vents » avant une longue et fastidieuse descente de 10 km jusqu’à Chamonix. Un périple semé d’embûches mais qui ne fait pas peur aux plus forts traileurs du circuit.

L’heure de gloire pour Mathieu Blanchard ?

Tenant du titre et quadruple vainqueur de l’UTMB (2008, 2009, 2011 et 2022), Kilian Jornet ne sera pas de la partie cette année. Fin juillet, le coureur de 35 ans et recordman de la course (19h49’30 l’année dernière) avait annoncé sur ses réseaux sociaux ressentir une douleur lancinante au bassin avant de souffrir d’un œdème osseux à la hanche droite, mettant en pause la course à pied pour tenter d’être sur la ligne de départ de cet ultra-trail dont il aurait pu devenir le seul roi sur le trône avec cinq couronnes (le Français François D’Haene, victime d’une fracture de la jambe droite, a aussi été sacré à quatre reprises). Le destin a voulu que ces deux bêtes de la discipline soient absentes, une aubaine pour Mathieu Blanchard ?

Après une surprenante troisième place surprise il y a deux ans, le Franco-Canadien a confirmé l’an passé en terminant en deuxième position derrière Jornet. Longtemps au coude à coude avec la star catalane, le Franco-Canadien avait craqué et terminé sous la barre des 20 heures (19h54’50). Mais le traileur tricolore a impressionné en 2023 que ce soit sur la Coastal Challenge au Costa Rica (236 kilomètres en six jours), sur le Marathon de Paris (2h22’36) mais aussi avec une troisième place au Marathon des Sables (250 km en six étapes dans le Sahara marocain) ou encore au Western States au scratch (7e au classement final d’une course de 161 km et 5500 m de dénivelé positif).

Durant cette année, Mathieu Blanchard s’est également exilé en expédition au Kilimandjaro puis en stage au Kenya pour travailler différemment. L’ultra-traileur de 36 ans devra tout particulièrement se méfier de Jim Walmsley, meilleur traileur à l’index UTMB avec une côte de 934 (Mathieu Blanchard en possède 909), qui figurait déjà parmi les favoris en 2022, s’apprête à prendre le départ de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc ce vendredi 1er septembre, une épreuve qui fuit l’Américain depuis sa première participation en 2017. Cette année, l’Américain, installé en Savoie pour préparer au mieux sa course, se présente comme l’un des prétendants à la victoire de cette 20e édition.

Le podium lui échappe depuis quelques années mais sa victoire à l’Istria 100 (168 km), la 3e étape de l’UTMB World Series puis la Fison Roche 2023 de Beaufort (42 km) devrait lui donner les ailes. En tout cas, Jim Walmsley s’en donne les moyens puisqu’il est installé à Arêches Beaufort depuis le début du mois d’août. Quatrième de l’UTMB en 2022, le traileur venu de Phoenix (États-Unis) avait frôlé le podium l’an dernier avant de subir une spectaculaire défaillance alors qu’il avait mené la course pendant plus de 120 kilomètres. Un troisième homme devrait se mêler à la bataille et qui d’autre que le Britannique Tom Evans (4e à l’index), vainqueur de la Western States fin juin en 14h40’22, pour repousser les limites d’une course légendaire. Derrière, l’Espagnol Pau Capell (sacré en 2019) et le Français Beñat Marmissolle, auteur d’excellents résultats ces derniers mois (6e à l’UTMB 2022, 1er à la Diagonale des Fous la même année et 2e à la Hardrock 100 en juillet dernier), tenteront de bouleverser les grands favoris.

Des Français outsiders avec… Duncan Perrillat

Côté Tricolore, outre Mathieu Blanchard et Beñat Marmissolle, la victoire finale ne sera pas aisée à aller chercher mais certains l’ont déjà fait comme Ludovic Pommeret. Vainqueur en 2016 de l’UTMB puis de la TDS en 2022, le Savoyard peut espérer un top 10 voire mieux s’il est dans une forme optimale. L’an dernier, Thibaut Garrivier, en terminait à la dixième place et se présente cette année en excellente condition tandis que Germain Grangier, qui a remporté les 90 km du Mont-Blanc et s’est classé cinquième à l’UTMB 2021 en restant longtemps dans le top 3, peut entrevoir de l’espoir. Ensuite, Baptiste Chassagne, champion de France de trail longue distance 2023, progresse de plus en plus depuis 2022 (4e à la Lavaredo et 10e à la CCC en 2022) et aura des atouts à faire valoir. N’oublions pas non plus Hugo Deck et Arthur Joyeux-Bouillon, qui ont de l’expérience dans les courses longues et seront à prendre avec sérieux. D’autres comme Gautier Airiau, Aubin Ferrari et Bastien Fleury seront en lice pour cette 20e de l’UTMB. L’absence de Xavier Thévenard, le « Petit Prince » du Mont-Blanc et trois fois lauréat en 2013, 2015 et 2018, est à souligner.

On a d’abord cru à une blague. Duncan Perrillat à l’UTMB ? Le champion de France de marathon 2022 à Deauville et champion d’Europe de cross-country par équipes 2021 à Dublin, sera bel et bien au départ de la course phare ce vendredi. « Tant qu’à faire une tentative sur ultra, autant aller jusqu’au bout de l’aventure, a expliqué le pensionnaire du Neuilly-Plaisance Sports sur les réseaux sociaux. J’avais envie d’essayer quelque chose d’assez nouveau. On reste dans un secteur assez proche. Certains athlètes font bien de la salle et après du marathon. Je pense que l’ultra peut m’apprendre pour le marathon ». Début juin, Duncan Perrillat a signé la première victoire en trail, au Puy-en-Velay, en s’adjugeant l’Ultra du Saint-Jacques, décrochant du même coup son sésame pour l’UTMB 2023. Une course de 126 km et 5250 mètres de D+ bouclée en 13h08.

Courtney Dauwalter seule au monde chez les dames ?

Ultra favorite la course féminine, Courtney Dauwalter (lire notre interview) est en quête d’un incroyable triplé Western States-Hardrock-UTMB qu’aucune femme ni homme n’a réalisé jusque-là. L’Américaine de 38 ans peut également décrocher une troisième étoile à Chamonix après avoir triomphé en 2019 (24h34’26) et en 2021 (22h30’55, record de l’épreuve). Victorieuse de la Western States (2018), de l’UTMB (2019 et 2021 avec un record en 22h30’54), de la Hardrock 100 (en juillet dernier), et de la Diagonale des Fous, Courtney Dauwalter est aussi devenue la première femme à s’imposer sur les quatre plus grands ultra-trails du circuit. Un exploit XXL que seul Kilian Jornet avait réalisé jusque-là

La meilleure traileuse de l’histoire devra tout de même se méfier de la Néo-Zélandaise Ruth Croft, vainqueure de la course CCC en 2021 ainsi que la Western States cette même année. Parmi les autres prétendantes au sacre, on retrouve la Hongroise Eszter Csillag qui revient à Chamonix après une cinquième place de l’an passé mais aussi les Tricolores Manon Bohard-Cailler (abandon en 2022), médaillée de bronze aux Mondiaux d’Innsbruck sur le trail long en 2023, et Blandine L’Hirondel, double championne du monde de trail long. Nous aurons également un oeil sur de nombreuses coureuses venues des quatre coins du globe : l’Espagnole Claudia Temps, la Canadienne Alisa Mac Donald, la Suédoise Anna Carlsson, la Chinoise Fuzhao Xiang, la Néo-Zélandaise Lucy Bartholomew, l’Allemande Katharina Hartmuth, l’Italienne Martina Valmassoi, les Américaines Sabrina Stanley, Taylor Nowlin, et Leah Yingling ainsi que les Suissesses Liza Buehler et Emma Pooley.

L’année de Jon Albon et Azaria Garcia au CCC ?

Au départ de Courmayeur, la CCC (Courmayeur-Champex-Chamonix, 101 km et 6156 m de D+) n’est plus juste « la petite soeur de l’UTMB », offrant un panorama exceptionnel face au Mont-Blanc et aux Grandes Jorasses. Le Britannique Jonathan Albon apparaît tout en haut de la liste dans la course masculine, fort d’une deuxième place l’année dernière et d’une forme olympique avant le départ. L’Italien Andreas Reiterer (3e en 2022), le Chinois Jiasheng Shen (4e) et l’Espagnol Andreu Simon Eymerich seront les principaux concurrents d’Albon. Seul français dans le top 20, Damien Humbert a malheureusement déclaré forfait suite à un œdème osseux, tout comme Mathieu Delpeuch. Les meilleures chances françaises seront incarnées par le local de l’étape Simon Gosselin, le pilier du team France, Thibaut Baronian mais aussi Paul Mathou, Antoine Charvolin et Noel Giordano.

Dans la course féminine, une athlète semble se détacher du lot : Azara Garcia. L’Espagnole est leader à l’index UTMB devant la Suédoise et expérimentée Ida Nilsson. Les traileuses ont une revanche à prendre après avoir abandonné l’année dernière. Derrière, l’Allemande Rosanna Buchauer (5e en 2022) peut jouer les trouble-fête dans un 100k où un lourd contingent américain sera emmené avec Addie Bracy (3e à l’index) comme chef de file. Erin Clark, Helen Mino Faukner et Hannah Osowski, respectivement 7e, 13e et 14e l’année dernière, feront également office d’épouvantails. Dans le top 10 des favorites, la Canadienne Priscilla Forgie, la Polonaise Paulina Tracz, la Finlandaise Johanna Antila (10e en 2022) ainsi qu’une habituée des trails de ce genre Emily Hawgood (10e et 6e les deux derniers UTMB), viendront à la lutte aux premières places. Première Française dans l’index UTMB, la double lauréate de la TDS Audrey Tanguy a un coup à jouer. La championne du monde de trail par équipes en 2023 sera accompagnée par la jeune tricolore Esther Eustache.

Un double champion du monde en terre haut-savoyarde

Plus court que la CCC, l’OCC (Orsières-Champex-Chamonix) est l’occasion aux amoureux de moyenne distance de se dresser face au 55 km (3500 m de D+) le long de la région du Valais suisse. La présence du double champion du monde du trail court (2022 et 2033), le Norvégien Stian Angermund-Vik, rien que ça, vient mettre la lumière un trail qui monte d’année en année et se rapproche d’un plateau de grands championnats. Le membre du team ASICS et vainqueur de l’OCC en 2019 sera l’homme à abattre. Ses poursuivants en Golden Trail World Series tels que le Britannique Robbie Simpson, les Italiens Francesco Puppi et Nadir Maguet ainsi que le Polonais Bart Przedwojewski seront de sérieux candidats pour bousculer l’extraterrestre norvégien. Les Espagnols ne devraient pas être loin derrière. Antonio Martinez Perez aimerait bien monter sur la plus haute marche du podium cette année après une deuxième place en 2022. Il pourrait même jouer le doublé avec son compatriote Yoel De Paz ou Daniel Osanz, 2e du MIUT42 2022 et 11e du Marathon du Mont-Blanc 2023. Quatrième de l’OCC il y a un an, le Français le mieux classé à l’index UTMB se nomme Arnaud Bonin et peut aller à la bagarre pour les premières places, sortant quatrième de la MaxiRace et cinquième du Restonica Tavignanu. Il rejoint trois autres Tricolores qui ont un coup à jouer dans cette course : Anthony Felber, Loïc Robert et Kevin Vermeulen.

L’épreuve sera aussi dense chez les femmes que chez les hommes. Un an après avoir remporté haut la main l’UTMB, l’Américaine Katie Schide a préféré s’aligner sur une distance plus courte, en compagnie de nombreuses compatriotes dont quatre d’entre elles se hissent tout en haut de l’index des favorites de la course. On a nommé Dani Moreno (3e en 2022 et au Marathon Mont-Blanc 2022), Jennifer Lichter, (4e des mondiaux de trail court et 2e de la Speedgoat50 2022), Allie McLaughlin (6e en 2022), Rachel Drake (21e sur l’OCC 2021) et l’ancienne triathlète Ironman Heather Jackson. Les Américaines seront à la lutte contre des spécialistes de la distance telles que les Espagnoles Nuria Gil Clapera (lauréate du Val d’Aran30 et Transgrancanaria Marathon 2023) et Oihanna Kortazar (3e au Marathon du Mont-Blanc et 1ère du Val d’Aran55 2023) mais aussi des membres du top 10 des favorites : la Sud-Africaine Toni MacCann, la Néo-Zélandaise Caitlin Fielder et l’Italienne Fabiola Conti. Du côté des Bleues, Mathilde Sagnes, Candice Fertin ainsi que Louise Serban–Penhouat, récemment vainqueure du Restonica Tavignanu, auront une vraie carte à jouer.

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Texte : Dorian Vuillet
Crédit photo : UTMB 2023